• VOYAGE A SUniNAM.
imliuicr, drcsseni majMlueuscmeiiUours lôl«s couronnées, Uinclis
i]iie le collon-lree, le lokerhoiil cl le tamarin éUileol à côlé
d'eux Ifiiii's Inrtjes propoilions. Lù, c'est le cotonnier avec ses
f<;uilles vertes, ses larges fleurs jaunes et ses ({lobules aussi blancs
que la neige, où miirlsscnl des graines noires : plus loin, la canne
à sucre, doni la flèche ai{;cinline et chevelue se balance molleinenl
au souffle de l'air, embaumé pai' les parfuuis du faraiiiier,
de l'ouralc et du uiayèpe. Comme des fleurs ddiacbées du sol
et dmicemenl promenées par la brise, le papillon et te colibri
voltigent en buliiianl. le suc des plantes, tandis que sur l'azur
si bleu de ce beau ciol les troupes nombreus<-8 de flamingos
t'iencli-nl leur ligne d'un rougo si «îclatant.
La disUnnce entre les deux rives, à l'embouchure du fleuve, est
au moins de trois quarts de lieue. A gauche, se dessine Bi-aams-
Punt. qui s'avance dans lu mer; plusloin, sui' la même rive, s'élève
la rcdotile de Lc\<le et le fort Amsteitlani : à droite, on ^oil
apparaître la riidoii te del'iuuierend, le fort Zelandia et les édifices
de Pai'aniaribo, la CH)JÍtale. D'imoienscs f'oi'èts qui se perdent dans
l'horizon forment le fond de cet admii'able tableau. Un «(uittant
Braanis-l'unt el en remontant le Sui'inam, on rcnconire, deux
lieues plus loin ilc chaque coté de la rivière, la redoute de
Leydc (Fig. 2) et celle de l'iirnierend, dont nous venons de
parlei": ces deux batteries défendent le passage en temps de
guerre et secondent les opérations de la forteresse Amsterdam
(Fig. 3), située au couflucnt de la Coinawyne et du Surinam.
i'ius haut, on apei-çoit, sui- la rive droite du Surinam, un
second poste d'avertissement, nommé Jagt-Lust, délices de la
chasse (Fig. A). Ûès que la vue d'un navire a été signalée, le
Siu-iiiam se r.ou> rc d'une foule de barques el de canots. On voit
se presser autour du navire étranger, les colons venus des habitations
riveraines, impatients de connaître les nouvelles aj>))Orlées
<rEurope. Les interrogations se siiccedent si rapides, si diverses,
de tant de ciJtés, et sin- tant de sujets, que l'on ne sait comment
i-épondrc à toutes. Ajoutez à cela les acclamations el les chants
des matelots, auxquels répondent les mille cicláis de la joie des
indigènes, le son bruyant de leurs instruments, ce mélange si
varié d'idiomes et de l'aecs, et vous n'aui-ez encore qu'une faible
idée de la nouveauté et de l'originalité de cette scène, Le |jonL
du naviie se ti-ouve en un instant couvert de fleurs et de fruits,
(lue chacun s'empresse de faire accc-pler aux passagers. L'un vante
lu saveur parfumée de ses banancw. l'auti-e la douce fniiclu'ur de
ses limons el de ses oranges, colui-ci ne trouv e i-ien de comi>arahlc
à celle liqueur délicieuse que donne le fruit du cocotier, ou bien
à celtc- moelle vé|;étale que fournil le puirkr avocat. Comment
échapper à tant de séiluetions, qui peuvent cependant de^ enir si
funestes à la santé de ceux qui no sont point acclimatés?
Les lé|jers curiáis (pie conduit, un nègre à l'aide de sa pagaye,
luttent entre eux devinsse, tan(lis<iue les élégants Tcnt-boteu, ornés
avcx lo luxe le plus délicat. glissent rapidement sni- la sui'face du
Heuve. Courbés sur U-s rames dont ils accoi-deni tes mouvements
au rliythnie d'un chant monotone, six robustes nçgrcs laissent voir
l'ébène de leui's membres nus, cjui semble briller sous les feux
du soleil du tropique, el foni vnlei' sui' les eaux la gi'acieuse embarcation
où repose nonchalaminent le colon étendu sur de riches
tapis.
Au confluent de la Comawyne, dont le cours se dirige vers le
aud-ouesl, el du Surinam, qui coule vei-s le sud-est, se trouve
une langue do terre, une espèce d'isthme, sur laquelle s'élève
la forteresse Anislei-dam. Elle est bilie sin- un fond de roc.
au milieu d'un petit marais. Commencée en 1735 ou 173-1,
elle fut lenninée en 1747. Sa cii-confércnce est de plus d'une
lieue. Elle est cntoin'éc d'un large fossé el d'tm chemin couvert
garni de palissades, Une barre de vase ne laisse de passage
aux vaisseaux que sous le feu des batteries du fort. Au
noixl-oiicst, des fonilrièi-es el d'impénétrables forèls lui servent
de boulevard. Elle est flanquée de cinq bastions cl forme un
pentagone régulier. Ses muniilles ont six pieds d'épaisseur et
•sonl coupées de larges embrasures. Elle protège à la fois la
ComaT\'yne el le Surinam- Tous les navires qui ¡)assciit sur l'une
ou l'autre de ces rivières sont exposés aux feux croisés de celtc'
forteresse, cl des redoutes de Leyde et do l'urmerend. Le fort
.\msterdam renferme de nombreux magasins de vivres et de
munitions, sufKsiints à tous les besoins d'une forte garnison : mais
celle garnison n'est jamais considérable, attendu que la dépense
de la colonie ne l'exige pas. Un capitaine d'artillerie, qui a le
litre de commandant, esl à la léte de cette garnison. Chaque
navire qui entre en rivière jette l'ancre à une certaine distance
du fort, en hissant .«on pavillon el en adressant ses pa)>iers au
commandant, afin d'obtenir l'autorisation de conlinuer sa route.
Ceux qui essayeraient de se soustraire à celte ordonnance, courraient
risque d'être immédiatement coulés bas.
J'adinii'ais en silence la scène majestueuse qui s'étendait devant
moi. Amstei-dam est la senliiM'lle avancée dont, le regai'd protftctcin'
mesine deux larges fleuves, qui scmhlenl couler aux
pieds de leur mailre. Ses larges eudjrasures s'ou^i'ent, prêt.>s à
élever leur voix tonnante, pour arrêter l'audacieux qui tejilerail
de porter- la dévastation sur ses rives fertiles. D'immenses forèls
protègent la terre de lein-ombi'e élernellcet déroulent au loin leur
amphilhéàlre de verdure. Et loul à l'enloiu- de vous ces vég<.itations
abondantes en fleui-s les plus riches et les plus nouvelles,
ces parfums qu'on n'a )>as encore respirés, ces eaux limpides où
brillent, les mille couleui-s de poissons inconnus, toute cette nature
si belle, dont l'homme civilisé est venu protéger les trésors,
tout cela est fait réellement poin' vous étonner el vous ravir.
Le tableau si noble et si imposant de ces fieuvifs rivaux, qui
viennent mêler leui-s flots rapides, pour aller ]>lus loin et les
confondre au sein de l'Océan, peut cependant offrir quel que foi.«
des scènes pleines de «lé.solation. A cette ép.jque de l'année, qui
L-orrespond plus particulièrement à l'hiver de nos climaU d'Europe,
et qui se signaU^ i>ai- les pluies continuelles qui descen-
<lenl comme par torrcnls du ciel, les deux fleuves débordés
rouleni avec impétuosité leui-s vagues amoncelées, entraînant
avec elles tout ce cpii s'offre à h'ur passage. Alors on voit
flotter les forets avec leurs immenses troncs, leurs labyrinthes
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