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§ . I I.
Des intestins dans leur situation naUcrelle.
LES tuniques de l'abdomen étoient fort minces, desorte que l'aponévrose étant coupée,
le péritoine se présenta immédiatement, ainsi que les gros intestins dont le volume étoit
très-considérable; quoique fortement gonflés d'air ils n'étoient pas gâtés; la couleur et
l'odeur ressembloient à celles qn'on observe à l'ouverture d'un boeuf.
L'epìploon très-mince étoit cependant très-facile à reconnoitre ; plus petit que celui
de riiomme, il ne couvroit qu'une partie des intestins. Stukeley ( i ) avoit raison de comparer
la ténuité de son tissu à celle d'une toUe d'araignée, ou bien au rete mirabile; il
observa de même l'étendue très-bornée de cette partie. Le docteur Supply a envoyé à
la Société royale de Londres l'épiploon d'un éléphant des Indes, qui a passé dans la collection
de M. Camper.
La description de Perrault (a) est excellente à ce sujet. L'épiploon de l'éléphant surnage
véritablement aux intestins dans toute l'étendue du sens que les anatomistes grecs
ont attaché à sa dénomination. Il paroit divisé en deux parties, et ne présente aucune
apparence de graisse. Blair n'a pas fait attention à l'omentum; il prétend même que
celte partie manque tout-à-fait (3).
Le jejunum se trouvoit dans la région gauche du ventre ; l'ilcum du côté droit ; le
rectum au sortir du colon se fléchit en avant par dessous le pylore, à l'endroit même où
le duodenum s'attache au foie, après quoi il se replie en arrière, passe en longeant la
colonne vertebrale pour aboutir à l'anus. Tous les intestins sembloicnt en état de parfaite
santé; la cavité du ventre ne contenoit qu|une très-petite quantité de sérosité épaise et
jaunâtre.
La distribution des gros intestins présentoit à l'ouverture de l'abdomen un coup-d'oeil
fort étrange. Ils avoient l'air d'être divisés en trois grandes poches séparées, dont le nombre
se seroit augmente d'un quatrième , si le ventricule n'eut pas été entièrement vide.
Aristote (4) semble avoir eu cette distribution des entrailles en vue, lorsqu'il dit : « L'in-
« testin de l'éléphant est divisé par des sinuosités, de façon qu'il paroit avoir quatre
« poches ou ventricules. Il trouve d'ailleurs pour la forme beaucoup de ressemblance
entre les intestins de ce gros quadrupède et ceux du cochon, quoique ceux du premier
soient infiniment plus gros. Pline (5) avoit tort, en adoptant le sens d'Aristote, d'omettre
les mots paroit avoir, desorte qu'en avançant hardiment que l'éléphant a quatre ventricules
, il a soutenu une fausseté qui ne s'accorde pas avec les paroles du père de l'histoire
naturelle.
Comme le texte d'Aristote ne laisse pas que de présenter quelques difficultés, nous
pensons qu'il est à propos de l'insérer i c i , en offrant en même tems les conjectures de
l'auteur qui serviront àl'éclaircir.'o ii ïynf-y Xx" »^fî^i't TÎT,»p»t ¿x'"-
Et peu après ; e, xai n r/^çm ¿yymU', x^f" 'X," "n''»- Ce que les traducteurs ont rendu
(1)Etsay toward» Ihe anatomy, eic.,pag. gi.
(2) Mimoires pour lervir a VhUloire rtaturclle dei nnimaux, pag. 52 L
(3).Vfm. of the royal .SocUly abridged, etc., vol. V, pag. 389.
(4) Ilul. anim.. lib. I f , cap. 17.
(5) jtlUl. nat.. lib. XXXin, cap. 69.
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de la manière suivante : EL-phanto intestinum ita est sinuosum, ut alvos habere quatuor
videatur; in hoc etiam cibus recipitur, nullum enim receptaculum cibi alimi separatim
adcsc. Par ces mots il faut entendre que les alimens se trouvent distribués indistincterac-nt
par - tout cet intervalle, comme s'il n'y avoit pas de ventricule particulièrement destiné
à les recevoir. Cependant Aristote étoit bien persuadé que l'éléphant n'a qu'un seul estomac,
puisqu'il en parle à l'article des animaux qui ont le ventricule simple et non
divisé, comme l'homme, le lion, le cochon et d'autres mammifères. Une observation
particulière faite par M. Camper, explique merveilleusement ce qui peut avoir motive
l'expression de ce grand anatomiste ; c'est que les alimens du jeune éléphant dont nous
parlons conservoient jusque vers la fin du colon, la forme d'une bouillie de couleur jaunâtre
et paroissoient peu altérés; tandis que dans les ruminans ecles carnivores les
alimens sont presque totalement digérés avant de parvenir à cette partie dli canal alimentaire:
ondistinguoit le foin inégalement broyé et des morceaux de pommes de terre
qui se rassembloient en crottes à la flexure du colon très-près du rectum. Lu consistance
en ressembloit aux excrémens des chevaux.
La forme du ventricule est beaucoup plus alongéc que dans l'homme. L'extrémité voisine
du cardia se termine par une poche très-considérable et doublée à l'intérieur de
quatorze valvules orbiculaires, qui semblent en faire une espèce de division particulière.
Le reste du ventricule présente une surface unie traversée à l'intérieur d'une multitude
de vaisseaux sanguins. La tunique* musculaire avoit beaucoup d'épaisseur aux
environs du cardia et autour de la poche voisine. Celle-ci contenoit en abondance du
suc gastrique très-consistant, dont l'odeur avoit une grande analogie avec celui qui se
trouve dans la caillette des ruminans.
Les intestins ainsi que les excrémens répandoient une odeur légèrement acide et propre
à tous lès herbivores. L'eau dans laquelle ils furent trempés contracta, par la qualité savoneuse
de la bile, une plus grande disposition à se charger d'écume qu'on ne l'observe
généralement en pareilles circoiii>tance.<.
Galien (1) a remarqué seulement la grosseur du colon et sa ressemblance avec celui
du cheval. Perrault (a) a donné de très-bonnes descriptions de la forme et de la grandeur
de cet inJestin, en ajoutant que sa capacité surpasse même ce qu'on auroit pu attendre
de la grosseui- de l'animal. Il rend aussi justice à l'observation d'Aristote sur
l'apparence des quatre poches, qu'il a U'ouvé conforme à l'ouverture du corps de son
éléphant, et relève en même tems l'erreur de Pline sur cet article. Tout ce qu'il a donné
sur la position des intestins, leui- structure et l'insertion de l'oesophage vers la partie
moyenne du ventricule, s'accorde avec les observations de M. Camper. Mais celui-ci
n'a pas mesuré la longueur du canal alimentaire, à cause de la jeunesse du sujet.
Siukeley (3) n'a fait aucune mention de la forme ni de la structure du ventricule. La
grosseur énorme du colon lui parut égaler celle d'un homme ; la ressemblance qu'il
trouve entre les valvules internes du colon et des bouteilles n'est pas très-juste.
Blair (4) a trouvé quelque rapport entre les panses de l'éléphant avec le feuillet et la
caillette des ruminans. On voit par conséquent qu'il n'a pas bien examiné ces parties.
Gillius n'a rien laissé sur ce sujet qui mérite d'être rapporté.
La forme extérieure du ventricule se voit à la figure i de la planche VIII. La struc-
(1) Dc Analonif adm., lib. f^I,
(a) Manoircs pour si<vi> ri fhUtoirc naturtlle dts aninuiiix, pag. 524.
(5) Kisny tuwartU, etc., p.ig. 95-
(i) Man. aj the royal Socicly abrid^, etc., Vol. V, pag. 297.