2 i z Histoire Naturelle
Selon le témoignage de Strabon, le furet a été apporté
d’Afrique en Efpagne, & cela ne me paroît pas fans
fondement, parce que l’Efpagne eft le climat naturel
des lapins, & le pays où ils étoient autrefois le plus
abondans : on peut donc préfumer que pour en diminuer
le nombre, devenu peut-être très - incommode,
on fit venir des furets avec lefquels on lait une chafle
utile, au lieu qu’en multipliant les putois, on ne pour-
roit que détruire les lapins, mais fins aucun profit,
& les détruire peut-être beaucoup au de-là de ce que
l ’on voudroit.
Le furet, quoique facile à apprivoifer, & même affez
docile, ne laiffe pas d’être fort colère ; il a une mauvaife
odeur en tout temps, qui devient bien plus forte lorf-
qu’il s’échauffe ou qu’on l’irrite; il a les yeux vifs, le
regard enflammé, tous les mouvemens très-fôuples, &
il eff en même temps fi vigoureux, qu’il vient aifément
à bout d’un lapin qui eft au moins quatre fois plus gros
que lui.
Malgré l ’autorité des Interprètes & des Commentateurs,
nous doutons que le fiiret foit Yiâis des Grecs.
« L ’id is , dit Àriftote, eft une efpèce de belette fàuvage,
» plus petite qu’un petit chien de Malte, mais femblable à
la belette par le poil, par la forme, par la blancheur de la
» partie inférieure, & auffi par l’aftuce des moeurs ; il s’ap-
» privoife beaucoup ; il fait grand tort aux ruches, étant
»avide de miel, il attaque auffi les oifeaux, il a, comme
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le chat, le membre génital ofleux. Hiß. animal, lib. IX, «
cap. 6. » Il paroît, i.° qu’il y a une efpèce de contradiction
ou de mal entendu à dire que l’idis eft une efpèce de
belette fauvage qui s’apprivoife beaucoup , puifque la
belette ordinaire, qui eft ici la moins fàuvage des deux,
ne s’apprivoife point. 2.0 Le furet, quoique plus gros
que la belette, n’eft pas trop comparable au petit épagneul
ou au chien bichon dont il n’approche pas pour
la grofleur. 3° Il ne paroît pas que le furet ait l’aftuce
de moeurs de la belette, ni même aucune rufe: enfin,
il ne fait aucun tort aux ruches, & n’eft nullement avide
de miel. J’ai prié M. le Roi , Infpedeur des chaffes
du Roi, de vérifier ce dernier fait,- & voici fà reponfe.
M . de Buffon peut être affuré que les furets nont pas
h la vérité iin goût décide pour le miel, mais tpi avec
un peu de diète on leur en fa it manger ; nous en avons
nourri pendant quatre jours avec du pain trempé dans de
l ’eau miellée ; ils en ont mange, ix meme en afßz grande
quantité, les deux derniers jours ; il efl vrai que les plus
foibles de ceux-là commençoient à maigrir d’une maniéré
fenfible. Ce n’eft pas la première fois que M. le R o i,
qui joint à beaucoup d’efprit un grand amour pour les
fciences, nous a donné des faits plus ou moins impor-
tans, & dont nous avons faitufàge. J’ai efiàyé moi-meme
n’ayant pas de furets fous ma main, de faire la meme
épreuve fiir une hermine, en ne lui donnant que du
miel pur à manger, & en meme temps du lait a boire,
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