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naux des diíTcrences pi'ononcées, elle s'explique encore au moyen d'autres diíTcrenccs
qui existent dans la position des colons eux-mimes.
Les dcfauls du caractère national des Espagnols et des Portugais contribuent peutêtre,
autant que ses qualités, à adoucir la condition des esclaves dans les parties de
l'Amérique où se sont établies leurs colonies. Tout liomme qui a observé longtemps
et avec impartialité ces deux nations doit demeurer convaincu que, quelles
que soient les différences qui les distinguent entre elles, la niasse du peuple est
plus facile à émouvoir et plus véhément e dans ses passions que les nations septentrionales
: or il ne peut être question que de la niasse, quand il s'agit de comparer entre
eux des caractères nationaux. La facilité avec laquelle ces peuples reçoivent toute
sorte d'impressions, et la force même de ces impressions, ont leur source dans
une sensibilité plus exquise, dans une organisation plus délicate j qualités qui les
préservent de l'impassible rudesse, résultat ordinaire de l'àpi-eté du climat, contre
laquelle il faut que les nations septentrionales luttent sans cesse. Cette rudesse, il est
vi-ai, peut , au moyen de la civilisation, produire les plus nobles vertus, tandis que
sous un ciel prodigue de ses biens, l'habitant du Sud n'a pas besoin de faire de
ses facultés intimes un emploi journalier, et que, pour cette raison, il semble
paresseux et indiiTérent, jusqu' à ce qu'il soit excité par un événement particulier;
mais quelque échec qu'en doivent éprouver les idées reçues et une vanité peut-être
excusable, l'observateur impartial ne pour r a s'empêcher de reconnaître que l'habitant
(lu Midi apporte dans ses relations journal ières et dans les circonstances ordinaires
de la vie une certaine douceur, de la politesse, de la souplesse d'esprit, enlin cette
humanité entendue dans le sens le plus large de ce mot et qu'on chercherait en
vain dans l'Iiomnie du Nord et surtout chez l'Anglais. Le colon portugais et le colon
espagnol, qui sont capables des plus grands eiTorts pour les travaux du corps comme
pour ceux de l'esprit, quand la nécessité l'exige ou que des circonstances majeures
enflamment leurs passions, n'ont nulle vocation pour cette inlhtlgable activité, pour
celte application journal ière, que les nations septentrionales mettent au nombre de
leurs vertus. Ces colons n'exigent point d'autrui les qualités qu'ils n'ont pas euxmêmes
et, proportion gardée, ils ne demandent pas plus aux esclaves que les
exemples qu'ils donnent eux-mêmes ne les y autorisent.
Les travaux des esclaves au Brésil sont à ceux des esclaves des colonies anglaises
à peu près comme les travaux des hommes libres de l'Angleterre à ceux des hommes
libres du Brésil ou du Portugal. Quelque désavantage que sous d'autres i-apports il
puisse résulter de ce laisser aller et de celte négligence, elle ne peut manquer d'in-
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iluer d'une manière favorable sur la condition des esclaves, La liberté qui règne chez
les maîti-es dans toutes les relations et pour toutes les classes de la société, ne leur est
pas moins propice; elle d iminue beaucoup les désagrémens inséparables delà servitude.
Enfin, ce qui est d 'un plus grand poids dans la balance que les qualités de leurs maîu-es,
c'est que ceux-ci sont pénétrés des idées les jîIus religieuses. 11 n'y a nul doute que
le calholiclsme, tel que le pratiquent les Portugais et les Espagnols, ne contribue
plus que toute autre chose à rendi-e l'esclavage supportable autant que peut l'être une
condition aussi opposée à la nature. Ce n'est point ici le lieu d'expliquer pourquoi
le christianisme n'a pas eu partout des efTets aussi salutaires? Il suffira de rapporter
un fait, c'est que dans les colonies anglaises les ministres du culte anglican ont iàit
Jusqu'à ce jour peu ou même rien du tout pour l'instruction morale et religieuse
des esclaves; et même les efforts de quelques prêtres sectaires, loin d'être favorisés
par l'Autorité ou par les colons, ont souvent éprouvé la résistance la plus opiniâtre.
I.e sort du missionnaire Smith à Denierary sera une tache éternelle dans les annales
des colonies anglaises. Cette manière si peu chrétienne d'entendre le clirisilanisme,
l'esprit d'aristocratie et le peu de liant que les Anglais apportent dans leurs relations
sociales, enfin les spéculations sans fin auxquelles se livre celte nation, rendent plus
large et plus profond qu'il ne le serait d'ailleurs le gouffre qui sépare les maîtres des
esclaves. Il y a de la part des premiers envers les seconds un mélange d'a>^arice, de
mépris aristocratique des races étrangères, et même d'orgueil religieux : le colon
pense que le manque de croyance ou la croyance erronnée de son esclave ne lui
donne pas moins que ses vices le di-oit de l'ojiprimer et de l'exclure des biens les plus
ordinaires de la vie; Il ne daigne pas même réfléchir que lui-même a fait naître ces
vices dont II se prévaut , ou du moins qu'il ne fait absolument rien pour les corriger
au moyen de la morale et de la religion. Ces remarques ne peuvent ])araître sévères
qu'à ceux qui ne connaissent pas les débats et les négociations auxquels ont donné
lieu, en Angleterre, les refus opiniâtres des colons de faire la moindre chose pour
améliorer la condition de leurs esclaves sous les rapport s physiques et moraux.
Le colon du Brésil, au contraire, regarde comme son premier devoir d'admettre
l'esclave dans la société chrétienne; s'il le négligeait, rien ne pourrait le soustraire à
la flétrissure que lui Imprimerait à la fols le clergé et l'opinion publique. La plupart
des esclaves sont baptisés sur la côte même de l'Afrique avant leur embarquement,
ou le plus tôt qu'il est possible de le faire après leur arrivée au Brésil, et dès qu'ils en
ont appris assez de la langue de lein-s maîtres jiour réciter les principales prières du
culte cadiollque. On ne les consulte pas sur ce point , et l'on regarde leur admission au
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