froidit, on voit les mouvements devenir plus lents, plus rares,
et enfin disparaître tout-à-fait, quand la température est descendue
à douze ou quinze degrés du thermomètre dg Réaumur. Le corps
alors devient raide, immobile; il est pris d’un véritable engourdissement
(i), qu’il ne faut pas confondre avec l’état de mort:
les mouvements, en effet, peuvent reparaître vingt-quatre heures
après que l’animal est resté raide et immobile, si l’on vient à porter
de nouveau la température du liquide à trente ou trente-deux
degrés (2).
Quand les lombrics cessent de se mouvoir dans l’eau tiède, on
peut faire reparaître leurs mouvements, en ayant recours aux divers
moyens d’irritation, comme aux incisions , aux piqûres, et
surtout à l’action du fluide galvanique. J’ai observé cette persistance
de l’irritabilité sur des lombrics , qui, depuis trente-.six
heures, étaient dans un état de mort apparente (3). ...
(1) L’élasticité que présente le lombric n’est, suivant M. Laënnec, « que la
» raideur qui se développe dans les cadavres de tous les animaux après la mort. »
(Dictionnaire des sciences médicales, t. I l , p. 33g. ) Je ne puis admettre, sans
restriction^^’opinion de ce savant anatomiste, pareeque les mouvements du
lombric peuvent renaître lorsque ce ver est resté raide «Jmmobile, élastique
pendant plusieurs heures, ainsi que je l’ai expérimenté.
(2) Si l’on élève la température de l’eau à trente-huit ou quarante degrés,
l’animal s’agite d’abord avec force et rapidité; mais bientôt après les mouvements
cessent, et le corps, au lieu de se raidir, devient flasque ; si ensuite on abaisse la
température de quelques degrés, les mouvements ne se rétablissent qu’avec
beaucoup de peine et fort imparfaitement, ou même ne reparaissent pas du tout.
(3) Lorsqu’on a ouvert dans toute sa longueur un lombric vivant, et qu’on
en a extrait les organes génitaux et le canal intestinal, l’enveloppe musculo-
cutanée se raccourcit considérablement en se fronçant et en se roulant en spirale.
Les mouvements persistent également pendant plusieurs heures, si on a soin de
tenir le .ver plongé dans l’eau tiède.
Exposées à l’action de l’air, lés fibres musculaires se dessèchent
et deviennent friables ; les acides affaiblis, l’alcool, et surtout la
dissolution de sublimé corrosif, les rendent opaques, blanches,
plus résistantes qu’auparavant.
Les muscles du lombric forment deux couches superposées, et
distinctes par leur situation, leur épaisseur- et la direction de leurs
fibres.
La première est très mince et formée de fibres transversales
ou circulaires (1) ; la seconde est plus épaisse que la précédente :
ses fibres affectent une direction longitudinale. (PL III, fig, i3,
b , c. )
Les fibres circulaires se rencontrent immédiatement au-dessous
de la peau, à laquelle elles adhèrent d’une manière intime.
Elles font le tour entier du corps, et représentent une multitude
d’anneaux aplatis , serrés les uns contre les autres, et dont le
diamètre diminue à mesure qu’on les examine vers les extrémités.
Ces fibres annulaires sont logées dans des espèces de cannelures 1
(1) La ténuité des fibres charnues circulaires est si grande, que ce n’est
qu’avec beaucoup de peine et de patience qu’on peut constater leur existence. Pour
les rendre plus apparentes, il faut laisser macérer un lombric pendant trois ou
quatre jours dans de l ’eau à douze ou quinze degrés de température; on le plonge
ensuite pendant quelques heures dans une dissolution concentrée de sublimé corrosif
; on le retire et on injecte de l’encre par une ouverture faite à l’abdomen ,
après quoi on peut en faire la dissection. Par ce procédé, les couches musculaires
sont devenues opaques, légèrement colorées en gris, et faciles à isoler. La peau
a conservé sa transparence. J’ai aussi employé avec avantage, et dans le même
but, une dissolution de nitrate d’argent, dans laquelle j’ai laissé tremper des
lombrics pendant une heure. En exposant ensuite ces vers à l’action de l’air et
de la lumière, la peau devient noire ou d’un brun foncé, et se sépare facilement
des fibres circulaires^ enfin, la dessiccation peut encore servir à démontrer la
disposition de ces muscles.