grandeurs et du tumulte des sociétés bruyantes, chaque instant est
subordonné à des circonstances qu’on n a pu ni prévoir ni éviter ?
Nous avons vu que, pendant l’espèce de sieste que font ces Perroquets
dans le moment de la plus forte chaleur du jour, ils étoient
silencieux et ne Rougeoient pas, quoique dans tout autre ils fussent
très-bruyans et difficiles à approcher. Ceci n’a rien de surprenant:
il en est ainsi non - seulement de tous les oiseaux, tnais de tous les
ânimaux, dans tous les pays, même dans nos climats tempérés. Il
n’est pas chez nous un chasseur un peu expérimente qui ne sache
que l’heure où le soleil est le plus élevé est aussi celle qui est la plus
favorable pour surprendre le gibier, et qu alors il faut pour ainsi dire
mettre le pied sur les lièvres, les perdreaux et les cailles, pour les
faire partir 5 à ces heures l’animal le plus méfiant reste blotti, et le
rossignol cesse de chanter.
J’ai parlé des moyens de reconnoître les lieux qui servent d’abri aux
Perroquets ; voici maintenant les ruses que j ’ai employées pour me
procurer de différentes autres manières, et tout à mon aise, autant
de ces oiseaux que j ’en voulois : reconnoître les arbres morts où les
Perroquets se rassemblent j chose facile, car ces arbres sont tellement
blanchis par les crottes de ces oiseaux qu’on les croiroit peints
en blanc : se rendre long-temps avant les Perroquets suç les lieux
du rassemblement, s’y tenir bien caché et à portée d’un des arbres
reconnus 5 attendre qu’il soit bien chargé, et tirer dessus. Si 1 on con-
noît leur abreuvoir ou le lieu du bain, qu’on aille s y cacher et attendre
le moment de leur arrivée. Rester blotti aux environs d’un arbre chargé
des fruits qu’ils mangent, est encore un moyen facile de tuer quelques-
uns de ces oiseaux, mais qui est loin de valoir celui de l’affût sur les
lieux de rassemblemens du matin et du soir. Dans tous les cas il faut
charger son arme de gros plomb, car les Perroquets sont durs à tuer.
Ces oiseaux sont mangeables : les vieux, après avoir fait une excellentë
soupe, peuvent être fricassés; les jeunes sont bons de toute maniéré,
même rôtis. Leurs oeufs sont très-délicats et valent, à mon avis, ceux
de poules. Il ne nous reste plus qu’à décrire les couleurs de l’espèce
du Perroquet de cet article.
Sa taille est presque égale à celle du Jaco ou Perroquet cendré de
Guinée, et, en comparant ensemble ces deux oiseaux, on trouve entre
leurs formes des rapports étonnans ; ce qui seul prouveroit à des yeux
exercés qu’ils sont congénères, s’il pouvoit y avoir du doute sur le
pays natal de l’un ou de 1 autre. La tête, la face, le cou et la poitrine
du Perroquet à franges souci, sont d’une couleur fort équivoque,
tenant du gris, du brun, du vert et du jaune olive, telle en un mot
qu’il a été beaucoup plus facile au peintre de l’imiter qu’il ne nous
le seroit de la rendre par des mots : nOüs ne saurions donc donner
une plus juste idée de cette couleur, qu’en renvoyant le lecteur à
nos planches, où l’oiseau est représenté d’une manière frappante pour
la ressemblance. Le manteau et les couvertures des ailes sont d’uri
vert brunâtre, mais plus bruns au centre de chaque plume que sur
ses bords. Le sternum, les flancs, le ventre, les jambes, les couvertures
du dessous et du dessus de la queue, le croupion, sont d’un
vert-de-mer lustré, très - brillant. „ Toutes les petites couvertures dû
bord des ailes, dans l’endroit où celles-ci s’appliquent au corps lorsqu’elles
sont ployées, sont d’une belle couleur de fleur de souci,
couleur qui ceint aussi en forme de jarretière le bas de la jambe.
Les pennes des ailes et celles de la queue sont d’un brun noirâtre
ét frangées de vert. Le bec est blanc$ les pieds sont grisaille, et les
yeüx d’un brun rougeâtre.
Les mâles et les femelles de l’espèce de ce Perroquet ne diffèrent
qu’en ce que ceux-là ont un peu plus de taille, et les couleurs, celles
verte et souci surtout, un peu plus vives que ces dernières.
Les jeunes, encore couverts de leurs premières plumes, ont la tête,
le cou et la poitrine, d’un vert gris ; le manteau d’un vert moins brun
que celui des vieux : les plumes vertes du ventre, du croupion et des
jambes, portent toutes chez eux un trait brun dans leur milieu : leur
bec est d’un blanc jaunâtre.
Comme j ’avois apporté d’Afrique en Europe un certain nombre
d’individus de l’espèce de ce Perroquet, j ’ai eu la satisfaction de pouvoir
en distribuer plusieurs entre M. Temminck d’Amsterdam et
MM. Raye de Breukelervaert, Holthuysen et Boers : on en voit aussi
un au cabinet d’histoire naturelle au Jardin des plantes à Paris. Il y
avoit dans ce nombre deux individus variés, dont nous allons parler.
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