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imposée les Amcricains. Les Canadiens l’appellent Récollet, à cause de quelque similitude
entre sa huppe et le capuchon d’un moine; mais le premier nom lui convient
mieux, puisqu’il habite de préférence les forêts de cèdres, qu’il fait son nid sur cet
arbre, et vit de ses baies pendant une partie dc l’année. Ces baies ne sont pas les seules
dont il se nourrit; il mange aussi celles du diospyre , du smilax , du troène el du genévrier
; il les avale entières. Il déchire la puljje des cerises et de tous les Ifuiis tendres.
A défaut de ces alimens , il vit de mouches qu’il prend au vol avec autant d’adresse que
le Moucherolle , et de divers autres insectes (ju’il cherche sur les branches et sur les
feuilles. Les Jaseurs sont plus baccivores qu’enlomophages et d’un si grand appétit, qu’ils
dépouillent en peu de temps un arbre de toutes ses productions.
La société de leurs semblables semble êlre pour ces oiseaux un besoin naturel. En effet,
les petits sont à peine sortis du nid que toutes les familles du même canton el des environs
se réunissent et forment des troupes nombreuses qui ne cessent de voyager , ou plutôt
d’errer d’un pays à l’autre, pour y trouver une nourriture abondante et facile. Celte
espèce vagabonde est répandue en Améritjue depuis le Canada jusqu’au Mexique et
même encore au-delà de cette dernière conlrce, car on a rencontré à Caïenne des individus
qui sans doute s’étoient égarés. Les Jaseui's du cèdre ne nichent point dans tous les
pays qu’ils fréquemcTvi ; on ne les voit à la Caroline du Sud qu’en hiver; ils restent presque
toute l’année dans le New-Yorck, ei »c x..x>^cvent tous les mois pendant quelques jours
dans la Pensylvanie, tantôt en très-grande bande, tantôt par petites u-oupca. D’après
cette vie presque toujours errante, il est dilffcilc <rindi(|ucr la contrée et l'époque où
ils nichent, si on ne les a pas suivis dans la saison de leurs amours. Ils cachent leur nid
très-soigneusement et se montrent peu pendant l’été. Us vivent alors solitaires et
paroissent d’autant plus rares qu’on les a toujours vus en tout autre temps par volées
innombrables. Ce n’est qu’au mois de mai qu’ils sentent le besoin de transmettre
l’existence à une nouvelle génération. Les mâles se disputent alors les femelles avec
un acharnement étonnant dans des volatiles d’un caractère doux et tranquille. Ce
choix fait, chacun s’isole avec sa compagne dans l’iniérieur des forêts, et lui donne des
maixjues de son affection en la nourrissant quand elle couve et eu partageant avec elle
les soins de l’incubation ; deux pontes annuelles sont les fruits dc leur union : ils en ibiit
une au mois de juin et l’autre au mois d’aoùt.
Ces oiseaux se laissent approcher de très-près et ne s’épouvantent point du bruit de
l’arme à feu. Ceux que le plomb meurtrier n’a pas atteints au premier coup de fusil, se
de couleurs ni môme de nuance en cliangcani de conirces. II est constamment le même dans les régions fro id es, tempérées
e t chaudes. S i, comme le dit Mouibeillard, il est du l’espèce européenne , qu’on doit uaturellenient s’attendre à retrouver en
Amérique , puisqu’elle passe l’e'tc dans les pays les plus septentrionaux de notre coniiucni ; qui peut être la cause des dissemblances
indiquées ci-dessus ? C e rte s , ce n e peut être le climat ni la n o u rritu re , puisque le Jaseur d ’Amérique utche sous les
mêmes latitudes e t vit des mêmes atmieus que celui d ’Europe. Ou ue p eu t pas le regarder comme une variété ; car ce m o t,
auquel Buffon et d'autres auteurs ont donne une trop grande extension , en faisaut des variétés de race , d ’espèce et de climat,
lesquelles ne provienneiu souvent que de descriptions b com p lcies et de figures in ex ac tes , ne peut s'appliquer, selon ma
façon de v o ir, qu’à des oiseaux de ia môme e sp è c e , chez lesquels on remarque des différences individueilcs el aceideiuelles
qui disparoissent avec les individus e t ne se transmettent pas des pères et mères aux petits. Ces disparités passagères consistent
ordinairement dans les teintes du plumage et quelquefois dans les proportions. Par exemple, uu Moineau noir ou LIauc, plus ou
moins tacheté de l’une de ces deux couleurs, e slu u e variété daus sou e sp èc e; mais si ce Moineau s’accouple avec uu autre portant
le même vêlement ou à-peu prés ; qu'il résulte dc celle alliauce des petits pareils au père et à la mère , e l que leurs descendans
ne reprennent pas le plumage de l'esp è ce , ceux-ci ne seront point des variétés et formeront une race r
que j’ai vu des Perdrix totalement hlauches , qui ont cessé toute comnmuication avec les Perdrix grises il’<
origine e t qui ne s'nllioieut qu’entre elles , quoique les unes e t les autres véc
y a encore des variétés occasionnées par la grande vieillesse , époque o
ivellc. C’est a
i elles liroieni leur
s des oiseaux jcnnes
ussent dans le meme canton
. . . à les couleurs s’éteigueni ; ^........ .
II adultes donnés comme variétés de leur espèce , d'après quelques différences occasionnées par la jeunesse et par la saison des
amours , ne peuvent êlre considérés a in s i, lorsque leurs couleurs sont communes à lous les individus du même âge et du
mên.v sexe. Quant aux variétés d'e.spèccs , dénommaiion appliquée à un grand nombre d ’oiseaux é trangers, rapprochés les uns
des autres ou des oiseaux d ’Europe , elles dispavoîtroni au /lambeau de l’observation. Ou ne trouve que trop souvent ces
rapprochemens dans l'histoire des Oiseaux de Buffon ; mais ce profond naturaliste les eût certaioemem reje té s, s’il eût connu
ces prétendues variétés dans l’étal dc ualuve.
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