VOYAGE A SURINAM.
Toir plus haul, I'cmplil aTCC lui Ir servi en cl les devoirs d'une
vëril.-ibic esclave. Elle esl jourûcllemenl exposée à ses caprices
et à sn brulnlilii, et même il a le droit de hi rü|>tulfFr cl d'co
prendre une nuire, si cela lui convient, La seule (jolanteric que
le mnri consente parfois à faire à sa femme, c'est de lui faire
présent, en temps de (;ueiTe. d'une partie de la cheveliire de
l'ennenii qu'il a vaincu.
Ce qui (ail mieux connaître la dureté avec laquelle les Indiennes
SODI traitées, el la rude indifférence que leurs maris sout dans
l'iiabilude de pi-ofe.sser envers elles, c'est la coutume ovi elles
sont, lorsqu'elles sont devenues mères, d'aller le lendemain avec
leur DOUTeau-né à la rivière, pour s'y laver, elles et leur enfant.
Lorsqu'elles revienoenl au cartel, le raari se couche dans son
hamac, cl reçoit les visites et les félicitations de tous ses amis.
Sa femme lui fhil alors de la bouillie qu'elle partage avec lui.
Pendant co temps-îà, l'enfant est nu à terre, couché sur une
naltc OH sur im morceau de toile de cotou. S'il a besoin de nourlilui'c,
il l'iiuliquepai-ses mouvements: sa mère s'appixiche pour
lui donner le sein, cl quelquefois se couche à cùlé de lui.
S'il y a des jumeaux, le père, selon un usage barbare consacré
ebczlcs Indiens, les place tous les deux dans une pagaie ou panier
el les lance à l'eau. Le premier qui surnage est reconnu lui
appartenir. Il le rapporte à la mère el va se coucher comme à
l'ortlinaire, Celle coutume inhumaine vient de la stupide persuasion
où est l'iadien qu'un homme ne peut avoir qu'un seul
enfanl, et que l'auti'e est nécessairement le fruit d'un adultère,
Aussi laisse-l-il périr impitoyablement le second.
Une vieille négresse m'a assuré avoir elle-même sauvé des eaux
une de ces malheureuses victimes, et l'avoir élevée avec ses autres
entacls. C'était une fille qui se trouve maiutcnant au village de
Mkei'i, où elle est mariée avec un créole.
Une Indienne ne nouml jamais son enfanl que pendant huit
ou neuf mois. Elle ne l'emmaillolle et nn le berce jamais. Elle
prétend avec raison quelepremipr procédé empêche leurs forces
de se développer, et que le second les rend stiipides et de mauvaise
humeur: ce qui est assez remarquable, c'est qu'en effi't on
ue Ij-ouvcchez eux. non plus que chez les nègres, ni infirmes,
ui idiots.
L'enfant, dis le moment d mis par terre,
comme je l'ai dit, el là, rien ne gènanl ses mouvemenU, il développe
en liberté ses orgaues, el donne à ses membres la souplesse,
la force cl l'agilité qu'on reconnaît en eux dans la suilc.
Les Indiens sonl ordinairement leurs propres médecins. On
en trouve cependant parmi eux qu'on nQmme;>nyn*, et qui fout
le métier de guérir: mais ce scinl plulôt dc-s charlalatis nu des
jongleurs qui profitent de la croyance où sont quelquefois des
Indiens qu'ils sonl possédés du malin isprit, qu'on ci-oit ¡wiivoir
chasser en jouant de la flùte, comme j'eus l'occasion de le voiiun
jour à un enfanl (Fig. 85). Ces médecins le font disparaître
en dansant autour du carhel du malade el en tenant dans Ic.s
mains des macans ou espèces de calt.-basscs entouix^s de çrelols
el ornées de plumes. Ceux qui ne peuvent point se procurer
l'assisLince de ces étranges médecins, se guérissent eux-mêmes
en se fournissant, daiis le.? bois, des drogues nécessaires. Les
femmes sonl très-bonnes garde-malades el fort adroites. f'Ius
d'un Européen en a fait l'cxpéiience. Elles emploient avec succès
le (jayac ut le sa.wafras pour la guérison des maladies syphilitiques,
si communes dans ce climat. Elles font aussi avec des
piaules quelles connaissent seides, d'excellent sirop capillaire.
Les Indiens sonl rai-emenl malades. Les seules indispositions
auxquelles ils soient souvent sujets, sont les douleurs de tète el
les i-elàcliemcnU de venire. Pour se guérir, ils usent de remèdes
fort simples.
Il est assez difficile de dire si ces peuples ont, ou non, une
religion. Au reste, les Indiens qui Iiidjilcnl la frontière et le
long des cotes, el auxquels les Européens ont donné le nom <Ie
Caraïbes, paraissent, en général, être de vi-ais alliées: car on n'a
jamais trouvé chez eux ui temples, ni vestiges d'aucune religion.
On n'y rencoulre mémo aucune trace d'idolâtrie, comme on en
voil au Pérou et au Chili. Il y en a cependant parmi eux qui
croient à une autre vie et à la métempsycose, cl qui pensent que
le ciel existe de loute élernilé, mais que la leri'e et la mer ont
seules élé créées. On eu trouve ujcme qui conservent sur l'Être
supi-cme une tradition selon laquelle il aui'ait fait'descendi'o sou
fils, du ciel sur la terre, pour tuer un serpent horrible qui dévastait
ime partie de l'Amérique. Après que le message!' céleste
eut vaincu le monstre, il se serait formé, selon celle même tradition,
dans les entrailles de l'animal, des vers qui produisirent
chacun un Caraïbe el sa femme et peuplcrcnl ainsi la Guyane, La
guerri' cruelle que le serpent avait faite aux nations voisines fui
continuée par les Caraïbes sortis de lui et qui les l'egardent toules
comme leurs ennemies.
Quanl aux Indiens du Brésil, ils adoraient, sous le nom de
Toupan, un cerlain esprit qui préside au looncrre. Quand ils
l'entendainnl gronder, ils étaienl toujours saisis d'une gi'ande
épouvante el ne manquaient jamais de dire en se prosternant :
— L'esprit est en colère.
Et ils cherchaient à le calmer en lui faisant des offrandes, selon
quelques voyageurs, qui, du reste, assurent n'avoir jamais rcnconU'échez
ces peuplades aucune autre trace d'idées religieuses,
car elles n'ont pas même dans leur langage un mol qui exprime
le nom de Dieu.
Le tonnerre est pour les Caraïbes .'«luvages la grande pui.isance,
et ils croient tenir de lui la scinnce do l'agricullure. Ils piofessent
aussi un respect religieux et idolâtre pour le Uimaraca, fruit qui
ressemble beaucoup h une calchassf^ et auquel j!s rendent de
grands honneurs. Les prêtres, en visitant leurs Iribus, ne manquent
jamais de se niiiuir de leurs maracas nu lamaracas, qu'ils
font adorer solennel leincnl en les ornant de loelKa plumes el en
les élevant au haut d'un bàlon qu'ils fichent en terre. Il.s pei-suadenl
à leui-s ouailles de porter à man(;er et à boire à ces maraciis,
parce que cela leur est agréable et (¡u'ils se plaisent à être régalés
de celle manière.
Ou suit qu'à l'arrivée de Christophe Colomb à Sainl-Uomin