
antiquités. On profita de toutes les facilités qui pouvoient s’offrir,
pour parcourir et observer le pays que nos armées occupoient. II
ne se faisoit aucune reconnoissance militaire, qu’un ou plusieurs
membres des commissions savantes ne s empressassent d y concourir,
afin de tenter quelques découvertes utiles. Les Arabes intimidés
fuyoient de toutes parts, abandonnant le théâtre ordinaire
de leurs dévastations : ils cédoient à l’invincible audace d un des
plus illustres chefs de l’armée d’Orient, destiné à concourir si glorieusement
aux victoires de Syrie et d’Aboukir, et dont la main
protectrice et toujours présente faisoit jouir la partie occidentale
de l’Égypte d’une sécurité inaccoutumée. L ’inspection des côtes ou
des déserts voisins, les expéditions éloignées, les marches des déta-
chemens, les négociations ou les combats avec les tribus errantes,
les opérations administratives, tout devint l’occasion ou le but d’une
nouvelle recherche. ,
On avoit apporté d’Europe tous les instrumens nécessaires â
l’imprimerie; ils étoient réunis au Kaire, dans un établissement
considérable, que dirigeoit un zèle actif et éclairé. Cet art, presque
entièrement inconnu aux Orientaux, excitoit toute l’attention des
Égyptiens; il servoit à multiplier les communications, soit entre les
Français eux-mêmes, soit entre les habitans, et favorisoit à-Ia-fois
le succès de l’expédition et le progrès des sciences.
On établit l’ordre le plus exact dans toutes les parties du
gouvernement intérieur. Non - seulement les habitans ne furent
point exposés aux outrages qui signalent dans 1 Orient les succès
militaires, mais on respecta leurs, usages religieux et civils ; les
moindres offenses furent punies avec une sévérité éclatante. Des
contributions modérées et équitablement réparties entre les habitans,
remplacèrent les exactions et les violences de leurs anciens
maîtres. La religion et les lois furent honorées par le vainqueur,
et leurs ministres furent prévenus par ses bienfaits. Le droit de propriété,
si long temps méconnu ou violé, ne reçut plus d’atteinte. La
justice et l’ordre régnèrent dans les villes, et garantirent les transactions
commerciales. Le gouvernement ouvrit toutes les sources de
la prospérité agricole; les canaux destinés à recevoir les eaux du
fleuve, les digues qui en suspendent le cours, furent entretenus
avec soin. On ouvrit des communications nouvelles; on confia
a des talens supérieurs la direction de ces grands ouvrages, dont
les dépenses étoient fidèlement acquittées. Les armes Françaises,
redoutables aux seuls ennemis de l’Égypte, répandirent l’épouvante
parmi les brigands des déserts; la justice et la force contractèrent
une alliance durable.
Chacune des révolutions précédentes avoit été, pour ce pays,
le signal dun nouveau genre d’oppression. Les peuples, accoutumés
à ne voir, dans 1 autorité du prince, que le droit de dépouiller
et de nuire, ne pouvoient concevoir que la victoire fut suivie du
bonheur public, et qu’elle eût un objet aussi noble. Les coeurs
s ouvrirent enfin à la reconnoissance. Des sentimens qu’aucun de
leurs princes n’avoit inspirés, les attachèrent pour jamais au Chef
du nouveau gouvernement. Le nom immortel de B o n a p a r t e