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très-souvent occasion de les voir. Ces oiseaux, d'un naturel trèsdoux,
et fort caressans, venoient se reposer sur la main de tous ceux
qui la leur présentoient. Ils se caressoient aussi beaucoup réciproquement,
et leur manière étoit de frotter leurs becs l'un contre l'autre;
le mâle donnoit des baisers fréquens à la femelle, en introduisant sa
langue dans le bec de celle-ci. Enfui, l'attachement que se montraient
ces deux individus, leurs tendres caresses, et de petites attentions
marquées, les conduisirent peu à peu à des démonstrations
non équivoques. Le mâle cocha sa femelle à diverses reprises et
pendant plusieurs jours ; ce qui fit espérer qu'elle deviendrait prolifique.
Elle pondit, en effet, un oeuf sur le plancher de la volière;
mais il y fut cassé. On mit alors nos deux oiseaux seuls dans un
endroit plus retiré; car il y avoit dans cette volière, entre plusieurs
autres Perroquets, des Loris, dont les moeurs sauvages et les cris
discordans contrastoient avec ceux de ces deux jolies Perruches. Aux
approches de sa seconde ponte, la femelle s'arracha une partie des
plumes du ventre, les entassa dans un coin de la grande case où on
les avoit logés, et pondit enfin sur ce lit deux oeufs presque ronds et
entièrement blancs. Elle couva très-assidûment, sans que le mâle prit
aucune part à cette fonction ; il étoit seulement attentif à apporter à
sa femelle des alimens, qu'il lui dégorgeoit dans le bec. Les petits
naquirent au bout de dix-neuf jours d'incubation, et se couvrirent,
au bout de quelques autres, d'un duvet cotonneux gris cendré,
qui fut remplacé peu à peu par des plumes vertes sur le corps, et
bleues sur la tête, telles, en un mot, que je les ai dépeintes pour
le premier âge. Ils sortirent du nid au bout de trois semaines, et
se juchèrent sur les bâtons, où le père et la mère, indistinctement,
leur apportoient de la nourriture, qu'ils leur dégorgeoient dans le bec,
comme font les pigeons à l'égard de leurs petits ; ils étoient même
déjà âgés de six mois qu'ils se laissoient encore donner la becquée.
Cela me rendit encore témoin d'une scène fort attendrissante entre
le mâle et la femelle. Celle-ci se trouvant entre ses petits et son
mâle, juchée sur le même bâton, le mâle, ne pouvant s'avancer jusqu'aux
petits, dégorgeoit la nourriture à la femelle, qui la passoit
ensuite aux petits; ces derniers étoient absolument semblables, quoique
de différent sexe. Cette ressemblance dura même jusqu'à la première
mue, à laquelle leur poitrine se revêtit de plumes rouges, bordées
de vert; et ce ne fut qu'alors qu'on remarqua entr'eux quelques
différences, car la tache bleue commençoit à poindre sur le ventre