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soucient beaucoup, tant que le propriétaire croit pouvoir les gouverner. Toutefois
ce sont de rares exceptions, et les colons qui font de pareilles entreprises, sont pour la
p l u p a r t des liommes célèbres ou plutôt décrics par leur violence et leur audace.
Il est d'autres circonstances, an conü-aire, où les propriétaires abandonnent à l'autor
i t é publique la punition de leurs esclaves; cela arrive dans les cas où elle n'interv
i e n d r a i t pas sans en être requise : par exemple, quand l'esclave a conuiiis une
c o n t r a v e n t i o n ou un vol de quelque importance. Le maître alors l'envoie au village
o u à la ville voisine cliez le Jiiiz ordinario, qui lui fait administ rer dans la prison
p u b l i q u e cent ou deux cents coups, scion le nombr e réclamé par le inailre; ou bien
o n l'enferme autant qu'il plaît à ce maî t re, lequel paie les frais de la peine, qui sont
p r o p o r t i o n n é s dans la taxe au nombre de coups que le iNégi-e a reçus, ou à la durée
d e son empr isonnement . Quand il s'agit de fautes graves, ces puni t ions sont toujours
infligées avec une sorte d e solennité en place publ ique et en la présence des esclaves
des plantations voisines. Dans les villes elles ont lieu au milieu d'un gi-and concours
d e tous les Nègres qui se trouvent dans les rues.
L a fuite des esclaves est, comme on peut bien le penser, ce qui fournit le plus
d'occasions à de pareilles scènes. Ordinairement ils ne s'évadent que de clic?, les
p r o p r i é t a i r e s qui les traitent fort mal ; toutefois les traitemens les ¡»lus doux n'cmp
è c h e n t pas ces évasions, car l'amour de la liberté est toujours très-puissant sur le
ÎVègre, cl il ne faut parfois qu'une très-petite cause pour lui faire prendi' e une résol
u t i o n précipitée: mais le repentir parle bientôt, et ramène souvent le fugitif chez
u n ami de son maî t re; il en obtient une lettre dans laquelle on implore la grâce
d e celui qui rentre volontairement au logis. Quand les esclaves possèdent de quoi
r a c h e t e r leur liberté, et que cependant on la leur refuse, ils p rof i lent ordinairement
d e la p remièr e occasion de s'évader, et il est fort diiTicile de s'assin-er d'eux.
O n pourrait croire que dans un pays comme le Brésil, il doit être presque
impossible de ressaisir un ^"ègre fugitif : cependant il arrive bien rarement
q u e l'esclave échappé ne soit pronqitement rejiris. On doit cetie facilité avec
laquelle on s'en remet en possession ù rinstitution des Capitacs clo Mallo. Ce
n t des Nègres libres qui jouissent, d'un traitement iixc, cl ([ui sont chargés de
p a r c o u r i r leurs districts de temps à autre, aiin de s'emparer de la personne de
tout Nègre errant, et de le reconduire à son maître, ou, s'ils ne le connaissent
pas, à la prison la plus voisine. La capiui-e est ensuite annoncée par une afFiche
apposée à la porte de l'église, et le propriétaire est bientôt trouvé. Souvent ces Ca-
¡Hlaes do Multo se servent pour leurs recherches de grands chiens qui sont dressés
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à cet usage. Les Nègi-es onl d'ailleurs à redouter les Indiens et la làim; aussi ne se
d é t e r m i n e n t - i l s guères à pénétrer fort avant dans l'intérieur du pays ni à se perdre
dans les forêts. Ils se t iennent donc p resque toujour s dans le voisinage des l ieux habités:
o r , on ne tarde pas à s'apercevoir qu'ils sont fugitifs, soit parce qu'on les connaît,
soit par cela môme qu'on ne les connaît pas; enfin c'est précisément parce que le
n o m b r e des habitans est fort pet i t que ces évasions réussissent si r a r ement , bien qu'au
p r e m i e r aperçu celle circonstance semble devoir les favoriser. La punition d'un esclave
fugitif esl entièrement abandonnée à l'arbitraire du maître.
Q u e l q u e f o i s plusieurs Nègres s'évadent ensemble et parviennent à se procurer
des armes à feu : alors ils peuvent réussir à trouver un asile dans l'intérieur des
bois, à se nour r i r de leur chasse et à se dcfendi-e contre les Indiens. Assez fré([ucmm
c n t ces hommes, appelés Nègres des bois {¡Segros do Mallo ou Cajamlolas) se
l o r m e n t en troupes plus nombreuses, exercent le brigandage sur les gi'ands chemijis
e t attaquent les voyageurs isolés, les tropas, les caravanes ou les plantat ions qui font
le commerce de l'intérieur avec la côte. De nos jour s il est rarement arrivé que ces
Nègres des bois aient causé des inquiétudes sérieuses, comme celles qu'inspirent dans
les colonies anglaises les Maroous. Les insui-rections de Nègres out été également
r a r e s au Brésil, et n'y ont jamai s eu une grande importance.
11 est un liiit remarquable dans l'histoire des Nègres d u Brésil : c'est la fondation
d e la ville de Palmares au milieu du dix-septième siècle. Cent ans auparaiant quelques
troupes nombreuses de Nègres fugitifs s'étaient réunies aux environs de Porlo-
Calvo dans la province de Fernambuco, et y avaient formé un établissement; mais
ils furent bientôt repousses pai- les Hol landai s , qui occupaient alors Fernambuco. Cela
n ' e m p ê c h a pas qu'en i65o il n e s'élevdt encore dans la m ême conti-ée un établissement
d e Nègres fugitifs sous le nom de Palmares. Ils enlevèrent toutes les femmes dont
ils purent s'enq^arer, soit qu'elles fussent blanches soit qu'elles fussent de couleur,
e t bientôt leur nombr e s'accrut tellement que les colons des p rovinces voisines jugè r ent
plus p r u d c m de traiter avec eux pour se préserver de leurs rapines , que d'avoir recours
à la violence pi.)iu' les expulser. De la sorte ces Nègres par\'inrent à se procurer des
armes et d'auU-es marchandises d'Europe en échange des jn-oduits des ibrcts et de
leurs propres plantations, et peu à peu l'agriculture et l'industrie vinrent remplacer
u n genr e de vie consacré au brigandage. Après la mor t de I lombé , leur premier chef,
ils s'organisèrent en royaume électif. Leiu- religion était u n mélange de christianisme
e t de leur ancien fétichisme. Après cinquante ans d'existence la populat ion de i'al-
•es s'était accrue jusqu'au nombre de ao,ooo habitans. Un abbalis ])rolégcait la
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