Mamlouks du bèy fugitif; il les attaque, les disperse, et les oblige
de précipiter' leur retraite loin des limites de sa conquête. On
apprit alors que notre escadre, qui avoit reçu 1 ordre de penetrer
dans le port d’Alexandrie, ou de se retirer a Corfou, et qui en
avoit trop différé l’exécution, venoit d’être attaquée et presque
entièrement détruite dans la baie d’Aboukir. Ce revers inattendu,
loin d abattre le courage des Français, leur inspira une resolution
plus unanime et plus constante.
Pendant que le vainqueur porte ses vues sur le gouvernement
civil de l’Égypte, l’esprit de rébellion éclate dans la capitale; il
arme une population nombreuse, et plusieurs Français, surpris
dans leurs habitations ou dans les places publiques, expirent sous
le fer des séditieux. Mais la puissance des armes rétablit l’ordre:
quelques chefs sont sévèrement punis; on pardonne a la multitude
suppliante. L Egypte ignoroit encore quels etoient ses nouveaux
maîtres; elle éprouve, dans cette occasion, la supériorité de
fcitrs forces et 1 effet inespere de leur clemence. Ce trouble momentané
fit place à une sécurité durable.
La côte septentrionale, les provinces intérieures, Suez et le
Delta, étoient occupés par nos troupes. Un art ingénieux créa
presque subitement des ouvrages destinés à la défense militaire du
pays. Ces constructions, appropriées à l’espèce de guerre que Ion
avoit à soutenir, avoient pour objet de résister aux premières entreprises
de l’ennemi, et de conserver tous les approvisionnemens
qu’exigent les mouvemens d’une armée.
L Egypte, délivrée de ses oppresseurs, commence enfin à jouir
des bienfaits des lois; elles y exercent un empire inaccoutumé,
sous la protection des armes Françaises ; et les premiers des habitans
sont appelés aux dignités civiles. Les sciences, après un long
exil, revoient leur patrie, et se préparent à l’embellir. La géographie,
étend ses recherches sur les ports, les lacs et les côtes; elle
fixe la position de tous les lieux remarquables, et fonde ses mesures
sur l’observation du ciel. La physique étudie les propriétés
du climat, le .cours du fleuve, le système des irrigations, la nature
du sol, celle des animaux, des minéraux et des plantes. Les
beaux-arts retrouvent leurs antiques modèles, et se préparent à
transmettre fidèlement à l’Europe ces vestiges immortels du génie
de lEgypte. Un grand homme répand sur tous ces objets l’éclat
de sa gloire personnelle; il encourage par.sa présence toutes les
découvertes, ou plutôt il les suggère ; et son esprit vaste s’applique
en même temps, avec une incroyable facilité, à la guerre, à la
politique, aux lois et aux sciences.
On entreprit alors, sous ses auspices, les recherches dont on
publie aujourd’hui les résultats. Elles furent toutes secondées et
souvent même dirigées par les généraux, les ingénieurs et les officiers
Français., Plusieurs d’entre eux consacroient aux progrès des
sciences tout le loisir que pouvoient leur laisser les opérations
militaires, et ont déjà publié des mémoires très-importans, sur la
géographie physique du Delta, la condition politique des divers
habitans, le cours du Nil, la nature du sol, la description des