
Outre ceux - là qu’on trouve dans prefque tous les Infeâes ailés, il en eft
beaucoup qui en ont encore d’autres, que le microfcope fait voir abfolument,
convexes, fans aucunes facettes. Avec c eu x-c i, ils,doivent néceifairement
appercevoir les objets les plus près & les plus imperceptibles. C ’eft peut-être
la raifon pourquoi ils en ont une fi grande quantité. Sur des chofes aufii inappréciables,
on ne peut que conjecturer.
Notre intention neft point d’entrer dans le détail des Infeâes, que leur petiteffe
dérobe à nos regards-, qu’on pourroit appeller les Infeâes des- Infeâes. Nous
n’en parlons ic i, que pour faire obferver que leur nombre, ainfi que leurs efpéces,
font inappréciables. Quelques efforts que l’on fade, on ne parviendra jamais à
les connoître tous. Nous nous bornerons donc à ceux, qui, pouvant frapper nos
fens, fuffifent pour fixer notre attention, & exciter en nous les fentimens de
l ’admiration & de la furprife.
Sous ce point de vue , on peut définir l’Infeâe un petit Animal, foit qu’il
vole ou qu’il rampe, compofé de plufieurs anneaux qui, par le moyen d’une
'membrane qui les attache , peuvent s’éloigner ou s’approcher les uns des autres ;
ou de plufieurs lames -coupées, qui peuvent gliffer les unes fur les autres; ou
enfin , de deux ou trois parties principales, qui ne tiennent l ’une à l’autre que
par une efpéce de file t , que l’on appelle étranglement.
De la première efpéce font tous ceux qui, fous la forme de V er , peuvent
fe porter d’un endroit à l’autre , ou avec des pieds, ou fans pieds. Lorfqu’ils
veulent avancer ou reculer, ils allongent la membrane qui fépare le premier
anneau d’avec les fuivans : ils portent ce premier anneau -, ou celui qui eft vers
la queue, ou celui qui eft vers -la tête, à une certaine diftance ; puis retirant
cette membrane.du même cô té , ils font venir le fécond anneau, enfuite le
troifiéme, & par le même jeu, ils amènent fucceflivement tout le refte du corps.
C ’eft par un méchanifme aufii fimple, que ces .petits -individus vont & viennent,
avancent ou reculent, fortent Sc rentrent dans la terre au moindre danger.
De la fécondé efpéce, font les Mouches, les Hannetons & une infinité
d’autres, dont le corps eft couvert de petites lames qui s’allongent en fe dépliant,
ou fe raccourciffent en rentrant les unes dans les autres.
, De la troifiéme efpéce enfin, font les Fourmis, les Araignées & bien dautres
qu’on
qu’on volt partagés en deux.ou trois portions, qui femblent à peine tenir lune
à l’autre.
De ces" différentes portions ou coupures, eft dérivé le nom dlNSECTE, du
mot latin infecarè, qui veut dire couper.,
L ’ Ê tre S uprême a , en quelque façon, pris plaifir a orner la robe de ces
Animaux des plus vives couleurs. Sur leurs ailes & leurs ornemens de tête, on
voit briller l’azure , l’o r , l’argent, le verd, le rouge, & c ; franges, aigrettes,
parures de toute efpéce leur font prodiguées , & l’art n’en fçauroit approcher.
I l ne faut que confidérer une Mouche luifante, un Papillon & même une
Chenille, pour être frappé de leur magnificence.
La Providence n’a pas été moins libérale dans les diverfes défenfes quelle
leur a fourni. Elle les a armés de toutes pièces pour les mettre en état de
faire la guerre , d’attaquer & de fe défendre. Elle y a joint une dextérité inconcevable.
Les armures de la plupart font des fortes dents, des doubles fcies, des
aiguillons, des lances, des dards, des forceps, & des vigoureufes pinces. Des
cuiraffes d’écadles leur garantiffent le corps, & les préfervent du danger des
coups imprévus. Ceux qui font plus délicats font fouyent couverts au-dehors
d’un poil épais, & même de plufieurs épines qui écartent l’ennemi, ou les,
empêchent de Te froiffer. Elle les a aufii doués d’une agilité qui leur fait trouver
leur falut dans la fuite, ou les met en état d’attaquer impunément leurs plus
terribles adverfaires : ceux-ci, par le fecours de leurs ailes; ceux-là, à laide
d’un fil avec lequel ils fe fufpendent en l’air , ou fe jettent brufquement loin
de l’ennemi qui les cherche; d’autres enfin, par les refforts de leurs pieds de
derrière, dont la détente les élance loin du dangér.
Le détail des organes quelle leur a donné pour v iv re , & des outils qui
conviennent à leur profeflion, eft encore plus furprenant que celui de leurs
parures & de leurs armes.
Chaque efpéce d’Infeâe eft deftinée à une Profeflion particulière, & fes
premiers travaux font toujours des chefs-d’oeuvres. Il en eft, pour ainfi dire,
■ de tous les arts & de tous les métiers : rien ne leur manque de ce qui eft néceffaire
à leurs ouvrages. Ils les exécutent avec tant d’ordre & de précifion, que toute
l’induftrie humaine ne fçauroit les imiter.
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