Etat des Hollandais
au
cap.
camarades & moi nous allâmes dîner chez M. de Van-
deripié, propriétaire du haut Confiance* Il nous fit la
'meilleure chere du monde, & nous y bûmes beaucoup
de fon vin, foit en dînant, foit en goûtant dés différentes
piecês pour faire notre emplette.
Le terroir de Confiance, terminé en pente douce, eft
d’un fable graveleux. La vigne s’y cultive fans éehalas ;
le fep eft taillé à petit bois. Le vin s’y fait en mettant dans
la cuve la grape égrenée. Les fûts pleins fe cdnfervent
dans un cellier à rez-de-chauffée, dans lequel l?air a une
libre circulation;' Nous vifitâmes en revenant de Confiance
deux maifons de plaifance qui appartiennent au
Gouverneur. La plus grande nommée Newland a un jardin
beaucoup plus beau que celui de la Compagnie au
Cap. No'usavofis'trouvé ce dernier’fort" inférieur àvfa':téi
putation. De longues allées de charmilles très-hautes lui
donnent l’air d’un jardin de Moines ; il eft planté de chênes
qui y viennent très - mal.
Les plantations des Hollandois fe font fort étendues fur
tpute la côte , & l’abondance y eft par-toüt le fruit de la
culture, parce que le cultivateur, fournis aux feules loix,
y eft libre & sur de fa propriété. Il y a des habitàns jufc
qu’à près de cent cinquante lieues de la capitale $ ils n’ont
d’ennemis à craindre que les bêtes féroces ; car les Hottentots
ne lés moleftent point. Une des plus belles parties
de la colonie du Cap, eft celle à laquelle on a donné le nom
fe petite Rochelle. C’eft une peuplade de François chaffés
de leur patrie par la révocation de l’édit de Nantes. Elle
furpaffe toutes les autres par la fécondité du terrein & l’in-
duftriê des colons. Ils ont confervé à cette mere adoptivë le
nom de leur ancienne patrie, qu’ils aiment toujours, toute
rigoureufe qu’elle leur a été.
Le Gouvernement envoya de tems-en-tems des caravanes
vifiter l’intérieur du pays. Il s’en eft fait une de huit
mois en 1763. Le détachement perça dans le Nord & fit,
m’a-t-rpn alluré, des découvertes importantes ; ce voyage
n’eut pas cependant le fuccès qu’on devoir, s’en promettre;
le mécontentement & la difcorde fe mirent dans le détachement
& forcèrent le chef à revenir fur fçs pas, taillant
fes découvertes imparfaites. Les Hollandois ayoient eu
connoiflance d’une.jpat-jon jaune , dont les cheveux font
longs , & qui leur a paru très-farouche.'
C ’eft dans ce voyage que, l’on a trouvé le quadrupède
de dix-fept pieds de hauteur, dont j’ai remis le defïein h.
M. 'de Buffonj, c’etoit, une femelle qui allaitoit yn. faon
dont la hauteur n’étoif .encore que de fçpt pieds. On tuai
la mere, le faon fut J^tj^yiyant, mais,,il,ipoiirut,après*
quelques, jours de marche. M. de Buffo'n m’a allure que
ep animai eft celui que \ç.s,Naturaiijïe$ nomm entlagifoffe.,
On n’en âvoit pas revu depuis celui qui fut. apporté à
Rome du tems de C.éfar , <8é montré à l’amphithéâtre. On.
a auffi trouvé il y a trois.ans, & apporté au Cap, où il n’a
vécu que-.deux mois;; un. quadrupède d’une grande ;b eau-
té , lequel fient du taureau,, du cheval & du cerf, & dont
le genre eft abfolument nouveau. J’ai pareillement remis
à M. de Ruffon le deffein ëxaél de cet animal dont je.
çrps qvm|#&rce & la vîteffe égalent la beauté. Ce n’eft
pas.fans raifon que l’Afrique a été nommée la mere. des:
montes.
Munis de bons vivres, de vins & de rafrmchifTemens;
de toute efpece, nous appareillâmes de la rade du Cap le
17 après midi. Nqus paffâmes entre l’île Roèen & k côte ;
à fix heures du foir.le milieu de cette île nous reftoit au
Départ du
cap.