326 H i s t o i r e N a t u r e l l e
Ray, qui le premier efl tombé dans cette erreur en les
indiquant fous deux dénominations, femble avouer qu’il
n’en connoît a qu’une efpèce. Et quoique les courtes
defcriptions qu’il donne de l’une & de l’autre efpèce
paroiffent différer, on ne doit pas en conclurre qu’elles
exiflent toutes deux, i.° parce qu’il n’en connoiffoit
lui-même qu’une; 2 ° parce que nous n’en- connoiflons
qu’une, & que quelques recherches que nous ayons
faites, nous n’en avons trouvé qu’une; 3.0 parce que
Gefner & les autres anciens Naturalises ne parlent que
d’une, fous le nom de mus agrefis major, qu’ils difent
être très-commune, & que Ray dit auffi que l’autre
qu’il donne fous le nom de mus domejlicus médius, efl
très-commune : ainfi il ferait inipoffible que les uns ou
les autres de ces Auteurs ne les euffent pas vues toutes
deux, puifque de leur aveu toutes deux font fi communes;
parce que dans cette feule & même efpèce,
comme il s’en trouve de plus grands & de plus petits,
il eft probable qu’on a été induit en erreur, & qu’on a
fait une efpèce des plus grands, & une autre efpèce
des plus petits ; y,° enfin , parce que les defcriptions de
ces deux prétendues efpèces n’étant nulle part ni exaéles
ni complètes, on ne doit pas tabler fur les caractères
vagues & fur -les différences qu’elles indiquent.
Les Anciens, à la vérité, font mention de deux
efpèces, l’une fous la dénomination de mus agrejlis major,
* De hae fpecie mihi non mdequaque Jatlsfaüum ejt. R a y , Synopf.
quadrup. pag. 21p.
& l’autre fous celle de mus agrejlis minor; ces deux efpèces
font fort communes, & nous les connoiffons
comme les Anciens : la première efl notre mulot; mais
la fécondé n’efl pas le mus domejlicus médius de Ray, c ’eft
un autre animal qui efl connu fous le nom de mulot à
courte queue, ou de petit rat des champs ; & comme il efl
fort différent du rat ou du mulot, nous n’adoptons pas le
nom générique de petit rat des champs, ni celui de mulot
à courte queue, parce qu’il n’efl ni rat ni mulot, & nous
lui donnerons un nom particulier*. Il en efl de même
d’une efpèce nouvelle qui s’efl répandue depuis quelques
années, & qui s’efl beaucoup multipliée autour de
Verfàilles, & dans quelques provinces voifines de Paris,
qu’on appelle rats des bois, rats fauvages, gros rats des
champs, qui font très - voraces , très - méchans, très-
nuifibles, & beaucoup plus grands que nos rats ; nous
lui donnerons auffi un nom particulier, parce qu’elle
diffère de toutes les autres, & que pour éviter toute con-
fufion, il faut donner à chaque efpèce un nom. Comme
le mulot & le mulot à courte queue, que nous appellerons
campagnol, font tous deux très-communs dans les
champs & dans les bois ; les gens de la campagne les
ont défignés par la différence qui les a le plus frappés :
nos payfàns en Bourgogne appellent le mulot la ratte à
la grande queue, & le campagnol la ratte couette ; dans
d’autres provinces on appelle le mulot le rat fauterelie,
parce qu’il va toujours par fàuts ; ailleurs on l’appelle fouris
* J e l ’ap p e lle C am p a g n o l , d e f o n n om en Italien Campàgnoli.