
qu’on doit attribuer l’babitude qu’ils ont de manger leur queue, et non
pas à leur goût pour la chair.: ils sont frugivores. Ceux à qui l’on a vu
quelquefois manger de la viande et du poisson étaient captifs depuis le
jeune âge; ils étaient flétris par l’esclavage, c’est-à-dire, qu’ils avoient
perdu la faculté de choisir leur nourriture, et contracté l’babitude de dévorer
tout ce qu’on vouloit bien leur donner. J’ai vu cependant un Sapajou
qui s’écbappoit souvent, alloit sur les toits et y attrapoit des oiseaux
qu’il mangeoit.
C’est à cet animal que Buffon rapporte ce que dit Kolbc des singes du
Cap de Bonne-Espérance. Ce voyageur nous apprend (1) que les Papions
nuisent beaucoup aux colons du Cap en pillant leurs jardins. Ces singes se
rassemblent souvent en grandes troupes, forment une chaîne qui s’étend
depuis le verger jusqu’à la montagne voisine, et tandis que ceux qui sont
dans l’enclos cueillent les fruits, ceux de la chaîne se les passent de l’un
à l’autre jusqu’au lieu du rendez-vous. Pour éviter la vengeance du propriétaire
, ils ont soin de placer des sentinelles qui, au moindre bruit
jettent un cri d’avertissement, alors tout fuit, tout disparaît; mais souvent
il en coûte la vie à quelques-uns des pillards : on prétend que dans
ce cas les sentinelles sont mises à mort par la troupe. C’est ainsi que les
colons expliquent les heurlemens qui se font entendre lorsque ces singes
poursuivis sont réunis sur la montagne : en effet, disent-ils, si l’on va sur
le lieu d’où partent ces cris affreux, on y trouve les cadavres sanglans de
plusieurs singes déchirés en mille pièces. On pourroit peut-être expliquer
mieux ce fait, en comparant ces singes pillards à nos voleurs, qui, après
avoir détroussé les voyageurs, se disputent leurs dépouilles. Cette habitude
de piller les jardins appartient à la plupart des espèces de singes.
Kolbe, qui nous donne tous ces détails, a figuré le Papion avec une
queue courte et tronquée ; ce qui ferait croire qu’il n’a vu que des individus
captifs; à moins que le singe dont parle cet auteur, et qu’on nomme
Bavian au Cap, ne soit pas de l’espèce de notre Papion. Une personne qui
a voyagé dans cette partie de l’Afrique, m’a assuré qu’en effet on trouve
dans les bois de ces Bavians dont la queue est fort courte, et qui paraissent
d une autre espèce, biais comment se fait-il qu’un animal aussi commun
que l’est ce Bavian, ne se trouve point dans les cabinets d’Europe ;
s il était en effet d’une espèce différente du Papion, on n’eût pas manqué
de 1 apporter. Quoiqu’il en soit, il est certain que la nature a donné au
Papion une queue tres-longue ; il y a au Muséum François deux grands
squelettes de cette espèce de singes dont la queue est composée de trente
vertèbres, et l’on voit souvent dans ces ménageries que l’on promène de
(i) Voyage au Cap de Bonne-Espérance , par Kolbe.