
seulement d’après deux caractères extérieurs : l’existence de pinceaux de p o i l s aux.oreilles,
et la brièveté delà queue. . .i.
Le premier de ces caractères est de nulle yaleur : quelques Chats ont aussi aux oreilles
des pinceaux qui sont, il est vrai, plus petits et autrement disposés. L’appareil auditif
des Lynx peut fournir au contraire un autre caractère constant et un peu plus remarquable
: c’est la forme allongée et étroite des conques auriculaires. . ■
Le second caractère, sans être important, est plus remarquable. Tous les Guépards, tous
les Chats et tous les Tigres ont la queue longue ou demi-longue; les L y n x l’ont très-courte.
A ces caractères extérieurs se joignent chez les Lynx une conformation crânienne intermédiaire
entre celle des Tigres et des Chats, et un système dentaire un peu différent:
il n’existe à la mâchoire supérieure comme à l’inférieure que trois molaires de chaque
côté ; au contraire, chez les Tigres, les Chats et les Guépards, il en existe quatre en haut.
M. G. Cuvier (i) est le premier qui ait fait connaître ce caractère dentaire des Lynx,
observé par lui dans deux espèces, et retrouvé depuis dans d’autres par quelques zoologistes
récents et par moi-même. Au premier aspect l’existence d’une paire de dents de
moins (en tout 28 dents au lieu de 3o), semble pouvoir fournir pour les Lynx un excellent
caractère générique. Mais trois circonstances diminuent de beaucoup l’importance de ce
caractère. En premier lieu, la molaire qui manque de chaque côté chez les Lynx, et qui
existe chez les autres Felis de Linné, est chez ceux-ci à peu près rudimentaire : c est une
petite dent, placée immédiatement après la canine, et presque perdue dans la gencive En
second lieu, cette avant-molaire ne manque pas essentiellement chez les Lynx : elle se
produit chez eux comme chez les autres Féliens, mais tombe de très-bonne heure, ainsi
que l’attestent, pendant quelque temps, des traces d’alvéoles, et ensuite, quand celles-ci se
sont effacées, l’existence d’un espace vide entre la canine et la dent suivante. Enfin, il
est encore à remarquer que la chute de l’avant-molaire, normale chez les Lynx, a quelquefois
lieu anormalement chez les autres Féliens. J’ai observé des exemples de cette chute
soit sur un côté de la mâchoire, soit des deux côtés, chez le Chat domestique, chez le
Chat sauvage, chez le Chat botté, chez la Panthère, chez le Tigre royal, et chez un autre
Tigre indéterminé. .■•■■■
Le caractère dentaire des Lynx est donc lui-même, aussi bien que les caractères extérieurs
de ces animaux, d’une faible importance; et l’influence que l’ensemble de ces caractères
exerce sur le naturel et les habitudes de ces animaux, de même que les modifications corrélatives
des autres systèmes organiques, restent encore à découvrir. Dans létat présent
de la science, la valeur vraiment générique de ce groupe n’est donc point encore suffisam-
nient démontrée.
IV. TIGRES.
L’usage a déjà consacré le.nom de Tigre en français, et son équivalent dans presque toutes
les langues modernes, soit pour toutes les grandes espèces tigrées, à pupille circulaire, si
généralement nommées Tigres, soit pour les petites, non moins fréquemment appelées
Chats-Tigres, Sous le nom de Tigres, M. Cuvier avait même déjà formé, parmi les Felis
de Linné, un groupe dans lequel le Couguar, bien que non à l’état adulte, se trouve
placé à la suite du Tigre royal, du Tigre d’Amérique ou Jaguar et du Tigre noir (que M. Cuvier
a reconnu depuis (a) n’être pas une espèce distincte)* L’emploi du mot Tigre, avec une va- *
( 1) Loc. cit.' . . • •• ' •
(2) Le Muséum d'histoire naturelle a reçu , il y a quelques années, lè sp e au x d e d e u x jeunes Panthères, 1 une no ire ,
leur générique, s’écarte donc en réalité peu des habitudes déjà prises par les nomencla-
teurs, et- c’est pourquoi j’ai jugé inutile de recourir ici à l’emploi, d’un mot. nouveau.
. Les espèces que je crois devoir placer dans ce genre, sont toutes celles qui ont les ongles
rétractiles, quatre molaires supérieures, et les pupilles circulaires, c’est-à-dire, les Felis
de Jardine, les Léo de Leach, de Jardine et de Swainson, et les Puma de Jardine. Les
caractères sur lesquels reposent les deux nouveaux genres, proposés sous les noms de
Léo et de Puma, sont en effet d’une très-faible valeur.
Il en est surtout ainsi du genre Léo dont la caractéristique, extraite de l’ouvrage de
M. Swainson, est la suivante : Head and neck furnïshed with a mane of long hair ; tail
tufted. Il suffit de remarquer, pour établir l’impossibilité d’admettre le genre proposé
par M. Leach, que, selon cette caractéristique, ni le Lion à crinière rudimentaire d’Asie,
ni surtout la Lionne et le jeune Lion de toutes les races ou espèces, ne. sauraient
trouver place dans le genre Léo. Quant au Couguar, type du genre Puma, il se lie intimement,
par l’ensemble de ses caractères, d’une part, avec le Lion dont on l’a si généralement
considéré comme le représentant en Amérique; d’une autre part, avec le Jaguar;
et il est impossible, sans rompre tous les rapports naturels, de séparer génériquement le
Couguar de ceux-ci, pour le réunir, comme le fait M. Jardine, à l’Yaguarondi, à l’Eyra et
au Pajeros. Le Couguar a, il est vrai, les membres plus courts, et le corps plus allongé
que le Lion et même que le Jaguar; mais une seule remarque suffit pour faire apprécier le
peu d’importance de ce caractère. Le Jaguar différé incontestablement plus encore par
ses proportions de la Panthère que du Couguar : et cependant qui oserait soutenir que
ces deux redoutables Carnassiers ne sont pas des espèces congénères, et même des espèces
liées par les affinités les plus intimes ?
Parmi les Féliens qui ne rentrent naturellement ni dans le groupe des Guépards, ni dans
celui des Lynx ni parmi les Chats, les seuls qui me paraissent s’éloigner à quelques égards
des autres, sont le Serval et une ou deux autres espèces qui viennent se ranger autour de
celui-ci. Non-seulement les proportions générales, qui rappellent celles du Guépard (le
pelage est aussi fort analogue) , mais aussi le développement considérable des oreilles, et
quelques particularités dans la conformation du crâne, permettent de penser que le Serval
pourra devenir aussi par la suite le type d’un groupe distinct. C’est un doute que je
me borne aujourd’hui à émettre : les collections qui sont attendues d’Algérie, et dans
lesquelles se trouve une variété intéressante du Serval, doivent fournir prochainement
des éléments précieux pour une solution que je ne veux point préjuger!
I I . R e m a r q u e s d e J a c q u e m o n t s u r l e T i g r e r o y a l e t s u r l a P a n t h è r e
d e l ’ I n d e , e t d e s c r i p t i o n d u j e u n e T i g r e r o y a l .
Jacquemont, qui a cherché à plusieurs reprises à enrichir nos collections du
Lion d’Asie, n’a pu parvenir à voir un seul individu de cette race ou espèce (i),
pas même à Calcutta, dans la ménagerie du gouverneur général (2). Mais il a
l’autre ordinaire, nées de la même mère et dans la même portée. C’est ce fait qui a déterminé M. Cuvier à effacer de la
seconde édition du Règne animal le Tigre noir ou Mêlas qu’il avait jusqu’alors admis comme une espèce distincte.
• (1) Voyez dans le Journal, tom. III, p. i 45, un passage dans lequel Jacquemont rend compte, avec son esprit ordinaire,
des déceptions qu’on lui a fait éprouver à cet égard.
(a) Quelque temps avant l’arrivée de Jacquemont, .cette ménagerie, outre un Tigre royal et plusieurs Guépards dressés
à la chasse, avait possédé des Lions: mais ces Lions venaient tous d’Afrique. Voyez tom. I , p. 169.
iv. H I m I 6