
On dit que les deux plumes de son aigrette tombent et se renouvellent deux fois, dans
l’année. Quelques chasseurs gardent un de ces oiseaux aveuglé; ils l’attachent près d’un
filet sous lequel il attire les autres. Les chasseurs arrachent les deux plumes de la tête
aux captifs, et les remettent en liberté. Le prix d’une plume est d’une roupie (af,,5o). Or
on en ramasse deux ou trois mille chaque année. Elles sont toutes envoyées àRendjit-
Sing qui distribue en présents les aigrettes que l’on en fait. Il y a quarante plumes dans
l’aigrette des Sikes. Les Patans en mettaient jusqu’à cinq cents.
L’oesophage est susceptible d’un énorme renflement. Une humeur, horriblement infecte
suinte des fosses nasales et des bords du bec.
Le Brag vit de poissons et de reptiles. La force de son bec est extrêmement grande.
Les Musulmans mangent cet oiseau; mais le gout de sa chair est execrable.
Le Brag se trouve aussi à Caboul. Il demeure toute l’année en Cachemir.
Je ne l’ai jamais vu qu’au village de Côleganne, où il est commun sur les platanes qui
ombragent la tombe d’un Saint musulman, et où on le respecte.
* Je n’âperçois pas de différence entre le plumage du mâle et celui de la femelle. Le
mâle de ma Collection est plus petit que la femelle; mais il est à peine adulte.
Le nom pendjâbi de l’aigrette faite des plumes de cet oiseau est Colegui; le nom persan,
Diirehs. En cachemirien, Gounde.
Les femmes, à Cachemir, au jour de leur mariage, portent sur la tête une aigrette de
Colegui. Elles la louent pour ce jour-là. Du temps des Afghans, c’était, parmi les hommes,
l’ornement exclusif du roi de Caboul (1). ,j
3° Les plumes effilées de la partie postérieure du dos, assurément beaucoup plus élégantes que celles auquelles le caprice
et la mode ont donné tant de prix dans l’In d e , sont fines, décomposées, et de couleur ardoisée. On sait q u e , chez
le Héron cendré, les plumes correspondantes sont fines et effilées, mais non décomposées (saufquelques-unes des plus antérieures).
En outre , elles sont chez lui blanches ou blanchâtres. L’ensemble de ces plumes est donc beaucoup plus clair
que la nuance générale du plumage chez Y A . cinerea, et plus foncé au contraire chez 1 A. Brag. .,.
4° Le bec de ce dernier est autrement coloré que celui de VA. cinerea. La mandibule supérieure, dont j ignore d ailleurs
la couleur pendant la v ie , est plus foncé que l’inférieure.
Le nom de Brag, que j ’ai adopté, comme épithète spécifique pour cette espèce, est celui qu’elle porte vulgairement
à Cachemir dans l’Inde (voyez le texte ci-dessus). g .
Il ne sera pas inutile de faire remarquer que l’on-considérerait à tort le Héron B rdf comme le représentant du Héron
cendré dans l’Inde tout entière :'ce dernier se retrouve, par exemple, au Bengale, avec tous les caractères qu il
présente dans uotre pays. (Note de M. Js. Geoffroy Saint-Hilaire.)
(i) J’ai transcrit textuellement ce passage du Catalogue manuscrit, quoique Jacquemont en ait lui-méme reproduit une
partie, presque dans les mêmes termes, dans la Cinquième partie du Journal, tom. H I , p . a6 i.
Afin de réunir ici tout ce que Jaoquemonta recueilli sur VA. Brag, j ’extrais de son Journal deux passages qui compléteront
les renseignements consignés dans le Catalogue (idem) : _ . .
« La sainteté du lieu fait respecter, par les chasseurs, d’immenses volées de Hérons établis depuis des siècles sur d’antiques
platanes qui ombragent la Zéarotte, la mosquée, et les environs de ce village (Côléganne). C’est l’oiseau célèbre qui fournit
ces plumes si estimées dans l’Inde, pour en faire des aigrettes. Il appartient à la deuxième section de ce genre. Mais ,
par un caprice étrange de la mode, ce n’est pas des belles aigrettes blanches qu’il porte sur les flancs, qu’on fait usage. Ce
qu’on recherche en lu i, ce sont deux plumes noires, longues et étroites, qu’il porte sur la tê te , parmi une huppe formée
d’autres beaucoup moins longues. Cet ornement n’a absolument que sa rareté et sa cherté pour le recommander »
„ 0n dit que ces plumes se renouvellent deux fois l’an. Elles se vendent une roupie(ar-,5o) chacune ; tantôt plus, et tantôt
moins, selon la longueur. Jadis elles étaient soigneusement réservées par le grand Mogol, qui en faisait présent à ses
Omrahs - Rendjit ne paraît pas aussi jaloux de leur possession exclusive. Chaque année en produit environ 3,ooo. Il n’y a,
parmi les Sikes, que les grands seigneurs qui les portent au côté du turban, ou des soldats connus par leur extrême bravoure.
S’il y a parmi eux quelque chose qui ressemble à nos décorations militaires, c’est le Colegui.Us Afghans en étaient
bien plus jaloux. Au lieu d’une aigrette, le gouverneur afghan de Cachemir en portait quatre à son bonnet, et toutes d’une
grosseur monstrueuse: nul autre que lu i, sous peine de mort, ne pouvait s’accorder cette distinction; au lieu que chez
les Sikes, un homme du commun qui l’usurperait, ne serait que ridicule. »
ZOOLOGIE,—OISEAUX. »7
N° 5o. Ordre des Rapaces. '■ v / •< :
Le Pygargue de Maci£ 1 Halïoetus Macei ; Falco Màcei, Cuv.; Teuî.
A la tête presque blanche, et plus de blanc encore à la queue que l’individu de ma
Collection. Mais il n’y a décidément qu’une espèce.
Très-commun sur les bords du lac de Voulleur. Perche sur les roches d’alentour, et
vient le jour au bord des eaux. Il vit exclusivement de poissons
N08 54 et 55. Ordre des Échassiers.
Le Jacana a longue queue, Parra sinensis^ L ath.
Habite sur les bords du lac de Cachemir. Est peu commun.
Des longues pennes de la queue on fait des aigrettes d’un prix très-inférieur à celles
d« XArdea mentionné sous le n* 48
(1) Vo yez , sur d’autres Aigles, le Journal, Quatrième partie, tom. H , p. a 5o ; et Cinquième partie, tom. I I I , p. 226.
- jD e s détails intéressants sur des Vautours se trouvent dans la Troisième pa rtie , torn. I , p. »5o. (Note de M. Is
Geoffroy Saint-Hilaire. ) . } ' ' ‘ ?
B f " ’aipu f connaître>sous aucun des numéros dÜ Catalogue, plusieurs autres oiseaux qûé’ Jacquemont a eûvôVéï
au Muséum avec les precedents, et q u i, par conséquent, devaient, comme e u x , venir de Cachemir. Tel est, par exemple,
le Phoenicura leucocep/iala de M. Gould.
D autres oiseaux, de la collection de Jacquemont, faisaient partie d’un autre envoi et ne venaient pas de Cachemir. Le
plus rare de ceux-ci est le Dendrocitta leucogastra de M. Gould. ( Idem. )