
sont détruits ou dispersés; la justice et l’indulgence dissipent les
alarmes des peuples , et achèvent l’ouvrage de la victoire.
Le général à qui l’on avoit confié, dès le commencement de
l’expédition, le soin d’occuper le Saïd et d’y anéantir l’autorité des
Mamlouks, tempéra les malheurs de la guerre par des traits multipliés
de sagesse et de grandeur d’ame. II vivoit pour 1 espérance
et l’honneur de la patrie ; il devoit bientôt accourir dans les plaines
de l’Italie, et participer, par ses talens, son courage, et le sacrifice
même.de sa vie, à un événement immortel qui eut tant dinfluence
sur la situation de l’Europe. En terminant avec gloire, sur le champ
de bataille, une carrière déjà illustre, il trouva, dans le suffrage
d’un Héros et dans le triomphe de nos armes,j a récompense de
ses généreux efforts, et mêla ses derniers soupirs aux accens de la
victoire. II avoit inspiré à l’armée d’Orient et aux habitans de
¡’Egypte un sentiment unanime d’attachement et d admiration ; et
sa mémoire ne fut pas moins honorée par les regrets touchans des
peuples qu’il avoit gouvernés, que par la douleur et les hommages
des Français.
Ce sont les .événemens de cette campagne qui nous ouvrirent
le sanctuaire de l’Égypte. On découvrit alors le temple magnifique
de l’ancienne Tentyris, les vestiges de Thèbes digne d être
chantée par Homère, et les demeures vraiment royales des Pharaons.
On pénétra au-delà d’ÉIéphantine, dans cette île sacree,
qui semble être elle-même un seul monument éleve par les Egyptiens
à la gloire des dieux et des beaux-arts. Les soldats Français
que la guerre avoit appelés sur les rivages du N il, furent frappés
d admiration à la vue de ces ouvrages immortels, et s’arrêtèrent
comme saisis detonnement et de respect. Ces circonstances, que
1 histoire des arts ne laissera point dans l'oubli, ont eu pour témoin
un homme de goût, digne de les apprécier. Ses ouvrages,
qui ont donné pour la première fois à l’Europe une juste idée des
monumens de l’Egypte, exciteront dans tous les temps un vif intérêt
: ils ont un charme qui leur est propre, et surpassent tout ce
qu on pouvoit attendre des efforts et du talent d’un seul homme.
L ’application des théories mécaniques et chimiques avoit fait
au Kaire des progrès remarquables. On avoit rassemblé, dans l’enceinte
même des grands édifices destinés aux sciences, tous les
élémens qui pouvoient favoriser le développement de lindustrie.
Cet établissement éto|t dirigé par un chef respectable, que les
sciences et la patrie ont perdu il y a quelques années.: il joignoit
au zèle le plus désintéressé un talent ingénieux et fécond, qui lui
suggéroit des ressources inattendues. II avoit déjà enrichi la France
de plusieurs inventions, et donna bientôt à l’Egypte quelques-uns
des arts les plus importans de I Europe. On construisit des machines
hydrauliques; on fabriqua des aciers, des armes, des draps,
des instrumens de mathématiques et d optique : enfin ces grands
ateliers fournirent, pendant le cours de 1 expédition, une multitude
d objets propres à contribuer au succès de la guerre et aux jouissances
de la paix. Les indigènes ne tardèrent point à participer
aux avantages qui résultoient de ces travaux ; on observa leurs