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on peut compter vingt mille hommes qui.fervent à.cette pêche. Et tout
cela fans compter l’avantage confidérable que . les Anglois tirent de cette
pêche fur leurs propres côtes.
Tel étoit à peu près en Amérique l’état de la pêche avant la rupture
des colonies. Mais comme, celles-ci font actuellement un état à paît;
qu’elles ont non feulement la liberté de pêcher fur les bancs de Terre-Neuve,
& qu’on a auffi cédé à cette fin aux François une contrée dans l’Amérique
feptentrionale, cette branche de commerce ne doit plus tant rapporter
aux Anglois. Les Américains y. gagnent beaucoup; car la feule ville de
Bofton prend annuellement dans le golfe de Maffachufet 50,000 quintaux
.de Ces poilfons
La pêche de Terre-Neuve eft auffi t r è s -avantageufe aux François. En
1768, ils y envoyèrent 114 vaiffeaux,- qui portent en tout 15590 tonnés.
Chaque vaiffeau contenoit l’un portant l’autre 6000 poilfons; de forte que
toute la pêche montait à. 24 millions & 66000 poilfons, ou 192,5*8
quintaux. Or en comptant que le quintal fe vend en France au prix moyen
de 16 liv. 9 fous & 9 deniers, le tout, monta à 3.1 ?4-.3°.ï liv* 8 fous. Si
ces poilfons fournilfent outre cela 1925. tonneaux d’huile, le tonneau
compté, à 120 liv.; cela, monte à 231,000 liv. Et comme outre cela, les
François pèchent fur les côtes d’Islande & dans la Manche, on peutijuger
le profit que ce poilfon procure à ce royaume. Cependant cette: grande
quantité nefuffit pas pour les François dans le carême; car les Hollandois
leur en vendent encore confidérablement.
Selon Anderfon, c’eft en 1536 que les François envoyèrent le premier
vaiffeau à la pèche de Terre-Neuve; & en 1578, ils y en envoyèrent
déjà un très-grand nombre. Il s’en trouva cent de l’Efpagne qui portaient
enfemble cinq à' fix mille tonnes; du Portugal: cinquante a-trois mille
tonnes* de la France, cent cinquante à fept mille tonnes, dr de 1 Angleterre
trènte à cinquante tonnes. Mais lorfque les Anglois fe furent de plus en
plus étendu dans les provinces feptentrionales du Nouveau-Monde, ils
détournèrent, infenfiblement les autres nations de cette-.pêche, & ils firent
tant que les Efpagnols même, qui ne.fauroient fe paffer de c,e poiffon, à
caufe de la grande quantité de monaftères qui font dans le royaume, fe
virent obligés de renoncer eux-mêmes au droit de la pêche.. Ils 11e la
permirent qu’aux François feuls; mais comme ils avoient peu de place
pour faire fécher . leurs poilfons fur terre, ils fe virent obligés, pour les
garantir de la corruption, d’y mettre une fois autant de fel que les
Anglois;
d) Voyage dans l’Amérique, en 178 ï.
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Anglois; ce qui les a rendus moins bons. Les Anglois au contraire, font
tremper pendant quelque tëms leurs poilfons dans une forte faumure, &
les mettent enfuite à terre pour les faire fécher à l’air; de forte qu’avec
moitié moins de fel, ils fe gardent bien mieux que ceux des François.
On s’étonne avec raifon de:: Ji prodigieufe quantité de morues, qui
depuis plufieurs fiêcles ont été prifes par les hommès. Celle qui eft
dévorée par les poilfons voraces & par les morues elles-mêmes, eft
affurément auffi grande, & peut-être plus grande encore. Selon Horebow,
les Tslandois trouvèrent dans l’eftomac d’une baleine fix cents morues
vivantes, fans compter les autres animaux d). Mais fi nous confidérons la
quantité d’oeufs que le Créateur a donnée à cette efpèce, nous ne devons
pas craindre de la voir détruire, tant qu’on fe bornera à la pêche à
l’hameçon. Leuenkoek fait monter à 9,344,000 le nombre des oeufs d’une
morue moyenne ¿) : Brandley n’en compte que quatre millidns c); mais
cette quandté eft bien fuffifante pour réparer ce que la pêche enlève, fi
l’on confidère la grande quantité de poilfons qui frayent tous les ans.
La morue n’a pas~ia..vie dure ; elle meurt dès qu’elle fort de l’eau
falée, ou qu’on la fait paffer dans une eau douce. Comme elle eft d’un
bien meilleur goût-quand on la mange fraîche, les pêcheurs Hollandois
tâchent, par le moyen de vaiffeaux troués, de la mener èn vie dans les
grandes villes maritimes.! Les matelots Anglois favent percer avec une
épingle là véficule aérienne ; cé qui oblige lé poiffon à fe tenir dans le
fond du vaiffeau troué, & lui conferve la vie plus-longtérfts d).
Ce poiffon eft connu fous différens noms. On le nomme;
Kabeljau, en Allemagne & en.. • Saraudlirkfoak & Ekalluarkfoak,
Dannemaïc;! ^ , en Groenlande.
Stockfifch, quând il eft féché; Vaar- Torsk, Skrey, en Laponie.
Laberdan, quand il eft falé; Kabbeljâ, en Suèdë.
Klippfifch, quand il eft falé & Cabiljau, en Hollande,
féché. ^ Cabillaud, Bacaillbu, en Flandre.
Klubbe-Torsk & Bolch, Cabliau, Codjhh} Keeling, Melwd, Stok-
Skrey, Sild-Torsk, Vaar-Torsk, en fish, Haberdine, Greenfish & Barrd-
Norvège. Cod, en Angleterre.
Torskur & Kablau, én Islande. Morue ou Molue, en France.
L’eftomac de la morue eft grand, & il y a au commencement du canal
inteftinal fix appendices qui fe divifent en plufieurs branches. Le foie eft
û) Nachricht von Isl. p. a i 5.
b) Linn. Syft. Nat. p. 437. n. 3.
Part. II.
c ) Entwurf einer cekonom. Zoolog, p. 123.
d) Penn. B. Z. p. 176.
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