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prifes près de Spandau. Ce poiffon parvient à une groffeur confldérable.
Celui dont je donne le deffin, avoit trois pieds de long, & pefoit trois
livres. Il pèfe quelquefois quatre à fix livres; & alors il eft gros comme
le bras. On le trouve auffi en Angleterre, en France, en Italie & en
Amérique ; & Jovt en a traité parmi les poilfons du lac Claris. Il vit
de proie, & multiplie beaucoup. Ses ennemis font le filure, le brochet
& la loutre.,Sa chair eft très-délicate; ,& G a lien dit qu’elle eft de facile
digeftion ¿). Cependant quand elle eft graffe, elle eft lourde fur l’eftomac.
On attribue la mort de Henri I , roi d’Angleterre, à un repas où il avoit
trop mangé de ce poiffon c).
Au mois de Mars, d’Avril & de Mai, quand il fort des eaux falées,
fa chair eft bonne; mais enfuite elle devient dure & de mauvais goût.
Peut - être eft - ce à caufe du bon goût de ce poiffon que la ville de
Gloucefter eft dans l’ufage de faire tous les ans préfent au roi d’Angleterre
d’un pâté de lamproie aux fêtes de Noël; & comme elles font très-rares
dans cette faifon, on donne quelquefois jufqu’à-une guinée pour une feule
lamproie d'). Dans les pays où l’on en prend beaucoup on les fait griller;
puis on les met dans des barils avec du vinaigre & des épices, & on les
envoie enfuite dans les autres pays, pour être fervies fur la table des gens
riches. On prend la lamproie à la louve,, à la naffe & aux filets. En
Angleterre fur-tout, on les prend en quantité en même tems que les
faumons & les alofes,
Quant à la conformation intérieure, ce poiffon diffère fenfiblement
des poiffons que nous avons décrits jufqu’ici. L’ouverture de la bouche
eft oblongue. Les dents font creufes, & ne font pas dans les mâchoires,,
mais dans des capfules charnues. La langue de la lamproie a auffi une
forme toute différente; elle repréfente un croiffant, & eft armée au bord
de dents en forme de fcie. Derrière la langue, commence le canal
des alimens. Il s’étend jufqu’à l’anus dans une direétion droite, fans
finuofités, & il n’a ni appendices, ni plis pour retenir la nourriture; au lieu
que les autres poiffons ont huit ouïes pour la refpiration ; ceux - ci
ont quatorze petites bourfes, fur lefquelles eft étendue une peau rouge
& pliffée. Ces bourfes font arrangées les unes derrière les autres,
& s’avancent dans une direétion oblique ; mais elles n’ont aucune
communication les unes avec les autres : chacune de ces bourfes a une
ouverture en dehors & deux en dedans. L’eau entre par la première, &
fort
1) De Alim. Claiî! IIÏ.
c ) Penn. B. Z. III. p. 77.
d) Au iie cité.
fort par les deux autres ou par la bouche; & lorfque le poiffon eft attaché
par la bouche, elle fort par le trou de la nuque. Parmi les organes de la
refpiration, on voit un fort diaphragme ; & fous ce: vifcère, j’ai apperçu
contre mon attente, dans la cavité du ventre, le coeur, 'dont foute la
conformation eft tout-à-fait extraordinaire. L’oreillete étoit groffe &
communiquoit au coeur par un canal placé dans le milieu. La veine cave
fortoit de la partie la plus large du coeur. Le péricarde étoit épais', fort
& cartilagineux. La conformation de l’ovaire eft auffi remarquable. Dans
le poiffon que j ’examinai, qui avoit trois pieds & trois quarts de long,
l’ovaire tenoit prefque la cavité du ventre, & çonfiftoit en petits difques
ou plaques très-minces, qui étaient attachées en arrière le long de l’épine
du dos; à un vaiffeau Comme à un lacet. Depuis le commencement du
foie jufqu’à la moitié du ventre, il étoit fitué devant le canal inteftinal;
mais la partie inférieure étoit courte par la dernière,- qui avançoit en
ferpentant. L’ouverture de l’ovaire fe trouvoit au nombril au-deffous de
l’anus. Elle étoit cylindrique & faillante. Il pefoit deux onces trois quarts.
Les oeufs étaient couleur d’orange & de la groffeur des grains de pavot;'
mais quand ils furent fecs, fis étoient fi petits, qu’ü me fut impoffible de les
compter. Les reins n’étaient pas non plus comme dans les autres poiffons ;
ils ne commencoient quau milieu; & au lieu de fe terminer à la veffie de.
1 urine, ils aboutiffoient à deux canaux qui aboutiffent au boyau culier.
On nomme ce poiffon :
Lamprete, en Allemagne. Lamprey & Lamprey-Eel, enAn-
Zee-Lamprey, en Hollande. gleterre.
Lamprea, en Efpagne. Mujlilla, dans l’île de Malthe.
Lamproie f en France. Lampreda, eh Italie»
Les caractères que Linné donne à la lamproie font trop généraux; car
les deux autres efpèces de lamproies ont auffi la nageoire dorfale féparée,
& la bouche de la même forme. Ceft à' tort auffi qu’il donne aux dents le
nom de verrue, puifque ce font des fubftances offeufeS.
L’auteur du Cours d’ kijloire naturelle dit que l’on cherche envain dans
la lamproie les organes de l’ouïe d); mais; l’expérience m’a convaincu du
contraire. Quand Mr. de la Condamnine raconté que la lamproie du fleuve
des Amazones e) a une vertu éleétrique, il me femble qu’il l’a confondue
avec l’anguille tremblante.
d) Tom. V. p. 184- .. . e) I.e livre cité. p.'lS7>
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