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Symplocos, Hopea et Ciponima déjà établis, et avec lesquels elle ne forme aujourd’hui
qu’un seul genre, Mutis n’hésita pas d’établir un genre nouveau auquel il donna
le nom.d’Alstonia theæformis.
Quoique bien convaincu que ce n’étoit pas, ainsi qu’il l’avoit pensé d’abord, la
plante qui fournit le thé de la Chine, il goûta ses feuilles, vit quelles communiquoient
à la salive une couleur verdâtre, et qu elles avoient le goût du thé. Il n’en fallut pas .
davantage pour faire penser que les feuilles de l’Alstonia, préparées comme celles du
thé, donneroient une infusion tout-à-fait semblable. Cette idée étoit doublement
flatteuse*pour le savant et respectable Mutis, puisqu’elle lui assuroit une découverte
utile à tous les hommes, profitable à son gouvernement, et surtout aux habitans de
l’Amérique méridionale.
Les feuilles du Symplocos àlstonia, préparées et infusées comme celles du thé,
donnent une infusion dont la couleur, le goût et les propriétés sont bien différentes
de celles du thé, mais dont on peut, il me semble, tirer de grands avantages en
médecine, ainsi que je l’exposerai plus bas.
Pendant notre séjour à Santa-Fe, nous avons pris des infusions d’Alstonia. Mutis,
à notre départ pour le Pérou, nous donna plusieurs livres de ses feuilles; toutes ont
été employées à notre usage, à celui de nos amis et des hommes qui nous açcom-
pagnoient.
Préparées ainsi que celles du the ,• les feuilles cfu Symplocos alstonia ont des caractères
physiques différens : leur couleur est plus verte, plus vive ; elles sont beaucoup
moins roulées, d’une consistance plus forte et plus épaisse; elles se brisent avec
tant de facilité, que dans une once de feuilles infusées, il est difficile d en trouver
quelques-unes qui soient entières. Une quantité égale de feuilles d’Alstonia et de
celles du thé, donnent deux infusions différentes. Tout le monde connoît celles du
thé; celle du Symplocos alstonia est d’une couleur beaucoup plus foncée; son goût
ne ressemble en rien à celui du thé, et elle est si astringente, qu'on ne la trouve
agréable qu’en y mettant beaucoup de sucre.
L’infusion de l’Alstonia a la propriété de faciliter beaucoup la digestion, et de
rétablir les fonctions de l’estomac et de tout le système gastrique; elle augmente-la
transpiration insensible, et provoque des sueurs abondantes si on en prend plusieurs
tasses de suite.
Pendant le cours du long voyage que nous avons fait pour aller de Santa-Fe de
Bogota à Lima, en traversant plusieurs fois la grande chaîne des Andes, nous avons
passé successivement des sommets les plus élevés et les plus froids dans des vallées
profondes et d’un climat très-chaud. L’époque à laquelle nous avons fait ce voyage
étoit celle des pluies, et nous avons souvent été mouillés des journées entières. Il
est bien connu de tous ceux qui ont habité l’Amérique, que la pluie cause des fièvres
intermittentes à ceux qui s’exposent à être mouillés et qui laissent sécher leur
habillement sur le corps; cette même pluie ne cause point de fièvre aux personnes
qui la reçoivent déshabillées : aussi les Indiens, les noirs et beaucoup de blancs,
sont-ils dans l’habitude de se mettre nus lorsqu’ils jugent qu’il va pleuvoir. Il est
positif que le corps d’un individu exposé-à la pluie pendant plusieurs heures* et qui
passe subitement du chaud au froid ou du froid au chaud, éprouve de grands chan-
gemens dans ses fonctions, et que la transpiration cutanée surtout en éprouve de
très-grands. Jusqu’alors nous avions peu souffert des pluies, et nous avions assez bien
réussi à rétablir les fonctions du système cutané avec des bains très-chauds, com-
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