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graines dans chaque loge, attachées par un funicule sur les côtés
de l’angle interne de chaque cloison.
Graines ovoïdes, noires, luisantes, très-dures, munies en dehors et
près de leur sommet d’une caroncule d’une belle couleur rosée :
ombilic alongé, situé immédiatement au dessus de la caroncule.
O B S E R V A T IO N S .
Le nom de la plante que nous présentons ici vient de xeip, manus, et de sthmqn . sta-
men ,* elle est originaire de la Nouvelle-Espagne où elle forme des forêts dans la province
de Guatimala.
Lorsque l’expédition botanique du* Mexique, dont M. Martin. Sessé est le directeur,
arriva en Amérique, on ne connoissoit encore qu’un seul pied de ce végétal, que
M. de Humboldt et moi avons examiné près la ville de Toluca, distante de 16 lieues
à l’ouest du Mexique. Un arbre aussi bizarre par la disposition de ses étamines, et
dont on ne connoissoit encore qu’un seul pied, piqua bientôt la curiosité des membres
de la savante expédition. En décembre ( de l’année 1787 ) , époque à laquelle cet arbre
est chargé de fleurs, l’expédition botanique se transporta à Toluca pour y étudier cet
intéressant végétal : de suite il fut reconnu comme devant constituer un genre nouveau,
auquel on donna le nom de Chirantbodendron, qui signifie arbre dont la fleur
ressemble à une main.
J’ai cru devoir changer ce nom et lui substituèr celui de Chèirostemon, qui est
plus court, et qui exprime d’une manière plus précise la disposition des étamines.
Personne n’avoit encore pensé à multiplier cet arbre, dont on ne connoissoit qu’un
seul individu, et qui étoit un objet de curiosité pour la plupart des habitans de la
Nouvelle-Espagne. Les fleurs cueillies avec avidité par les Indiens, même avant leur
parfait épanouissement, ne permettoient point à l’arbre de mûrir ses fruits. On emporta
des boutures au jardin du Mexique; elles y furent plantées en' très-grand nombre avec
tout le soin possible, et cependant il n’y en a que quelques-unes qui aient bien réussi.
Une seule de ces boutures récompense aujourd’hui toutes les peines des professeurs de
l’expédition de la Nouvelle-Espagne; elle forme un arbre de plus de trente pieds de
hauteur, qui depuis quatre ans donne beaucoup de fleurs et de fruits. Lors de notre
séjour au Mexique, il étoit chargé de fleurs, et nous avons eu le loisir de bien l’observer.
Les graines qui viennent à un état de maturité parfaite n’ont point encore levé,
quoique M. Cervantez en ait fait semer un très-grand nombre. Nous avons apporté
ici plus de cent graines du Cheirostemon ; elles ont été partagées entre le Jardin des
Plantes, celui de la Malmaison, de Cels et de Noiset : il y a vingt-deux mois qu’elles
sont en terre, et aucune n’a levé.
Il y a tout au plus cinq ans qu’on connoît le pays natal du Cheirostemon ; c’est un
élève de l’estimable professeur Cervantez qui le premier en a trouvé des forêts près
la ville de Guatimala : je tiens ce fait de M. Cervantez lui-même, qui a bien voulu me
le communiquer.
. C H E I R O S T E M O N . 85
D’apres tout ce que je viens de dire, il est prouvé que le Cheirost.emon de Toluca
étoit le seul arbre connu de cette espèce jusqu’à l’année 1801; que cet arbre avoit
sans doute été apporté par les Indiens de Toluca,. qui conservent encore pour lui une
grande vénération, et qui sont persuadés qu’il ne peut en exister un second pied; que
le Cheirostemon, ainsi que le fameux Dracæna des îles Fortunées, est beaucoup plus
ancien que la conquête de l’Amériquë, puisque tous deux ont été décrits par les historiens
espagnols. Les auteurs qui ont parlé de cet arbre avant l’expédition du Mexique,
l’ont appelé du nom indien Macpalxochiquauhitl, composé de trois mots qui signifient
main, fleur, arbre. C’est sous ce nom qu’on le trouve dans Hernandez, à la page 531
de la seconde édition du deuxième volume de son Histoire des plantes de la Nouvelle-
Espagne. Dans le supplément de cet ouvrage publié à Rome par Nardo Antonio Recho,
il est sous le nom de Macpalxochitl, qui est le nom mexicain du Malva vitifolia publié
par Cavanilles. Le père Yetancourt, dans son Théâtre mexicain, en parle aussi sous
ce dernier nom, ainsi que le père Clavijero. Les Espagnols le nomment généralement
Arbol de Manitas, qui signifie arbre de main ou portant des mains. Tous les auteurs
cités ci-dessus n’ont point parlé du Cheirostemon comme botanistes, et la première
description exacte qu on en trouve est consignée dans un mémoire imprimé au Mexique
et lu par don Dionisio Larreategui, le i.er juin de l’année 1795, à l’ouverture du cours
de botanique que fait tous les ans le professeur Cervantez. Ce mémoire a été fidèlement
traduit, il y a un an , par M. Lescallier, conseiller d’état, dans une brochure in-4.0
de 48 pages, à laquelle se trouvent jointes deux très-belles planches en couleur.
Le Cheirostemon est un très-grand arbre, qui conserve seS feuilles toute l’année et
donne beaucoup d’ombrage; il est couvert de fleurs pendant les mois de novembre,
décembre et janvier. Il deviendroit très-beau dans nos serres, et peut-être obtiendroit-on
de lui faire passer l’hiver dans l’orangerie. Quoique j’aie placé cet arhre dans l ’ordre
des Malvacées, il ne doit pas y rester. La présence du périsperme qu’on trouvèra aussi
dans plusieurs Malvacées, telles que le Bombax pyramidalis de Linnæus, ou l’Ochroma
de Swartz et autres, exige la formation d’un nouvel ordre, que M. de Jussieu a déjà
senti, et qu’il établira dans la seconde édition de son Généra plantarum.
E X P L I C A T I O N D E S F I G U R E S .
P lan ch e X X IV Fig. 1 , un fruit de grandeur naturelle et ouvert; 2, section horizontale
d'un jeune fruit, pour montrer la. disposition des graines; 3, pistil de grandeur
naturelle porté sur le pédoncule qui est muni de trois bractées; 4, une fleur ( réduite )
fendue et étalée, pour montrer le tube des étamines et les cinq fossettes qui s'observent
constamment au fond du calice ; 5, graine de grosseur naturelle vue de côté avec' sa
caroncule; 6, idem, grossie ; 7 , idem, vue du côté du hile ; 8, idem, coupée transversalement;
g, idem, coupée verticalement, faisant voir le périsperme et la position de
l'embryon ; 10, embryon séparé et situé de manière M ce qu'on distingue les deux cotylédons.