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animaux, et qui nous fait passer insensiblement de l’une a 1 autre ; mais
nous laissons aux méthodistes à décider , puisque notre but, comme
celui d’Audebert, est seulement de faire connoître les Colibris et. les
Oiseaux-mouches' par des figures plus exactes que celles qu’on a données
jusqu’à ce jour. Les deux genres différent encore par la taille.
Les Colibris l’ont ordinairement svelte et alongée , et les Oiseaux-
mouches l’ont plus ramassée : ces derniers sont d’ailleurs plus petits
en général, quoiqu’il s’en trouve quelques-uns plus grands que divers
Colibris. Certains Oiseaux - mouches s’avancent plus au Nord , et
même le Rubis va jusqu’au Canada : les Colibris, au contraire , ne
quittent guères les Tropiques , et s’avancent rarement sous les latitudes
voisines.
Ces deux familles ont encore été confondues par beaucoup de Voyageurs
, d’après la beauté de leurs plumes 9 leur nourrituie , et 1«£
manière de se la procurer, avec les Grimpereaux d’Afrique ( Soui-mangas ) ;
mais ces derniers sont aisés à reconnoître à leur bec plus effilé et
formant un angle plus aigu, a la longueur de leurs pieds , et au nombre
des pennes de la queue 3 qui est de douze , et de dix dans les
Colibris.
Quelques auteurs ont attribué à ces oiseaux la faculté de s’engourdir ,
lorsque les fleurs commencent à leur manquer, et de passer danseet état
tout le temps de la mauvaise saison j on doit écarter ces fictions, puisqu’ils
ne manquent jamais de fleurs dans les pays qu ils habitent : le Rubis seul
pourroit quelquefois s’en trouver prive , a cause de son séjour dans le
Nord jusqu’à l’automne ; mais j’ai observé qu’il ne pouvoit supporter la
privation de nourriture sans périr '. D’autres ’ ont dit quils se nourris—
soient alors d’insectes. Celui que je viens de citer est le seul qui puisse
éprouver cette disette , soit parce qu’il auroit trop retardé son départ
du Nord, ou seroit arrivé trop tôt, soit parce que des gelées précoces
ou tardives auroient détruit les fleurs ; mais alors il périt, comme je viens
de le dire*
* Voyez son article.
* R a y , Zoologie universelle.
I N T R O D U C T I O N . *9
II y a enfin des Auteurs qui ont assuré 1 que ces oiseaux se nourris-
soient d’insectes et non du sue des fleurs , parce qu’ils en ont trouvé des
débris dans l’oesophage d’un Oiseau-mouche 5 j’en ai ouvert un grand
nombre pour vérifier le fait, et je n’en ai jamais vu dans leur estomac:
mais il est possible qu’en aspirant le miélat, ils entraînent avec leur langue
un peu gluante, les très-petits insectes qui se rencontrent dans la corolle ,
et il faut bien se garder d’en conclure que les Oiseaux-mouches soient ento-
mophages, puisque leur bec en s’entr’ouvrant ne donne que le passage
nécessaire à l’épaisseur de la langue,quiseule pénètre dans lafleur. Ce bec,
qui ne pourroit s’ouvrir assez à sa base pour permettre à l’oiseau d avaler
les insectes entiers,n’a pas d’ailleurs la solidité nécessaire pour les broyer
ou les déchirer. D’un autre côté ces alimens leur seroient insuffisans.
« La nourriture la plus substantielle, dit Buffon, est nécessaire pour
» suffire à la prodigieuse vivacité de l’Oiseau-mouche, comparée avec son
z extrême petitesse 5 il faut bien des molécules organiques pour soutenir
» tant de forces dans de si foibles organes, et fournir a la depense d esprits
» que fait un mouvement perpétuel et rapide ». Enfin, s’ils vivoient d’insectes
, certainement ils en nourriraient leurs petits , et leur en porteraient
au bout du bec, comme la plupart des insectivores, n’ayant point
de jabot pour les conserver , et l’ouverture de leur bec n étant pas ,
comme aux Hirondelles et aux Gobe-mouches , assez large ni assez
profonde pour les contenir. Ceux qui les ont observés, ainsi que je
l’ai fait, ne leur en ont jamais vu porter, et tous s’accordent a dire qu ils
nourrissent leurs petits du miel des fleurs *. J’ai été curieux de connoître
quel goût pouvoit avoir leur chair d’après une semblable nourriture,
et je n’ai trouvé aucune différence entre cette chair et celle des autres
Oiseaux ; j’ai remarqué seulement qu’elle étoit très - compacte , et
jamais grasse.
La même erreur qu’Audebert a remarquée, en traitant des Colibris ,
se rencontre encore dans la famille des Oiseaux-mouches. Celui du Cap
de B o n n e -Espérance ( Trochilus capensis de Gmelin ) ne peut être
qu’un oiseau étranger à cette famille, puisque tous les Naturalistes sont
d’accord qu’il n’en existe pas en Afrique ; ce n’est pas même un
Soui-manga , puisque Gmelin le place parmi les Colibris à bec droit.
R me semble aussi que l’Oiseau-mouche à longue queue ( vingt-quatrième
1 Badier, etc.
• Voy. l’article du petit Oiseau-mouche de Saint-Domingue.