. i
.M
W
( lo )
édifices des ibiirmis .nTÔlent aussi le regard de l'élrangev. Un bonrdonncineiiL conlinucl
ei niysiéi-ieux vieni augmcnlcr encore l'ivresse qui s'empare de lui, ei cependant
o n distingue le cla([iiemcnL de bec d u toucan, puis les sons nielalliques de l'urapotiga,
semblables au bruil du marteau sur l'enclume^ les cris plainliis de l'aï, les nuigissemens
d'une espèce dénormes grenouilles; enfin, le cri des cicades, annoncent les
approches de la nuit. Les insectes luisans répandent des étincelles par myriades; et,
c o m m e des spectres lugubres, les cbauve-souris, avides de sang, proniènenl dans
l'obscurité leur vol pesant; le rugissement lointain des tigres, le bruissemcni des
fleuves, le craquement des arbres renversés, interrompent par intervalles la solenniie
d u silence.
L a nature inanimée el le-même est on liarmonie avec ces grandes images oflertes par
les forêts primitives de la Serra-do-Mar. S'il arrive que d'un point plus élevé ou plus
dégagé l'oeil puisse s'étendre jusqu'aux montagnes, letn-s masses hardies se dessinent
sur les chaînes gi-anitiques de l'inlérieur; et dans les forâts même on voit souvent
des blocs de rochers porter sur leur cime aplatie des parterres des plus belles ileurs.
Plus on avance dans ces forêts, et moins il y a d'ouvertures ; on peut y marcher
l'espace de plusieurs jour s , et le ciel se mont r e rarement à travers les voûtes aériennes
dont la verdure recoun-e le voyageur. L'ame se sent en quelque sorte fatiguée,
oppressée; on réclame la vue du firmament, on veut revoir les constellations qui
j u s q u e sur une mer ennemie sont la consolation et l'espérance du navigateur.
E n f i n , l'horizon s'agi-andit : on quitte pour les collines de l'intérieur ta nnit épaisse
des forêts; on respire enfin l'air des montagnes, et l'on salue le firmament. Les
habitans ont nommé ces contrées campos ^eraes, à cause de leur immense étendue.
Ces campos, quand on arrive de l'est sur les montagnes, présentent dès l'abord do
grandes diversités de teiTains, et, semblables aux Alpes antérieures du Tyrol et de la
Suisse, elles forment de vastes vallées, où les bois se mêlent aux prairies, oti sont des
précipices affreux. N'otrc planche 4 en tlonne une idée jiar une vue de la Serra-do-
O u r o - B r a n c o . La végétation perd son caractère à mesure (¡u'on s'éloigne des forêts
primitives : celles-ci sont d'abord entourées d'une lisière de bosquets en Heurs,
surmontes de palmiers et d'arbres à fougères. O n voit des groupes d'arbres à écorce
épaisse, à branches séparées et de courbure diverse, à feuilles sèches et d'un vert pâle,
e t , parmi ces gi-oupes, les formes grotesques du cactus et des pins, dont les brain'hes
jet lent autour de l'arbre une voûte itupénéirable au jour. Ces pins sont du coté des
campos les avant-posies des fi)rêls vierges, conune les palmiers vers la côte.
Mais, en |iénétranl dans l'intérieur, le aoyageur dépasse bientôt cette région de
( )
])0squcts (tabolciros) : ils s'éclaircissent; les gi'ands arbres s'isolent, et des collines
riches de gazons et de ileurs se prescnlcnt à la vue. Cependant on ne pourrait les
appeler du noni de prairies, et leur caractère est tout différent de celui des steppes
d e l'ancien monde. Il est rare que celles des campos gerac-s soient étendues : le plus
souvent on n'aperçoit que les coHines dont on est immédiatement entouré; et, tandis
que dans les steppes de l'Asie d'innnenscs régions appartiennent à quelques familles
d e végétaux, les campos geraes conservent la variété des couleurs et des formes que
l ' on remarque dans les forêts priiniti\es, ce qui tient lieu de l'agréable verdure des
prairies d'Europe. Entre leurs herbes fnic.s, ])àles et sèches, de nombreuses espèces
de rubiacécs et de malpighies couvrent le sol de leurs fJetirs variées, tandis que des
arbres à fougères s'élèvent parmi les liliacées : les congonlias et les acajous nains
f o r m e n t de petits bois. Le sol est d'une argile dure, couverte de débris de quai?..
Des roches parfois traversent cette mer de collines, sous la forme d e tours, d e murailles
et de créneaux; et, quand les rayons du soleil frappent leurs faces micacées, ces
roches brillent d'un éclat superbe : elles arrêtent le cours des Heuves, et les forcent
souvent à s'échapper de chute en chute, ou de changer en étangs le font! des vallées.
L e règne animal prend ici un caractère plus calme, et qui fait contraste avec la
variété et le mouvement des espèces dans les forêts vierges. De petites ti-oupes d'autruches
courent dans les broussailles, tandis que des oiseaux du genre de la poule y
cherchent leur nourriture. Sur les cimes se posent le toucan aux ailes variées, le
tanagran à coulciu' rouge, et le cahoa, qui guette le.s serpens lorsqu'ils \iennent dérouler
letn's anneaux au soleil. Ce n'est que rarement que des ti-oupes de perroquets,
arrivant des forêts ou retournant vers elles, interrompent de leurs cris désagi-éables
le silence des collines.
L e voyageur ne doit s'attendre à retrouver des hommes et des ouvrages humains
qu'aux extrémités de ces campos : là sont ([uclques demeures éparses et quelques
plantations, ou bien les cabanes de pâtres qui conduisent d'innombrables troupeaux
de vaches et de chevaux. De lemj)S à autre on rencontre de longues caravanes de
n u i l e t s , qui entretiennent le connnerce entre les provinces des pâturages et des
mines et celles de la côte. Dans la province de Minas-Geraes et dans une partie de
c e l l e de Goyaz les excavations et les terrasses produites par l'exploitation de l'or,
ajoutent une particularité de plus au caractère général du ]iays. O n voit sur la cinquième
planche une partie des campos de la province de Minas-Geraes. Le Rio-das-
Velhas arrose la contrée, et dans hr lointain s'élève la Serra-Coral-de-El-Rey.
Il fiiut accorder une mention particuUère aux marais et aux lacs qui se trouvent