LE B L A I R E A U . *
E Blaireau eft un animal pareffeux, défiant, folitaire,
qui fe retire dans les lieux les plus écartés, dans les bois
les plus fombres, & s’y creufe une demeure foûterraine ;
il femble fuir la fociété, même la lumière, & paffe les
trois quarts de là vie dans ce féjour ténébreux, dont il
ne fort que pour chercher là fubliltance. Comme il a
le corps alongé, les jambes courtes, les ongles, fur-
tout ceux des pieds de devant, très-longs & très-fermes,
il a plus de facilité qu’un autre pour ouvrir la terre, y
fouiller, y pénétrer, & jeter derrière lui les déblais de
fon excavation, qu’il rend tortueufe, oblique, & qu’il
pouffe quelquefois fort loin. Le renard, qui n’a pas la
même facilité pour creufer la terre, profite de fes travaux
: ne pouvant le contraindre par la force, il l’oblige
* L e B la ire a u o u T a i f lo n ; en L a t in , Aleles, Taxus; en I ta lien ,
TaJTo ; en E f p a g n o l , Tafugo, Texon; en A llem a n d , Tachs, Dachs,
Dar ; en A n g lo i s , Badger, Brock, Grai, Baujfonpate ; e n S u é d o i s ,
Graf-fwin; en P o lo n o i s , Jaguricc, Borfuc, Kol-d^jki, Z,bik.
AI des. G e ih e r , lcon. animal, quadrup. pag. 86.
Taxusßve Aleles. R a y , Synop. animal, quadrup. pag. 1 8j .
Aleles unguïbus anticis longijfmis. Taxus, L in n æ u s .
Coati caudâ brevi. Taxus, Aides. Coati grif eus. K l e i n , de quadrup.
pag. 73.
Aleles pilis ex fordidè albo & nigro variegatis vefita, capite tamis
alternatim albis & nigris yariegato. Aleles, B r i f lo n , Regn. anim.
pag. 273.
par
d u B l a i r e a u . 105
par adreffe à quitter fon domicile, en l’inquiétant, en
faifant fentinelle à l’entrée, en l’infeélant même de fes
ordures ; enfuite il s’en empare , l’élargit, l’approprie,
& en fait fon terrier. Le blaireau, forcé à changer de
manoir, ne change pas de pays ; il ne va qu’à quelque
diftance travailler fur nouveaux frais à fe pratiquer un
autre gîte, dont il ne fort que la nuit, dont il ne s’écarte
guère, & où il revient dès qu’il fent quelque danger. II
n’a que ce moyen de fe mettre en fureté, car il ne peut
échapper par la fuite; il a les jambes trop courtes pour
pouvoir bien courir. Les chiens l’atteignent promptement,
lorfqu’ils le furprennent à quelque diftance de fon
trou : cependant il eft rare qu’ils l’arrêtent tout-à-fait 6c
qu’ils en viennent à bout, à moins qu’on ne les aide.
Le blaireau a le poil très-épais, les jambes, la mâchoire
& les dents très-fortes, auffi-bien que les ongles; il fe
fert de toute là force , de toute fà réfiftance & de toutes
fes armes en fe couchant fur le dos, & il fait aux chiens
de profondes blefllires. Il a d’ailleurs la vie très-dure;
il combat long-temps, fe défend courageufèment, &
jufqu’à la dernière extrémité.
Autrefois que ces animaux étoient plus communs
qu’ils ne le font aujourd’hui, on dreffoit des baffets
pour les chaffer & les prendre dans leurs terriers. Il n’y
a guère que les baffets à jambes torfes qui puiflènt y
entrer aifément ; le blaireau fe défend en reculant , éboule
de la terre, afin |d’arrêter ou d’enterrer les chiens. On
ne peut le prendre qu’en faifànt ouvrir le terrier par
Tome V II. O