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plus grandes violences et les crimes les plus atroces, jusqu'à ce qu'enfin ils se fussent
alliré la colère d'une famille inOuenle, et que celte (àmille, pour obtenir salisfaclion,
invoquât la puissance des lois et la force jaiblique : ou bien ces excès duraient jusqu'à
ce qu'un particulier sût opposer la force de son caractère à leur audace. Dans uii pays
comme le Brésil, l'inlluence de la religion et celle du clergé doivent être grandes, et déjà
elles ont produit les plus heureux cflcts, surtout à la campagne. Il serait même inulile
de tenter sur les colons aucune espèce d'amclioralion, soit morale, soil matérielle, sans
le concours du clergé. Un séjour de quelque durée au Brésil, des liaisons plus particulières
avec les colons et avec les ecclésiastiques de campagne, donneront à tout
observateur non prévenu l'idée la ])lus favorable des qualités personnelles de ces
derniers. La position sociale de ces prêtres est un trait des plus beaux et des plus
caractéristiques de l'état moral des colons du Brésil : ils sont les conseillers, les amis
des familles, les consolateurs, les protecteurs des o])primcs, les conciliateurs des différends
et des inimitiés. Partout on les reçoit avec confiance, partout oji les honore. La
conversation est le seul délassement de la vie des colons, et comme ils n'ont point de
connaissances et que leur esprit est fort peu cultivé, ce sont les événcmens que la journée
a fait naître dans la fiuuille, cliez les voisins ou dans le disirict, qui fout tous les
frais de l'entretien. Au milieu d'un genre de vie si simple, ces sujets ont assez d'importance,
et leur intérêt se trouve dans l'esprit naturel, dans la vivacité, dans le caractère
des interlocuteurs. Il est rare que parmi les meubles d'une plantation il ne se trouve pas
une mandoline : la musique et la danse viennent à leur tour égayer la vie domestique.
La monotonie de (xMte existence n'est guère interrompue que par les fêtes
d'Eglisej elles ont d'autant ¡»lus d'importance qu'elles sont une occasion de réunion
pour lous les colons de la contrée 5 ils y viennent terminer leui's alliiires et en
négocier de nouvelles. Rien n'est plus animé que le dimanche dans un aldca ou
dans une petite bourgade qui possède l'image révérée d'un saint. Les familles
de colons y arrivent de toutes parts. Les hommes viennent à cheval, les dames
également à cheval ou dans des hlières que portent des mulets ou des esclaves.
Les grandes fêtes de l'Eglise sont célébrées avec beaucoup d'appareil ; il y a des
feux d'artifice, des danses et des spectacles, qui rappellent beaucoup les premiers
essais itiimifiues, et dans lesquels les gi-ossière.s ¡.laisanleries des acteurs satisfont
pleinement les spectateurs. Dans ces occasions on n'épai'giic point les lir|ucui'S spiritueuses:
toutefois, si les assistans ne se contiennent pas loujours dans les bornes do
la tenipérance, les excès et les violences qu'une pareille conduile amène chez la
plupart des nations de l'Kurope, soul inlinimcnt plus rares. L'ivresse est beaucoup
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plus « . ( u e n t c , ses co™é,„o„ccs se présenlcnt beaucoup plus souvent chez les esclaves
e, davantage encore cl.e., les Indiens, pourvu qu'ils .rouvent l'occasion do prendre
part a ces lites, ce qui est dautaut plus aisé qu'on , exerce l'I.ospitalité la plus étendue;
car les frais de la file sont supportés à tour do rôle, tantôt par un, tantôt par
plusieurs des plus riches colons. C'est l'ecclésiastique du lieu qui les désigne, et ils
tiennent ce choix à grand lionuenr.
l'otn- faire goûter les bienlhits de l'Église au. plantations les plus lointaines et les
plus solitaires, ainsi qu'aux esclaves qui les habitent, il est des prêtres qui i, certaines
époques de l'année parcourent le pays avec un petit autel, qu'ils placent devant eux
sur leur cheval on sur leur mulet. Au mojen d'une légère rétribution, ils disent la
messe dans les maisons des colons et des pitres. Il , a une autre «pcce de prêtres
errans, qui ne sont pas néanmoins des plus considérés; ce sont des hermiles, qui
bâtissent une cabane dans un entli-oit sauvage quelconque, pour y exposera la vénération
des crovans une relique qu'ils sont parvenus à se procurer. Si les pèlerins ne
viennent pas, ils ,,arcoureut le pajs, et quoiqu'ils reçoivent en l'honneur de leur
saint des aumônes considérables, ils ne paraissent pas se Her entièrement à sa protection,
et se munissent le plus souvent de moyens de défense très-matériels. Lorsqu'un
de ces dignes frères monte un bon cheval ou un mulel, et que, sa cassette de reliques
sous le bras, il parait armé d'un fusil, de pistolets et d'un large couteau de chasse, cet
extérieur n'est pas précisément très-propre 4 inspirer la piété à ceux qui le renconlrent :
la peur et la défiance sont plus naturelles en cette occasion, et ces sentiuiens, trèsopposés
à celui de la piélé, jiourraient n'être jias toujours dénués de fondement.
Les ficendas tic triaz ou les paturages sur les collines dépouillées de forêts des
hautes regions de l'intérieur, méritent qu'on en lasse une mention particulière. Les
plus remarquables sont ceux des provinces de San Paulo et de Minas Gcraes.
Ceux qui apparlieuncnt à un même propriétaire ont souvent une étendue de plusieurs
U'^oas, et souvent aussi le nombre du bétail, soit en clie\aux, soit en betes à
cornes, .s'élève i plusieurs milliers. Cependant il esl rare que les grands propriétaires
de lrou|icaux habilont as Jhcenrias ; ils en abandonnent le soin i un fermier, qui
partage avec eux les proditits dans une proportion donnée. Ce genre d'industrie est
Irés-lucratif, le propriétaire ne pouvant connaître au juste ses afiiiires. La garde des
troupeaux est l'ainiire d'un pâtre supérieur {vafjueiro) et de plusieurs valets (piaes):
ncanmoiiis ils soul tous libres. On se sert fort peu d'esclaves dans ces contrées, et
on ne les emploie iju'au.v petits ouvrages domestiques.
La \ie de ces im/iieira.f est encore plus retirée, plus gi-ossière que celle des
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