594 H I S T O I R E
savoir s'il rampe eu avant ou à recuJous.
Si l'on compare les organes qui servent aux
niouvemens progressifs de ces singuliers reptiles
avec ceux des vers de terre ou lombrics
, on reconnoît qu'il y a entre eux une
grande analogie, et que le l'amper doit avoir
lieu de la même manière, c'est-à-dire, par
des ondulations successives contre le sol à
l'aide des anneaux nombreux qui entourent
le corps et la queue. Toutes les relations des
voyageurs et des colons s'accordent en effet
à dire que les amphisbénes rampent avec lenteur
et à peu près comme les vers de ter-re ;
et quelques-unes ajoutent que les serpens
de ce genre peuvent aussi ramper pendant
quelques instans sur le dos et les côtés.
Lorsqu'un animal présente quelque singularité
dans sa conformation, le vulgaire
s'empresse de lui attribuer des habitudes
extraordinaires et invraisemblables ; il saisit
avec empressement tout ce qui lui paroît
tenir lieu du merveilleux : c'est ainsi que
les colons et les nègres de Surinam désignent
quelquefois les amphisbénes sous le nom de
serpent aveugle, parce que leurs yeux sont
à peine visibles; et ils ajoutent qu'il y a
dans cette colonie de grosses fourmis nommées
kusjes, selon Hartsink, qui sont sans
D E S AMPHISBENES. BgÔ
cesse occupées à nourrir ces serpens aveugles;
ce qui leur a fait donner le surnom
de roi des fourmis (i).
Les mâchoires des amphisbénes sont semblables
à celles des orvets, et leur langue
a la même forme que celle des ophisaures.
Cette langue est large, plaie, hérissée eu
dessus de petites; papilles pointues, avec
l'extrémité libre et un peu fourchue. Latreille
a remarqué, dans son ouvrage sur les
reptiles, que les divisions de cette fourche
semblent être plus fortifiées et plus épaisses
en dessous et sur les côtés, si on les examine
en dessous.
Les amphisbénes sont lents dans leurs
niouvemens ; ils paroissent se creuser des
( i ) « Je remarquai encore un autre serpent cTenv
i r o n trois pieds de long, couver t d'anneaux , et qu'on
nomme amphishène, parce qu'on suppose qu'il a deux
t ê t e s ; mais la vérité est qu'en raison de sa forme
cylindrique , sa tête et sa queue se ressemblent an
point que l'erreur est presque pardonnable ; ses yeux
d ' a i l l e u r s sont presque imperceptibles. C'est ce même
serpent que de grosses fourmis nourrissent, dit le
v u l g a i r e , lorsqu'il est aveugle , et qu'en conséquence
on honore dans ce pays sous le nom de roi des fourmis n.
Stedman , V oyage à Surinam et dans Tintér ieur de la
Guiane , in-S" , tom. I I ^ pag. 406.
m