pays natal ; mais rien ne sauroit arrêter le zèle du naturaliste qui ne sc laisse point
influencer par lopinion vulgaire qu’une pareille étude est complètement inutile.
Les anciens ne pensoicnt pas ainsi; chez eux le passage des oiseaux ctoit
l’cludc des prêtres et la règle des travaux du laboureur et du jardinier. Dans
le Nouveau-Monde, aussi bien que dans l’ancien, on peut en tirer les mêmes
indices; la présence du moucherolle p e iv it en Pensylvanie indique qu’il ne
faut plus craindre les gelées, et qu’alors rien n’cmpcclic le cultivateur de livrer à la
terre toutes les semences printanières.
Les contrées du centre offrent, comme je l'ai déjà dit, les plus grandes facilités
pour la rcclierchc des oiseaux, car presque tous y séjournent dans une saison ou
dans une autre, et ils y nichent en grande partie ; mais il n’en est pas tout-à-fait de
même à la Caroline du sud, à la Géorgie cl aux Floridcs; beaucoup <\c fa u v e t te s
n’y font qu’un court séjour, et fort peu y restent pendant l’h iver, quoiqu’il y soit
trcs-Lempéré. On peut suivre en Amérique la migration des oiseaux aussi facilement
qu’en Europe , puisque le pays est habité dans toute rétcnduc qu’ils
parcourent; cependant les Voi^agcurs naturalistes ont négligé de les voir avec
un oeil observateur : beaucoup ont cru que leurs dépouilles étoient suffisantes
pour les bien connoître. Que de méprises sont provenues de cette façon de penser !
combien d’individus de même race dont on a fait des espèces distinctes, seulement
parce qu'ils avoicnt été apportés de pays éloignes les uns des autres ou d'un
climat opposé î combien ont été classés séparément à cause d’une légère différence
dans les couleurs I Des mâles ont été isoles de leurs femelles parce qu’ils
avoicnt un plumage dissemblable ; plusieurs ont donné lieu à de doubles et
triples emplois parce qu’ils portoicnt dans une saison viu habit différent de celui
qu’ils ont dans un autre. Que de mâles, de femelles, de jeunes iie seroient pas
dispersés dans les arrangcnens méthodiques! que d’alliances, que de variétés
n’existeroicnt pas, si l’auteur avoit été instruit de leur genre de vie ; si le voyageur
iivoit indiqué les traits caractéristiques des sexes et des âges ; s’il avoit signalé les
mâles dont le vêtement est en hiver â-pcu-près pareil â celai de la femelle, et qui
varie â l’époque des amours; s’il avoit dit que ceux-ci, sur-tout chez les espèces
voyageuses, ne portent point leur habit de noces dans tous les pays où ou lesü'ouvc
parce qu’ils n’y multiplient pas! En effet j’ai rencontré à Saint-Domingue des
oiseaux qui ne nichent que dans la V irginie, la Pensylvanie et le Canada : des naturalistes
ont vu â Torto-Ricco,â la Jamaïque, â Cuba, des espèces qui ne couvent que
dans les Carolines,et d’autres qu’à la baie d’H udson, et même encore plus au nord.
On ne peut donc observer avec trop d’attention les migrations des oiseaux, puisque
c’est un moyen sûr de perfectionner fOrnilhologic. Quoique je n’aye pas donné
à cc travail toute l’étendue dont il est susceptible, j’espère que l’on me saura grc
du peu que j’ai fait, s’il en sort une étincelle qui puisse jeter quelque lumière sur
cette partie de l’histoire naturelle, que l’immortel Bui'fon avoue être encore dans
les ténèbres.
Beaucoup d’oiseaux voyageurs changent de moeurs et d’habitudes en cliangeant
de climat. Les uns ne recherchent que les individus de leur espèce pour se rendre
dans le nord, et fuient leur société pendant leur séjour dans les pays chauds;
d’autres offrent un contraste parfait. Les pigeons à longue q u eu e , les commandeurs
se tiennent toujours eu bandes nombreuses et serrées, hors le temps des
amours ; diverses espèces de fa u v e t te s se réunissent pour revenir dans leur pays
natal, et en partent par petites bandes, composées seulement d’individus de la
même famille; c’est ainsi que voyagent les fa u v e t t e s couronnée, j a u n e ,
tache tée , et le viréon musicien. D’autres, tels que les fa u v e tte s brune et
bleuâtre le viréon verdâtre, les roitelets rubis et h u p p é , parlent et reviennent
seuls. Les ortolans de riz ne sc mêlent jamais avec d’autres espèces et
voyagent la nuit. Les hirondelles bleue, bicolor, rousse, de cheminée el à ventre
b la n c , arrivent du sud toutes ensemble , et ciiaque race part isolément. Les
haltimoreSj les carouges noirs, les troupiales bruantins voyagent par famille au
départ et au retour. Les moqueurs,\cs grives des bois e lle cat-bird., restent solitaires
toute l’année. Lcs^"ea/6’ bleus, les p ic s doré, ch ev e lu et minule voyagent
le matin en bandes éparses. fr in g ille s griveleés forment dans les deux passages
des petites troupes de cinq â six. Los gorge-rouges bleus sc plaisent en
famille, ou dans la société à.c,s,fringLlles à gorge blan che , des t iiis , des touits
et de divers ortolansj tous fout route dès le matin, sc dispersent dans la journée
et se rallient le soir. Lcs^nVe^ robins sc rassemblent eu troupes dans les lieux
où les baies sont en abondance, et s’isolent quand elles commencent à s’épuiser.
Îtcsjaseurs forment presque toute rannéc des liaudos nombreuses; mais ces derniers
cl les robins s’éloignent pou du centre des Etats-Unis ; leurs courses ne
peuvent être regardées comme des émigrations constantes. Les alouettes hausse-
co l noir eX, fa r lou sa ne .. 1<^“ ju v o b in d e montagne et les
fr in g ille s sizerins voyagent et se tiennent en troupes nombreuses pendant leur
séjour dans le sud. Lorsque tous ces oiseaux sont parvenus â leur retraite d’hiver
les uns sc dispersent et s’isolent, telles son t toutes les fa u v e t te s j d’autres restent
eu société ; c’cst ainsi qn’on rencontre â la Louisiane les pigeons à Longue queue ,
plusieurs troupiales, les stourriesj quelques-uns, comme les q u is ca ie s , vivent
toujours ensemble, même dans le temps des amours; les tyranspipiris reviennent
au printemps par petits détachcmcns de dix â douze, et partent isolément ; les
moucherolles, les siUelles sont presque en tout temps solitaires; enfin les irou-
piales commandeurs, les ortolans de riz forment des bandes, dont les unes
ne sont composées â leur retour que de mâles, et les autres de femelles ; mais les
mâles reviennent toujours les premiers dans leur pays natal. Tous ces émigrés
vont plus ou moins loin dans le sud ; des muscivorcs, plusieurs des
crabiers, le bec en cisea u x , etc. s’axaiicent jusqu’à la Giiiane ; beaucoup s’an ctcnt
a la Jamaïque, à Porlo-Ricco , à Saint-Domingue , à Cuba et au Mexique; la
fa uv ette tachetée, le milan noir et blanc, la cresserelle oesalon et le savana,
SI recUcmeutcc dernier passe la belle saison au Canada,seroient les oiseaux les plus
répandus dans cette partie du monde, puisqu’on les trouve sous les tropirjiies et
sous les zones australes et boréales ; le plus grand nombre des séminivores et des
jaccivorcs n outrepasse pas les Carolines, la Louisiane et la Floride; les grives
I OME I. A :