parlerons tout à l’heure de ces événements; disons
d abord ce qu’était, il y a quatre ans, le Kaarta.
Le pays de Kaarta, situé sur la rive droite du
Sénégal, dont il est séparé par le Khasso, peut avoir
de 2,500 à 3,000 lieues carrées de superficie. Les
habitants qui y dominaient étaient les Bamana, que
nous appelons, nous ne savons pourquoi, les Bam-
bara. Ce peuple parle un dialecte malinké. C’était
un Etat monarchique, absolu et guerrier. La famille
régnante est celle des Massassi Courbari, réfugiés,
dit-on, du Ségou, à la suite d’une révolte de leurs
éselaves.
Il se trouvait dans le Kaarta une espèce d’armée
permanente divisée en plusieurs corps. Cet État ne
vivait, pour ainsi dire, que de la guerre, aussi était-
il regardé comme le plus puissant et le plus redoutable
de tout le haut Sénégal. Se mêlant, moyennant
salaire, aux luttes du Khasso, du Gadiaga, du Bon-
dou, et toujours dans le parti opposé à celui que
soutenait le' Fouta Sénégalais, son influence était
devenue considérable dans ces contrées. Les princes
du Bondou épousaient les filles des rois bamana.
Dans le Gadiaga, le Kaméra était étroitement allié
avec eux, les Guidimàkha étaient devenus leurs
véritables tributaires; le Khasso avait été désorganisé
par eux, et ses chefs étaient presque leurs vassaux.
Dans toutes leurs guerre les Bamana faisaient un
grand nombre d ’esclaves ; ils en vendaient beaucoup
«à 1 extérieur, mais ils en gardaient aussi beaucoup
pour en faire des combattants à la guerre. Ces
esclaves étaient fortement organisés, et formaient,
dès lors, ùne classe d ’individus puissants, qui avait
ses chefs, esclaves eux-mêmes.
Or, à une certaine époque, à la suite de mauvais
traitements infligés par le roi du Kaarta au chef de
ses esclaves guerriers, il y eut une révolte générale
des esclaves qui quittèrent le pays avec leurs familles.
Poursuivis par leurs maîtres, ils ne purent être entamés
par eux dans la forte position où ils s’étaient
retranchés ; ils continuèrent leur migration versl’est,
et allèrent renforcér le royaume de Ségou, dont s ’étaient
emparés, autrefois les' captifs révoltés des
Massassi-Gourbari, qui régnaient à Ségou-Koro.
La capitale du Kaarta, du temps deMungo-Park,
était Kemmou ; plus tard, ce fut E limané, et aujourd’hui,
c’est Nioro.
Les chefs du Kaarta, ne vivant que de rapines,
étaiënt cruels et profondément vicieux. Ce pays avait
en lui-même un ennemi dangereux; une peuplade
soninké, nommée les Djiâvara, habitait une partie
du Kaarta, où elle avait même autrefois dominé.
Subjugués par les Bamana, ils supportaient impatiemment
leur domination, et depuis une dizaine
d’années, il y avait une véritable guerre entre eux.
Al-Hadji, quand il entreprit la conquête du Kaarta
à la tête des Tôucouleur du Fouta-Dialnn et du
Fouta Sénégalais, profita de ces divisions ^ et sut
attirer dans son parti les Djiavara, en leur promettant
l’indépendance. En uné campagne (1855), il