
par exemple, fous fa première peau, vit fouvent de pimprenelle : mais aufïïtôt
qu’elle en a changé, elle abandonne la pimprenelle, & ne vit plus que de
feuilles d’ormeaux. On trouve même des Chenilles, lorfqu’on les renferme pour
les éduquer, qui.quittent;leur nourriture ordinaire, pour manger de préférence
«elle des autres efpéces qu’on renferme avec elles : ce qui prouverait que le
.dégoût ou la fatiété d’une même nourriture leur fait trouver plus de faveur
dans des alimens, quelles dédaigneraient vraifemblablement dans un état de
liberté.
Il arrive quelquefois que les Chenilles en changeant de peau, changent aufli
de figure & de couleur, de façon qu’on pourrait les prendre pour des efpéces
différentes (a); mais les Papillons quelles produiront les feront aifément recon-
noître. Il ferait cependant à louhaiter de les pouvoir fuivre dans tous leurs
changemens ; cela ferait facile en s’y prenant dès leur naiffance. C’eft le moyen
de parvenir à les difcemer aifément, à quelque période quelles foient de leurs
mëtamorphofes.
Chaque efpéce particulière de Chenille a une conduite analogue à fa confti-
tution & à fa conformation. Les unes fe retirent prefque toujours dans la terre;
d’autres rampent fur fa furface. .Celles-ci fe font des habitations de foie fur des
plantes; celles-là relient à découvert fur les feuilles, & d’autres deffous ou
appliquées leiong de l’écorce des branches, de façon qu’on a peine à les
difcemer. Il en eft qui font toujours logées fur les arbres les plus élevés ; d’autres
qui fe retirent fous l’écorce ou dans des trous d’arbres : chacune enfin a fou
induflrie particulière qui lui eft propre. Il ferait par conféquent de dire
dans quel lieu précifément on peut les trouver. En général tout ce qui eft plante
ôc verdure leur ell deftiné.
Si l’on en remarque, comme cela arrive fouvent, qui fe foient retirées dans les
écorces des arbres ou dans des trous, d’où il ferait difficile de les déloger fans les
bleffer, en les touchant légèrement à plufieurs reprifes fur la partie la plus
enfoncée, on les oblige petit à petit & fans violence à fortir de leur retraite ; &
en préfentant au-deffous une petite boëte, on les reçoit fans leur faire de mal.
(a) Le petit Paon eft dans ce cas.
Lorfqu’on trouve quelque Chenille dont on voudrait connoître le développement
& toute la conduite, il ell une attention effentielle à faire avant d’en
entreprendre l’éducation ; c’elt d’obferver en la ramaffant, fi elle vit en fociété
ou ifolée, ou même fi en la trouvant en fociété elle n’ell pas différente de
celles avec qui elle vit. Comme il en ell quelques efpéces qui mangent les
autres, le plus fur moyen d’élever une Chenille inconnue, c’efl de la "nourrir
feule; au lieu que toutes celles qu’on trouve en fociété, peuvent être nourries
enfemble fans aucun inconvénient.
Il faut bien prendre garde de les bleffer en les touchant fur-tout lorfqu’elles
viennent de naître. Elles font alors très-fenfibles & très-faciles à écràfer. On
évite de les prendre avec les doigts, par le moyen d’une plume, avec la barbe
de laquelle on les ramaffe aifément fans les maltraiter. Si elles étoient trop
fortement attachées, foit aux branches, foit aux feuilles des plantés, en les
touchant avec cette plume fur la tête ou fur la queue, ce chatouillement leur
fait un peu quitter.prife, & donne lieu de paffer la plume deffous elles, pour-
;les enlever fans rifquer de leur faire du mal.
Ce moyen fuffira communément pour détacher & enlever les Chenilles rafes
qu’on ne peut faifir par aucun endroit fans les expofer à être bleffées : mais
pour les Chenilles velues qui ont un poil fort long, fi elles font trop tenaces,
& que la plume ne fuffife pas pour leur faire quitter prife, on peut les prendre
par le milieu du corps avec une pince qu’on appelle communément 'Bruxelles.
Il faut que ces pinces foient foibles de reffort, & que les deux lames n’en foient
ni piquantes ni tranchantes (a).
A l’aide de ces pinces ou d’une barbe de plume, on pourra conduire toutes
les Chenilles jufqu’à leur entier accroiffement, fans jamais les toucher avec les
doigts. On évitera, ou la malpropreté d’une goutte de liqueur verte que la'
plupart jettent par la bouche lorfqu’on les touche , ou l'inconvénient d’une
démangeaifon défagréable que le poil des Chenilles velues ocCalionne fur la
peau. Leur poil qui fe détache aifément, quoique très-fin, eft cependant affez
ferme pour que la pointe pénétre l’Epiderme, la déchire, y occafionne de l’enflure
(fl) La Figure de cette pince fera gravée dans le troifiéme cahier.