thus Bertrand un libraire plus jaloux de faire un bon livre,
que de livrer au monde savant un de ces ouvrages comme
.ou en produit tant, exécuté avec rapidité et une telle légèreté,
que les auteurs y paraissent étrangers aux sciences qu’ils se
chargent d’y trailei’. Certes, faire figurer, par files et souvent
sans pattes, des insectes sur de grandes planches, donner à
ceux-ci des noms sans être certain qu’ils n’en aient pas re çu ,
brocher des descriptions, sans s’inquiéter de celles qii’en ont
déjà beaucoup mieux faites une foule d’auteurs, est chose facile;
il m’eût suffi de quelques mois pour en produire au moins
autant. Le lecteur judicieux verra que telle n’a pas été la
marche que j ’ai suivie; il reconnaîtra que la durée du travail
fut motivée par des investigations bibliographiques aussi nombreuses
que difficiles et par les comparaisons qu’il m’a fallu
faire entre des espèces nouvelles ou des genres inédits et ce qui
existait déjà dans la science.
Ici viendrait naturellement se placer cette réflexion que,
par le temps employé pour la rédaction de la partie dont j ’avais
accepté le fardeau, j ’ai laissé aux auteurs de plus d’une circumnavigation
postérieure le temps de publier leurs récoltes.
Il me sera facile de répondre que la science gagnera plus dans
un travail longuement élaboré que dans ces publications hâtives
écrites sous les inspirations rapides et parfois fugitives du moment;
publications où fauteur semble aspirer à un prix de
course plus qu’au succès scientifique. On en jugera par les citations
que je ferai tout à l’heure.
Ce ii’est pas non plus sans de grands sacrifices que j ’ai pu
mettre à terme l’histoire des animaux articulés du Voyage de
la Coquille; car, ce travail, je fai entrepris et achevépar amour
pour la science; sans doute si je bavais écrit comme à la mécanique,
qu’on me passe l’expression, j ’eusse obtenu des récompenses
données avec tant de libéralité à qui sait les enlever de
vitesse; mais il m’a fallu prélever sur les travaux qui assurent
l’existeuce de ma famille, une part considérable de mon temps
pour l’accorder à des recherches ingrates, difficiles, et qui
produisent peu d’effet aux yeux de tant de gens, incapables
d’apprécier la valeur des livres autrement que par leur grosseur
et la-promptitude de l’exécution. Il a fallu la passion scientifique
dont je suis animé pour me .soutenir dans la volonté de
terminer consciencieusement mon travail et de contribuer
ainsi à une publication honorable pour le département de la
marine auquel les sciences naturelles devaient déjà beaucotq).
fin e faut ni un grand mérite ni beaucoup de temps pour rechercher
dans les collections le nom déjà donné à tels ou tels
insectes (ce ne sont pas les noms qui leur manquent, soit eu
France, soit à l’étranger); il n’en faut pas davantage pour décrire
ensuite à la hâte ces mêmes animaux i un pareil travail
m’a toujours répugné; il ne sert qu’à entasser pages sur pages,
volumes sur volumes. La science, embarrassée par la synonymie
obscure qui en résulte, devient un vrai dédale où les bons esprits
se perdent, et les entomologistes, aujourd’hui, ne saveni
vraiment plus comment se débarras.ser de cette lèpre qui rend
leurs études infinies, pénibles, incertaines, et prépare à ceux
qui viendront après nous des difficultés capables de les dégoûter
de l’étude des sciences naturelles. Un seul fait prouvera ce
que j’avance. Le genre Maerothops est inscrit dans \Astrolabe
(partie entomologique, page 210), et, à la suite de ce nom générique
, je lis la citation du nom de Mac Leay, de même qu ou
lit celles de Dejean, Guérin, Gory, etc., etc., sous d’autres
noms génériques ou spécifiques; mais que dit un nom sans l ’indication
de l’ouvrage ou du mémoire dans lesquels finsecte fut
publié.^ Il ne peut f[u’entraîncr l’entomologiste qui veut remonter
aux sources, à des recherches longues et rebutantes, au bout
desquelles il doit encore demeurer dans le doute ( i). J’ai en
(i) Comme je l’ai fait pour le genre Sderodernic de K lug, que Latreille avait
fait entrer dans tons ses ouvrages, sans dire qu’il était inédit.