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à portée, on quête alors avec les briquets dès qufils
font tombés fur la voie, le renard gagne fon gîte, mais
en arrivant il ;efiùie une première décharge : s’il échappe à
la balle, il fuit de toute fa vîteffe, fait un grand tour, &
revient encore à fon terrier, où on le tire une fécondé
fois, & où trouvant l’entrée fermée, il prend le parti
de fe làuver au loin en perçant droit en avant pour ne
plus revenir. C ’eft alors qu on fe fert des chiens courans,
lorfqu’on veut le pourfuivre : il ne Liftera pas de les
fatiguer beaucoup, parce qu’il palfe à deffein dans les
endroits les plus fourrés, où les chiens ont grand peine
à le fuivre, & que quand il prend la plaine il va très-
loin fans s’arrêter.
Pour détruire les renards , il eft encore plus commode
de tendre des pièges , où l’on met de la chair pour appât,
un pigeon , une volaille vivante , &c. Je fis un jour fui--
pendre à neuf pieds de hauteur fur un arbre les débris
d’une halte de chaffe, de la viande, du pain, des os;
dès la première nuit les renards s’étoient fi fort, exercés
à fauter, que le terrein autour de l’arbre étoit battu comme
une aire de grange. Le renard eft auffi vorace que car-
naffier ; il mange de tout avec une égale avidité ,: des
oeufs, du lait, du fromage, des fruits, & fur-tout des
raifins: lorfque les levreaux & les perdrix lui manquent ,
il fe rabat fur les rats, les mulots, les ferpens, les lézards,
les crapaux , &c. il en détruit un grand nombre ; c’eft-là
le feul bien qu’il procure. Il eft très-avide de miel, il
attaque les afieilles fàuvages, les guêpes, les frelons,
qui d’abord tâchent de le mettre en fuite, en le perçant
de mille coups d’aiguillon ; il fe retire en effet, mais c ’eft
en fe roulant pour les écrafer, & il revient fi fouvent à
la charge, qu’il les oblige à abandonner le guêpier; alors
il le déterre & en mange & le miel & la cire. Il prend
auffi les hériffons, les roule avec Les pieds, & les force
à s’étendre. Enfin il mange du. poifïon, des écreviffes,
des hannetons, des fauterelles, &c.
Cet animal reffemble beaucoup au chien, fur-tout par
les parties intérieures; cependant il en diffère par la tête,
qu’il a plus greffe à proportion de fon corps ; il a auffi les
oreilles plus courtes, la queue beaucoup plus grande, le
poil plus long & plus touffu, les yeux plus inclinés; il en
diffère encore par une mauvaifè odeur très - forte qui lui
eft particulière , & enfin par le caractère le plus effentiel,
parle naturel ; car il ne s’apprivoife pas aifément, & jamais
tout-à-fàit: il languit lorfqu’il n’a pas la liberté, & meurt
d’ennui quand on veut le garder trop long-temps en
domefticité. Il ne s’accouple point avec la chienne * ; s’ils
ne font pas antipathiques, ils font au moins indifférens..
Il produit en moindre nombre , & une feule fois par an ;
les portées font ordinairement de quatre ou cinq, rarement
de fix, & jamais moins de trois. Lorfque la femelle eft
pleine, elle fe recèle, fort rarement de fon terrier, dans
lequel elle prépare un lit à les petits. Elle devient en
chaleur en hiver, & l’on trouve déjà de petits renards
* V o y e z les e x p é r ien c e s q u e j ’ai faites à c e f u j e t , Vol. V d e ce t
o u v r a g e , a r tic le d u ch ien .