24 H i s t o i r e N a t u r e l l e .
que la comparer avec elle - même. Dans J économie
animale, elle nous paroît très-myftérieufe & très-cachée,
non feulement parce que le fujet en eft fort complique,
& que le corps de l’homme eft de toutes fes productions
la moins ftmple, mais ftir-tout parce qu on ne 1 a pas
comparée avec elle - même, & qu ayant négligé ces
moyens de comparaifon, qui feuls pouvoient nous donner
des lumières, on eft refte dans 1 obfcunte.du doute, ou
dans le vague des hypothèfes. Nous avons des milliers
de volumes ftir la defcription du corps humain , & a
peine a-t-on quelques mémoires commencés fur celle
des animaux: dans l’homme on a reconnu, nomme,
décrit les plus petites parties, tandis que l’on ignore fi
dans les animaux l’on retrouve, non feulement ces petites
parties, mais même les plus grandes ; on attribue certaines
fondions à de certains organes, fans être informé
fi dans d’autres êtres, quoique privés de ces organes,
les mêmes fondions ne s’exercent pas ; en forte que dans
toutes ces explications qu’on a voulu donner des différentes
parties de l’économie animale, on a eu le double
defàvantage d’avoir d’abord attaqué le fujet le plus
compliqué, & enluite d’avoir raifonné ftir ce meme
fujet fans fondement de relation , & fans le fecours de
l ’analogie.
Nous avons fuivi par-tout, dans le cours de cet ouvrage,
une méthode très-différente : comparant toujours
la Nature avec elle-même, nous l’avons confidérée dans
fes rapports, dans fes oppofés, dans fes extrêmes; &
pour
l e s A n i m a u x c a r n a s s i e r s . 2 j
pour ne citer ici que les parties relatives à l’économie
animale, que nous avons eu occafion de traiter, comme
la génération, les fens, le mouvement, le fentiment,
la nature des animaux, il fera aifé de reconnoître qu’a-
près le travail, quelquefois long, mais toujours néceflàire,
pour écarter les fauffes idées, détruire les préjugés,
féparer l’arbitraire du réel de la chofe, le feul art que
nous ayons employé eft la comparaifon : fi nous avons
réuffi à répandre quelque lumière ftir ces fujets, il faut
moins l’attribuer au génie, qu’à cette méthode que nous
avons fuivie conftamment, & que nous avons rendue
auftï générale, auflî étendue que nos connoiffances nous
l ’ont permis. Et comme tous les jours nous en acquérons
de nouvelles par l’èxamen & fa difleétion des parties
intérieures des animaux, & que pour bien raifonner fur
l ’économie animale, il làut avoir vû de cette façon au
moins tous les genres d’animaux différens, nous ne nous
prefferons pas de donner des idées générales avant d’avoir
préfenté les réftiltats particuliers.
Nous nous contenterons de rappeler certains faits qui,
quoique dépendans de la théorie du fentiment & de l’appétit,
fur laquelle nous ne voulons pas, quant à préfent,
nous étendre davantage, ftiffiront cependant feuls pour
prouver que l’homme, dans l’état de nature, ne s’eft
jamais borné à vivre d’herbes, de graines ou de fruits,
& qu’il a dans tous les temps, auffi-bien que la plufpart
des animaux , cherché à fe nourrir de chair.
La diète Pythagorique, préconifée par des philofophes
Tome V U . D