VOYAGE A SURINAM.
Les ma¡}!is¡iis li's phis rciiiart]iiiibles dc opile rue soul ceux qui
|>iii tp|i1. le nom lie Vclte-W'arior, lis sonl orclinaireoieul Icuiis
pill- ilesjuil's (jiii pnssixlntil, coninie ceux d'Europe, l'art cl'alliier
les Ü(heteIIvs el de faire tl<'S affaires avcc toutes les classes de
la population, soil en vemiaiil, soit en li-oquaiil toutes sortes
d'objets. Les inarcliaiidises qui otil entre elles le moins de rapport
s'y li-oiivenl, et l'on voit sur la même planche uq fromage
de Hollande et une piik'e de mousseline, un jambon de Rayonne
el un pol de pommade, une pen uque et des jouets deiifiints.
Parmi ces luajpisins il j eu a qui sont fort riches et bien lussortis,
et on y trouve tout à la fuis de quoi manger, s'Iiabiller et se meubler
(Fig. 50),
Les ateliers de tailleurs sont qiiolquetbis tenus p;ir des esclaves
ayant sous eux d'autres esclaves. Je vis uu jour un nègre diipour>
u<le toulvèlmientse taire prendió, dans un de ces alelim,
mesure d'un babil, en se tenant, sur le seuil d.i in porte, afin (pie
les passants pussent voir qu'il allait avoir un liabil, objet d'orgiieil
el de luxe pour les nègres ( fig. 5-2). Ordinairenieul les bibilaiits
<le la ville sont babilles de blanc: mais, dans les cérémonies et
aux dinei-s d'étiqu.-lte, les bomnies snnl habillés de drap noir,
vêtement que l.i chaleur rend fojt incommode, mais dont
heureusi-mml il est [wrinis de se iléUui'asser à In fiti du repas.
Le.s tailleurs sont fort chei's, [wrce qu'ils seul obligés de laire
venir d'liurope une partie des draps et des éloifcs dont ils se servent,
Mais. en général, ils ne travaillent pas bien. el les habitants
l idies donnent la préférence aux habillements eonfei'tionnés
en Europe, quoiqu'ils soient fort coûteux.
Les cordonniers ,>ont «.paiement nombreux. et on remai'tpie en
eux les moeurs et les Ijabitudes de leui-s coufi-ères d'Europe, Assis
el travaillant devant leur porte, ils chantent ou fument, ayant d'un
côté une cruche rem)ilie d'eau, de l'auti-e une calebasse avec des
banaïK-s. On rcncontro assez oixlinairement chez eux un singe ou
un {K-rroquel, au lieu du merle ou du sansonnet, compagnon habiluel
descordonniei-s européens (Fig. 55).
De mémec)uc les draps, les cuiis se lirenl de la métropole, et
ils sont assez généralement de médiocre qualité: cela n'empi'che
pas que les cbau.wures ne soient fort chères.
Le.f bouchers vendent toute- espèce de viande, deux fois par
semaine; niais le veau est rare et cher: le pore y est excellent et
le goiit en est différent de celui des cochons d'fc;ui'o|)e. Il existe
pour la vente du |>ain des règlements pareils à ceux qui ont été
fails dans nos villes our<ipeem»s. Le pi'ix en .-.si réglé d'ajn-is la
(|uantilé de farine qui est apportée au marché. Le pain, d'ailleurs,
nest [>as mauvais, et on en trouve de loutcs les espèces chez les
boulanjjei-s.
On conçoit san.s peine que, dans une ville où il y a un grand
hi.-se de toilette, et où les femmes ont une coquetterie qui ne le
cède en l'ien à celle de nos élégantes, les niai'cband.a tie modes,
qui sont on Ii liai rement des négresse.s. doivent cire très-nombrciises.
Aussi Irouve-t-on «m grand nombre de magasins de ce
genre dans la l'uc <le Sarameca. l'iusieius de ces marchande.s font
venir leu.-s modes de Paris et de Londres: mais je suis (enté de
croire que les petit es-mai tresses de ces deux villes jetteraient peutêtre
un coup d'u-il de d.kliiiii sur des chapeaux ou des bcninet.s que
le transjiort, la ])oussièrc et la chaleur ont uo peu fanés, d'autant
plus que- selon toute apparence, ou ne reçoit point il Surinam
ce que les deux gi-andes capitales du goiit offi'enl de plus
frais el de plus élégant. Mais on se contente de ce qui arrive,
j>ai'ce que les objets de comparaison manquent; et une missic ou
quekpiefois même une riche créole se pavane comme une i-eine
avw ce t(ui serait dédaigné |>ar les petites bourgeoise» de Bruxelles
et de Lu Haye.
Les blancliiiseuses sont fort bonnes A Surinam : mais elles sonl
chères. Tout le monde connaît, au reste, la supériorité des blanchissiMises
améric,-iines sur les n.Ures. \"oil;i pourqtioi plusieurs
négociants des grands ports de France, et principalement de Hordeaux.
envoyaient autrefois blanchir leur linge dans les colonies,
.l'ignore si eel usage existe encore aujourd'hui. On est fort difficile
sur ce point à Surinam: aus-si. les blanchisseuses, qui sonl
presque toujours des négresses, y ont-elles alteinl un degré de
perfection qui est rarenxmt surpassé ailleurs (Fig. 34),
On voit aussi dans la ville de.'t magasins tenus [wrdrecapitiiines
de navii-es. qui louent des parties de maison et mettent en vente
leurs pacotilles. Ces magiisiiis sonl ordinairement assoï fréquentiis,
parce qu'on y trouve abondamment des productions éti-jngèi-es
au pays, el que fournissent les deux eontinents.
Les cafés, les salles de billaixl, même les cabarets n
manquent
pas dans cette rue. C'est là que se réimissenl, comme
les oisifs, les jouein-s et les buveurs: c'est là qu'i perd son
temps, son argent et quelquefois sa santé. L'abus des liqueui-s
est. de même ((ue <laas tous les pays chauds, la principale cause
des maladies qu'éprouvent les étrangers, et qui les enlèvent quelqu(^
fois avec la plus grande rapidité.
Il est cependant un dang(!r dont ils doivent se gaixler eucnre
avec plus de soin, c'est le libertinage: el, il faul le dire, une
foule de pièges sonl tendus à l'étranijer dans toute la rue de
Sarameca. les missies mêmes i[ui n'ont quelquefois aucune
i-éserve dans leur eonduile ni dans leurs propos, el dont l'oceupation
oitlinaire est de s'asseoir ou de se coucher nonclmlnmment
de>ant leur maison el d'écouter les pro]ios effi'onlé.s des
créoles et des blancs, tout cela présent.! aux nouveaux .lébarqués
autant de dangers pour les m.rurs el pour la sanlé.
Le moyen le |jlus sur. au reste, pour conserver sa santé dans
un climat alternai i vement si bridant el si humide, c'est d'alwrd
<révit(-r tout excès, el ensuite île ne pas s'occuper de Sii snnlé.
Les passions, les chagrins, la crainte môme, ue manquent guère
d'ètie fatales à l'Eui opc^en. tandis que la moralité, l'iiidiRorenec- p|
la gaité enlretienneiil chez lui une bonne santé, el le rnel.teni à
l'abri d<'S fièvres pernicieuses qu'il aura vonhi éloigner el dont
il aura cherehé inutilement à se pré.server.
Les rues de l'aramaribo sont ternies avec une grande propreté,
principalement celle doul j'ai parlé, et qui est un point de .•Ouuion
poiii' les oisifs et les curieux. Des esclaves du gouvernement les
parcourent chaque jour, en condiiisiuit chacun une eliarrette al