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Ici le gi-and caractère de Vicira se monira sous une nouvelle face : sans murmurer
il remit le commaudement au générai nommé par son roi, cl fil preuve du mime
zèle, de la môm(; abnégation de soi-mome, en se résignant à obéir dans un poste
ini'érienr; en un mol, il fiil Ici qu'il avait été quand il dirigeait l'entreprise. En i648
les Hol landai s Curent vaincus dans une bataille décisive à Guararapi près d'Ol inda, et
ilcpuis lors, quoiqu'ils eussent reniporle des avantages partiels, quoique lem* général
Sigismond fiU vaillant et expérimenté, leur domination marcha rapidement vers sa
fin. Olinda fut reprise en i653, et l'année suivante les restes des ibrces hollandaises
se virent enfermés à Recife. P o u r cette dernièr e a t taque, dest inée à c o u r o n n e r l'oeuvre,
Vieira, ce généreux guerrier s'adjugea le poste du péril et de l'iionncur; le 17 Janvier
1655, après une valeureuse résistance, le clief hollandais fut obligé de rendre
Recife aux pati-iotes et de quitter le Brésil. Vieira reçut de son roi les récompenses
(pie les cours et les princes peuvent décerner à un grand h omme , et sa patri e reconnaissante
le salua libérateur du Brésil. .
O n nous blâmera peut-être d'avoir consacré ces pages à lionorer la mémoi r e du
plus grand homme que le Brésil, que l'Amérique môme puissent nommei - dans leur
première litsLoire, d'un homme qui, sans préjudice pour sa réputat ion, peut être
compai'é aux plus célèbres de noU'c époque. Quel que soit le cliarme de cette nature
si grande, si riche du Nouveau-Monde, quelque impression qu'elle ait faite sur
n o t r e esprit, le souvenir des grands hommes qu'elle a produits, des nobles actions
dont elle a clé témoin, lui donne une ame, lui communique une importance qui
la met en rapport plus intime avec nous-mêmes. L'intérêt du présent, l'état actuel
d u Brésil nous occupent davantage : mai s cela n'empêche que les Brésiliens n e soient
ennoblis par la gloire d e leurs aïeux. Ces faits anciens expliquent d'ailleurs beaucoup
d e choses actuelles; ils servent aussi à résoudre des questions d'avenir. Serait-ce
à dire qu'un ouvrage dont le but principal est de décrire la nature et l'état social du
Brésil, ne pût faire aucun retour sur un passé si glorieux pour ce pays? celle noble
consécration de la gloire nationale serait-elle interdite au crayon fugitif de l'artiste?
Depuis que Pernatnbuco a été délivré du joug hollandais, jusqu' à nos j o u r s , l'histoire
de ce pays n'oiTre rien qui soil digne d'allention ; mais les événemens récens
ont démontré que l'esprit d'indépendance s'était développé au Brésil dans la même
proportion que la j)rospérité de ce pays. Sa naissance remont e à ces icmps de lutte
dont nous avons retracé l'image, et l'avenir d u Brésil paraî t devoir ressentir l'inilucncc
d e ces dispositions des iitihitans. Dans le Nouvcau-iMonde aussi noti'c siècle a déclaré
les peuples majeurs : la voix du prince a confirmé celte vocation en les appelant à
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b connaissance Je leurs affili,-es, « ce. esprit J'inJépenJance s'esl manifesli dans
les provinces septenlrionalcs du Brésil et surtout à Fernambuco.
Tandis qne l'opinion publique dans le» provinces méridionales du Brésil et dans
la plus grande partie du pavs réclamai, de plus en plus leur séparation d'avec la
métropole, Pernamhuco de son côté demandait non moins vivement à s'isoler du
gouvernement central du Brésil. Des mouvemens qui , furent suscités en 1817 par
Marini,0, l'insurrection de ,824, à la tête de laquelle se trouvait Cavalho, étaient
sans dout e l'onwage de quelques ambitieux ; mais ce serait une e r reur dangereuse de
nier que l'esprit du fédéralisme, qui gagne de plus en plus en Amér ique, n'ait fait de
ti-ès-grands progrès parmi les habitans de Fernambuco et parmi ceux de Bahia Quoi
qu'il en soit, et quelque jugement que l'on porte sur les causes de ces agitations, il
est un fait incontestable; c'est que dans la malheureuse défense des habitans de Fernambuco
contre les troupes impériales en ,8=4, les habitans ont fait jirenve d'une
gi-ande valem- et se sont imposé des sacrifices dignes de la meilleure des causes et
d'un succès different. Les citoyens de Recife et d'Olinda couvrirent de leurs cadavres
les positions que leur avaient confiées des chefs inexpérimentés; ils ont montré qu'en
eux n'était point encore éteinte l'ardeur de leurs ancêtres. Si cet esprit, si les
excellentes dispositions qui distinguent le caractère des Brésiliens du nord sont les
garanties de l'avenir d u pays, d'un autre cite il faut bien reconnaître que l'égoïsme
des che& de parti, leur peu d'intelligence, l'aveuglement et la faiblesse du chef du
nouvel Etat pour raient faire ressortir de ces mêmes dispositions le g e rme qui produirait
les fruits les plus amers. Puisse le dominateur actuel de ce beau pays résoudre
encore cette difficile quest ion ! Puisse-t-il s'épargner à lui-même, à ses successeurs et
surtout à son peuple, les terribles épreuves qui paraissent le menacer encore!