
couche, au lieu où elle a pu être exactement mesurée
, avoir l ’épaisseur de vingt-cinq pieds huit
pouces et demi.
i° . D ’une couche de sable quartzeux, friable,
dont les particules n’ont point d’adhérence, de
couleur ocreuse-jaunâtre, souvent très-vive et très-
foncée, et profonde de vingt-trois pieds six pouces
et demi.-
3°. D ’une couche de sable pareil au précédent,
mais plus compacte, d’un gris-verdâtre, et comme
lié par un ciment calcaire qui lui donneroit la faculté
de se laisser tailler en blocs fragiles 3 ce sable
nous a paru avoir une odeur particulière assez désagréable
3 il repose immédiatement sur la partie
solide qui s’étend à des profondeurs inconnues, et
dans laquelle ont été creusées les carrières célèbres
de Maastricht. Cette troisième couche n’a guère
que dix pieds. La surface est formée par la continuité
de ces trois couches 3 mais celles-ci varient
dans leur épaisseur : il esc des endroits où la partie
solide esc bien plus rapprochée de l’extérieur du
sol, et celui-ci, demeurant, toujours à peu près de
niveau, il est clair que la surface de la masse compacte
inférieure n’est pas tout-à-faic horizontale,
et doit être légèrement ondulée 3 quoi qu’il en
soit, cette masse compacte est celle qui mérite l'attention
du géologue. On. voit que si la hauteur totale
du plateau est de cent quatre-vingts pieds, en
faisant la déduction de cinquante-six pieds d’épaisseur
totale pour les trois couches qui la recouvrent,
il reste pour elle, jusqu’au niveau de la Meuse,
cent vingt-quatre pieds au moins de puissance.
La matière dont se compose l’énorme épaisseur
dont il vient d’être question, est vulgairement connue
sous le nom de pierre de Maastricht _, ou pierre
de sable. Elle ne nous a point paru un grès quartzeux
, comme l’appelle M. de Thury, ni une espèce
de grès très-rendre, comme le pense Faujas 3
ce seroit trop étendre la signification du mot grès 3
que de l’appliquer à un aggrégat de parties quart-
zeuses et de débris calcaires liés par un ciment marneux
: nous y reconnaissons plutôt, avec M. Clerc,
« un amas calcaire grossier, dont la contexture in-
» térieure » seulement assez semblable à celle du
». grès, paroîtroit indiquer qu’il doit son existence
». à une agglomération mécanique de petites grai-
» nés calcaires, provenant sans doute de la des-
»► truction d’un calcaire plus ancien. »
Le tuf calcaire des environs de Maastricht se
façonne, au moyen de la scie, en pierres de forme
à peu près constante et en carrés longs : ces pierres
sont de temps immémorial employées à construire
des maisons et des édifices, que les accidens nié- j
téoriques ne tardent point à altérer 3 elles conviennent,
dit-on, mieux pour des fondemens que pour
des murs exposés aux intempéries de l’atmosphère.
Sur les tours des églises de Maëstricht, qui en sont
bâties 3 sur la tour, qu’on appelle encore Tour de
Césary et qui fait partie de la cense de Licthten-
berg, on voit des traces du ravage des ans, qui
ne prouvent point en faveur de la bonté des matériaux.
Les débris aréniformes qui résultent de la
taille de ces pierres sont employés comme engrais
dans les champs, et souvent on ne creuse le tuf
que pour en obtenir l’espèce de sable dont l’agriculture
tire un grand parti 3 et c’est plus â l’agriculture
qu’à l’architecture qu’est peut-être due l’immensité
des souterrains où nous conduirons bientôt
le lecteur.
On se feroit une très-fausse idée de la majesté
des belles galeries souterraines du plateau de Saint-
Pierre, si l’on s’en rapportoit à la figure qu’en a
donnée Faujas, dont le dessin fut probablement
composé de mémoire, ou d’après quelque site de
carrières qui se prolongent sous une partie de Paris,
carrières dans lesquelles nous nous rappelons avoir
vu, en certains endroits, des arcades dans le genre
de celles qu’a figurées le savant professeur du Muséum.
Dans aucune des parties où nous avons pénétré,
au fond des souterrains des bords de la Meuse,
nous n’avons vu de ces piliers grêles, à six ou huit
pans, s’élevant en forme gothique pour soutenir
des voûtes cintrées, qui ressembleroient bien plus
à celles de la mosquée de Cordoue qu’à la réalité 3
piliers d’une hauteur exagérée, et q u i, représentés
dans un ouvrage de la nature de celui de Faujas,
prouvent, en dépit de la richesse du burin, que
toutes les parties n’en ont pas été également soignées.
Dans la coupe arbitraire dont nous donnerons
la figure (voy. PI. 2.8 , n°. 1 ) , nous avons lâché de
rendre la forme de ces galeries, jusqu’à présent
mal figurées : celles-ci s’étendent toujours en angle
droit, et dans diverses directions, entre de solides
massifs, quelquefois cubiques, dont les dimensions
sont à peu près égales à de grandes distances. En
couvrant une table de marbre de dés, posés deux
à deux l’un sur l’autre, ou par des cubes de quatre
en quatre, à la distance de l’épaisseur de l’un de
ces mêmes dés, et dans un même alignement ; en
chargeant ensuite ces dés, figurant des piliers, d’une
autre plaque de marbre qui figureroit des voûtes
plates, on obtiendroit un plan assez exact des souterrains
si mal rendus dans le magnifique ouvrage
de Faujas.
On peut pénétrer dans les cryptes par un assc.*
grand nombre d’entrées 3 la plus remarquable, |
marquée A dans notre carte, est celle que Faujas i
a minutieusement décrite. Il a joint, à ce qu’il en
dit deux vues, dont l’une, assez médiocre, et
que nous avons dessinée de nouveau (PI. 2.8, n°. 3),
est prise de dehors 3 l’autre, de quelque point choisi
à cinquante pas environ dans son enfoncement. Cette
entrée a un peu plus de quarante pieds de hauteur
sur une largeur de cinquante. On l’aperçoit à une
grande distance par la route de Tongres} et, vue
de loin ou de près, elle offre un aspect singulièrement
imposant et pittoresque. Pratiquée comme
une immense arcade dans les flancs d un amas de
rochers calcaires, elle correspond snuterrainement
à ce qu’on peut appeler le glacis méridional du
fort Saint-Pierre marqué X . Tout, dans son ensemble,
retrace, mais en grand, la forme des
entrées ordinaires, et nous n’y avons rien aperçu
qui ait pu déterminer M. Faujas à prononcer
que cette caverne ne fut point l’ouvrage des
générations passées, et à dire que « la prin-
» cipale grotte est l’ouvrage de la Nature.
» Notre intention , ajoure - 1 - il , n’est pas de
» rechercher si cette profonde cavité, est due à
» un courant de mer, dont les efforts et la
» rapidité se sont fait jour à travers des sables
» mouvans qui leur ont opposé moins de résistance
» que les masses environnantes, ou à d’autres eau
» ses dont la discussion mènerait trop loin j et
» tout annonce que cette première caverne n’a ja-
» mais été ouverte par la main de l’homme. »
Pourquoi chercher dans une révolution du Globe,
dans un courant dont la marche eût été contraire à
celle de tous les courans qu’on voit aujourd’hui,
et dans une cause physique improbable, la formation
d’une grotte qui n’a de remarquable que ses
proportions, et de l’origine de laquelle le moindre
carrier de Maëstricht et la plus ’mesquine des entrées
qu’on voit sur les flancs du plateau de Saint-
Pierre rendent chaque jour complètement raison ?
Vouloir tout attribuer à l’homme est une erreur
considérable, et personne n’est aujourd’hui de l’avis
de ceux qui virent, dans les plus vastes bancs
calcaires, des valves d’huîtres rejetées par les écail-
lères romaines, des monumens laissés par les pèlerins
de Compostelle, un délassement de singes
qui transportoient les coquilles du rivage sur les
montagnes 3 enfin , les poissons gâtés rejetés de
l’office d’un Lucullus. Mais vouloir expliquer, par
des raisons physiques, ce qui ne peut être l’ouvrage
de la Nature, me paroît une façon non moins erronée
de donner du merveilleux à ce qui n’en
sauroit présenter. La grande caverne de Maëstricht
n’est qifune entrée ordinaire , que des
paysans du voisinage ont élargie pour en faire
leur habitation, probablement quand l’exploitation
dont elle étoit l’issue fut abandonnée et
transférée un peu plus vers le sud. On y distingue
encore les traces d’une écurie, une aire
creusée dans le sol pour battre le grain, remplacement
de la maison rustique.pratiquée dans le rocher
, marquée B dans notre dessin, et dont la
façade en maçonnerie se voyoit au temps du voyage
de Faujas. Celui-ci raconte, au sujet de la grande
entrée dont il est question , une anecdote digne
d’être conservée.
Pendant le siège qui fit tomber Maëstricht au
pouvoir des Français, en 1794, des chasseurs
de l’armée assiégeante vinrent, s’y établir. Les Autrichiens
occupoient au-dessus d’eux le fort Saint-
Pierre , e t , malheureux dans les sorties qu’ils ten-
toient sur l’aire supérieure , ils imaginèrent de
descendre par l'escalier intérieur du fort dans les
galeries souterraines, espérant chasser leurs ennemis
cantonnés à l’entrée de ces mêmes galeries 3
mais la lueur des flambeaux qui guidoient leux
marche silencieuse à travers l’obscurité ayant
trahi leurs projets, les chasseurs français se dirigèrent
à pas de loup sur ces flambeaux, e t ,
surprenant ceux qui croyoient les surprendre , les
accablant d’un feu vivement nourri, ils dispersèrent
, dans les profondeurs du labyrinthe, tout ce
qui ne tomba pas sous le plomb meurtrier, ou ne
demeura point prisonnier de guerre. Cet événement
a servi de leçon aux ingénieurs, qui depuis
ont amélioré les défenses du fort Saint-Pierre. Une
partie de l’orificede la grande entrée a été fermée
par un mur percé de meurtrières ( A , n°. 1 , Pj. 28 )
qui ne permettoient plus, à quelque détachement
que ce fut, de s’introduire sous des ouvrages qu’il
eût été si aisé de détruire au moyen de puissantes
mines dont les galeries se trouvoient praticables,
et toutes creusées, avant que les derniers affaisse-
mens n’eussent comblé leurs communications avec
les souterrains du fort.
« A une très-petite distance de la grande grotre,
dit encore Faujas, il en existe une beaucoup moins
élevée et néanmoins très - profonde. » C ’esc par
celle-ci que le professeur du Muséum d’histoire naturelle
de Paris pénétra dans l’intérieur du plateau
de Saint-Pierre 3 il ne dit point par où il en sortit,
et si, après y avoir voyagé, il revint sur ses pas. Nous
présumons que c’est par cette entrée que nous entrevîmes
une foible lueur au terme de l’excursion
que nous fîmes dans les cryptes en 1 8 16 : elle est
marquée de la lettre B dans notre carte, où l’on