
ils ne pourroient produire de nouvelles générations, si
on ne les tenoit dans un local échauffé à la même température
, comme on le fait pour obtenir les fleurs et les
fruits des plantes exotiques. Une chaleur aussi forte ne
leur est pas nécessaire en tout temps, mais elle est indispensable
à l’époque où les mâles sont ornés de leurs
plus brillantes couleurs. La nature, si grande dans ces
petites productions, ne les décore avec tant de luxe qu à
l’instant où ils doivent plaire à leurs femelles ; ce n est
qu’alors aussi qu’elle perfectionne leur langâge. La Veuve
se pare de son collier d’or et de ses longues plumes ondoyantes
5 au gris sombre du Comba-Sou, succédé un
riche bleu à reflets ; les couleurs ternes du Foudi dispa-
roissent et sont remplacées par un rouge lustré ; le
Cardinal-Orix quitte la modeste parure de sa compagne
pour se revêtir de plumes aussi remarquables par leur
texture que par leur velouté, leur fraîcheur et leur éclat.
Mais c’est en vain que les mâles se couvrent de la robe
nuptiale , que le svelte Sénégali, l’élégant Grenadin,
l’aimable Bengali, déploient tous les agrémens de leur
gosier, que les jobes Veuves redoublent de vivacité, que
le bruyant Comba-Sou plane au-dessus de sa compagne,
que le Dioch et le Cap-more s’occupent d’avance de la
construction du nid ; les beaux sons de leur vo ix , la
vivacité de leurs mouvemens, leurs caresses même ne
peuvent émouvoir leurs femelles, si on ne procure à
celles-ci une grandè chaleur : toujours indifférentes,
elles fuient leur approche et se refusent à leurs désirs.
Ce n’est pas assez de tenir ces oiseaux sous un cbmat
artificiel, il leur faut encore , pour les décider à s’occuper
d’une nouvelle génération , des matériaux propres
à leur nid, des bosquets toujours verts et touffus,
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où ils puissent le construire sans inquiétude , et une
nourriture convenable à leurs petits : mais la chaleur
est le premier de tous ces besoins ; sans elle, le curieux
qui ne desire que leur conservation, l’amateur qui veut
se procurer de nouvelles générations, manqueroient
leur but, ou n’y parviendroient qu’en faisant le sacrifice
du plus grand nombre. On ne doit rien épargner
pour prévenir des pertes qu’on répare très-diflicilement ;
et quels oiseaux de volière, parmi ceux qui partagent
notre demeure et reçoivent leur nourriture de nos mains,
méritent plus nos soins que ces rares volatiles ! Doués des
quabtés les plus aimables, ils nous charment par leurs
sons mélodieux, nous éblouissent par l’éclat de leurs couleurs
, nous intéressent par la douceur de leur naturel
et la finesse de leur instinct.
Avant d’entrer dans le détail des moyens propres à
assurer une pleine réussite, je dois rectifier une erreur
que plusieurs Ornithologistes ont commise. Les voyageurs
qui ont parlé de ces oiseaux, ayant confondu sous le
nom de Bengalis et de Sénégalis des espèces très-distinctes
, dont plusieurs changent de plumage deux ou
trois fois dans la même année, on a supposé cette particularité
commune à toutes celles qui nous viennent de
l’Afrique et de l’Inde, et l’on a cru que s’il en étoit autrement
en Europe, on devoit en attribuer la cause à l’influence
du climat. Tel est le sentiment de Gueneau de
Montbeillard et celui de Mauduyt, qui ajoute la nourriture
et la domesticité comme causes secondaires. Je puis
assurer, par expérience, que les Sénégalis rouge et rayé,
le Bengali mariposa ou Cordon-bleu , les Grenadins et
d’autres indiqués par ces auteurs, ne font, dans quelque
pays que ce soit, froid ou chaud, qu’une mue par an,