sur divers points les forces qu’il pouvoit lui opposer. Il faut ajouter
que l’on ne cessa point, dans le cours de cette guerre, d’offrir aux
Français leur retour dans leur patrie, à ces memes conditions qu ils
avoient acceptées long-temps auparavant, et qu on avoit refuse de
remplir.
Le général Menou, informé de l’ouverture des négociations en
Europe, et des tentatives réitérées que faisoit notre flotte pour
lui apporter des secours, s’étoit efforcé de prolonger la défense
d’Alexandrie, et s’étoit soutenu dans cette place jusqu’à la plus
extrême nécessité. Sur la fin du siégé, la moitié des Français lan-
gùissoit dans les hôpitaux ; ceux même que les maux épidémiques
n’avoient pas encore atteints, étoient exténués par des travaux excessifs,
par l’usage des eaux saumâtres, l’effet prolongé des alimens nuisibles,
ou le défaut de nourriture. Animés par les exemples des
chefs, ils supportoient avec persévérance la rigueur de leur situation
: mais il ne leur restoit que le courage; on les voyoit abattus et
épuisés, pouvant à peine soutenir le poids de leurs armes, et ils ne
réprenoient leurs forces qu’aussitôt que le devoir les appeloit au
combat. Ils étoient destinés à honorer par leurs derniers efforts le
terme de cette expédition mémorable.
D ans le même temps que notre armée se préparoit à quitter les
ports de l’Egypte, et que l’on ignoroit en Europe les dernières
opérations-des alliés, on signoit à Paris et à Londres les articles des
traités qui rendoient ce pays à la Porte. La lumière des arts y avoit
brillé quelques instans; mais il devoit encore devenir la proie de
la barbarie dont les armes Françaises l’avoient délivré. Il .est abandonné
aujourd’hui aux concussions des vice-rois , au brigandage des
Arabes ou des milices indisciplinées, et aux violences de quelques
beys qui ont survécu. Ces étrangers., -quoique réduits à un petit
nombre, ont recouvré une partie de leur autorité,: les .esclaves de
Mourad et d’Ibrahim ont succédé à .leurs maîtres. Ce gouvernement
bizarre a du moins été interrompu pendant trois années,,
par le séjour des Français. Ils ont vaincu et exilé les Mamlouks,
réprimé les Arabes, anéanti trois armées Ottomanes, en Palestine,
à Aboutir, et aux portes de la capitale ; et, ce qui n’est pas moins
digne de mémoire, ils n’ont exercé qu’une autorité protectrice dans
la contrée qu’ils avoient soumise, et chacun d’eux sembloit s’élever
jusqu’aux grandes vues qui avoient fait entreprendre cette conquête.
Ils ont affronté pendant plusieurs années des dangers sans
cesse renaissans, et enduré avec constance, sous un ciel ardent et
étranger, des fatigues inexprimables ; ils étoient soutenus dans cette
pénible carrière par le désir de se consacrer à la gloire et aux intérêts
de leur patrie; sentiment noble et utile, qui élève l’homme
au-dessus de lui-même, qui inspire les résolutions généreuses, et
en est àda-fois le motif et la récompense. Leur retour eut lieu dans
les circonstances les plus favorables ; ils trouvèrent l’Europç paci’
fiée; le bonheur public étoit l’ouvrage du Héros qui les avoit choisis
pour la conquête de l’Egypte : la France, vengée et triomphante,
se reposoit, sous des lois plus douces, des longues agitations causées
par la guerre extérieure ; elle alloît jeter les fondemens de sa
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