
r i \ . PRINCESSE ROYALE.
lina (notre Fraise de Bath), plante avec laquelle la Princesse royale a
conservé plusieurs traits de ressemblance.
T.a Fraise Princesse royale est plus qu’une Fraise maraîchère; je la
nommerai une Fraise agricole. Son apparition a opéré uno sorte de
révolution dans la culture des environs de Pai'is, où actuellement on
ne peut évaluer à moins de 450 à 500 hectares l’étendue du terrain
employé à sa culture en plein champ. Elle y prospère dans des terres
(le nature et d’exposition très-diverses, et les cultivateurs ont remarqué
que ia culture des Fraisiers est une excellente préparation pour celle
du lïié, ce que les fumures et les sarclages qu’on leur donne expli-
(pient très-!)ien. Les feuilles vertes, que nos paysans coupent après la
récolte des Fraises et qu’ils donnent à leurs vaches, sont une ressource
assez précieuse à cette époque de l’année, où la sécheresse prive souvent
(le foiin-age les petits cultivateurs. Les feuilles sèches et les
coulants sont encore employés par eux pour enfouir el alléger lés
terres trop fortes.
Si la Princesse royale était plus savoureuse, plus sucrée, qu’elle
n ’cùt pas sa mèche ligneuse qui en fait un fruit grossier, aucune
Fraise ne l’égalerait, car elle joint à une grande beauté toutes les qualités
qui peuvent être requises d’un fruit destiné à être cuUivé sur une
grande échelle. La plante est très-rustique, dure longtemps et se
mulliplie facilement. Elle donne dès la première année de sa plantation,
et est très-fertile; son fruit est précoce, lourd, il supporte bien le
transport. Tous les fruits mûrissent à peu près en môme temps, ce
qui permet de les cueillir en trois fois. Us ont la faculté de pouvoir rester
niùrs dans le champ cinq on six jours avant d’ôtre cueillis sans
sécher ni devenir amers. Ils ont aussi celle de rougir en une nuit, s’ils
sont cueillis peu avant leur maturité, et confinés, comme disent nos
cullivaleurs, dans des paniers exactement recouverts de feuijles fraîches
de Châtaignier; ce qui, du reste, donne aux Parisiens ces détestables
Fraises « rouges pour la Halle, » qu’ils ont en primeur.
La cullare tic la Princesse royale donne lieu à une assez jolie
FR. PRINCESSE ROYALE.
petite industrie, celle de la parure. Quelques cultivateurs, ayant des
terres à mi-côte, bien saines et bien exposées, cultivent, trcs-espacés,
de jeunes pieds de ce Fraisier, auxquels ils ne laissent que deux hampes
et à chacune d’elles deux ou trois fruits, qui deviennent énormes,
et qu’ils vendent à leurs voisins pour parei' le dessus de leurs paniers,
ou à de grands fruitiers de Paris pour orner leurs étalages. A l’époque
où lesFi'aiscs ne se vendent plus que 20 francs les 50 kilogr. la parure
vaut encore 50 ou 60 francs. Mais, comme cette culture est plus hasardeuse
et demande plus de soins que celle qu’on fait ordinairement en
plein champ, il n’y a que les très-habiles cultivateurs qui l’entreprennent.
Le bas prix des Fraises Princesse royale a fait pénétrer leur usage
jusque dans les classes les moins aisées de la population de Paris, ce
(jui, à l’époque des grandes chaleurs, est un véritable bienfait pour
elles, la Fraise étant, selon l’expression du docteur Bretonneau, le
meilleur antidote de la charcuterie, qui entre pour une si grande proportion
dans ralimenlalion des ouvriers des villes.
Si l’on réfléchit que tous les pieds de Fraisier Princesse royale (qui
existent dans les 600 hectares environ qui en France sont employés
à sa culture) proviennent de la plante unique obtenue en 1846 par
M. Pelvilain, on ne s’étonnera pas du léger affaiblissement que nos
paysans remarquent dans une plante qui en douze ans a dû se perpétuer
au moins 160 millions de fois par séparation. Jusqu’ici les semis
de la Princesse royale n’ont rien produit qui l’égalât; la Fraise Reine
iMarie-Amélie seule a quelque mérite.
Presque toutes les Fraises qui viennent pendant l’hiver approvisionner
les glaciers elles marchands de comestibles de Paris sont produites
par ce Fraisier, forcé en serre chaude d’abord, puis en serre tempérée
pendant les mois de janvier et de février, enfin sous châssis, en quantités
immenses, pendant les mois de mars el d’avril ; el, pour cet usage
surtout, la Fraise Princesse royale l’emporte sur toutes les Fraises
connues jusqu’ici.
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