pub lics, et par quelques ustensiles qu’on retrouve dans le sein de la terre. Aristote prétend qu’il n’y avait anciennement
qu’un petit nombre de Panegyries qui avaient lieu surtout après la moisson e t pendant la vendange, où l’on croyait honorer
spécialement les dieux en s’enivrant; mais, dans la suite, le nombre des fêtes devint considérable. L e s Athéniens
surtout en étaient insatiables; ils en chômaient à eux seuls deux fois plus que partout a illeu r s , sans diminuer rien de
la magnificence e t du cérémonial; , ' , "v' •
Cependant une civilisation toute pure et tout intelligente s’élevait au sein de l’école de Platon, e t, quoique de nos
jou rs on ait fait l’apologie d ’Anytu s , la vertu de Socrate passera sans tache à la postérité la plus reculée. Les dieux
de l’O lympe, dont il ébranla le culte, ainsi que leurs autels étaient à peu p rès déserts quand Aristophane disait à leurs
ministres tombés dans le denûment d’agréer la-portiort légitimeque leur offraient les passants, chose qui était lo in-d’égaler
les hécatombes parfaites qu'on offrait à Phoebus, Apollon. I l y eut des restaurations- sous Hadrien; mais
elles ne servirent qu’à constater un état de choses qui ne devait , n i ne pouvait plus exister. Le temps ne rétrograde
jamais.;.
Pour.rendre les .Grecs humains,* et civiliser ce peuple, d’a utant plus; cruel qü-ibétait-plus sensible* ses 'législateurs
s’étaient.¡emparés de son imagination p ar l’attrait du merveilleux;* et de ses sens- p ar le charme de la mélodie et des
vers. L a musique et la poésie animèrent, toütèsi les parties de la prédication'publique, e t les sages, dominant -la multitude
,. dont ils n e partageaient pas les erreurs v joignirent ainsi à leurs leçons une autorité q u i avait quelque chose
de: divin- Lycurgùe,. défendit qu’on écrivit ses constitutions ; et voulant que les jeunes gens les apprissent p ar coeur , il
est probable qu'on ,les m it en v e r s , e t peut-être en musique, afin de les graver plus facilement dans la 1 mémoire. Dans
la suite des temps, lorsqu’on porta de nouvelles lo is , on eut soin de faire intervenir des poètes pour les rédiger en
distiques. Il est probable, .que Solon nleut pas la même prévoyance que le législateur lacédéindnien*ear Aristophane,
qui. est is.ujet à ise moquer -des lois du b o n v ieu x tem p s , d it qu’o n se servait des çyrôe?',-ou -morceaux de bois* sur
lesquels, elles, étaient, écrites, pour -faire des fr itu r e s dans les foyers domestiques.
O n v o it, p ar cet aperçu, .comment, la Grèc e. entra dans, l’o rdre sçcial;- quels-fürent. s e s 'p ro g r è s • au sortir de
la barbarie; -à . quel degré de splendeur elle s'éleva, dans la carrière de tous les genres1- d e gloire; -et pourquoi le s
Romains , qui l'asservirent , n’attentèrent , jamais à s o n illustration. Ils pensaient que dans les premiers moments d ’esclavage,
l’esp rit des. Grecs-, encore,,vivifié, par le souvenir de l a liberté perdue* était dans un état d’a g itatio n, assez
semblable, à celle, des .eaux de la-mer. après la tempête, .et ils leur abandonnèrent les lauriers des-Muses-,-pour les
empêcher.d’abaisser les yeux,sur leurs chaînes;-
C ’est dans cet esprit que Serviûs Sulpicius parle des Hellènes dans une lettre écrite à-Cicéron voyageant'dans la
Grèce. Cette épître élégiaque nous rappelle, av ec le d é clin 'd e la grandeur de Rome, l ’état malheureux de la patrie des
Muses. <t Je ne puis oublier, écrit-il à T u lliu s, une réflexion qui m’a beaucoup soulagé* pour diminuer votre affliction:
« A mon retour d ’A sie, je faisais voile d ’Egine vers Mégare : j ’a i fixé les yeux sur le pays q u i était1 autour de moi.
« Égine était derrière, Mégare devant, le Pirée sur la droite e t Corinthe à ma gauche * villes autrefois célèbres et floris-
a santés, qui sont.aujourd’hui renversées e t presque ensevelies sous leurs ruines. A cette vue-, je n'ai-pu m’empêcher
a de tourner mes pensées sur moi-même. Hélas! disais-je-, comment nous agitons-nous, pauvres -mortels! Comment
« nous livrons-nous amèrement à la douleur p our la* mort -de nos amis * dont la vie est si ; cour te , . tandis que les cadavres
a de tant de villes fameuses sont étendus devant nos yeux, sans forme et- sans v ie! »
L e Péloponèse, au temps de Strabo n, avait été tellement dévasté par les armées romaines, que la plupart d e s villes
étaient d étruites, et qu'il restait à peine des notions sur l’emplacement qu’elles avaient oCcupé. I l se plaint des difficultés
qu’i l a.eues pour supputer les mesures qu’il en donne, d ’après les divers auteurs qui les avaient rapportées; tant il
existait déjà d’incertitude sur les dimensions topographiques d e cette contrée d'éternelle mémoire. Ravagé postérieurement
p a r le s Barbares, le Péloponèse devint presque fr u s te pour les rechercheshistoriques;- e t c’est maintenant dans ses campagnes,
sous les fougères d e ses landes, au milieu des forêts, deshalliers de m yrtes e t de romarins, au fond dés tombeaux
et parfois au milieu des.eaux stagnantes, qu’il faut chercher les traces de sa-splendeur éclipsée.
Un des plus savants\géographes de .no tre â g e , M. Gossellin, nous a donné les distances de Strabon' pour servir
de base à la confection d’une carte ancienne de la Hellade; mais, grâce à la' commission savante envoyée eh Morée, et
auxofficiers. du corps du génie français, on pourra agir désormais d’une manière précise: On procédera'alors avec
régularité du connu, vers le conjectural/ et- l ’on dégagera ainsi Vinconnue;
L a Corinthie, d’après,les anciennes délimitations, s’étendait au-delà de l'isthme, et une colonne; placée en deçà de la palestre
de Cercyon, indiquait, de ce côté, les frontières de la Mégaride et de l'Attique. En redescendant vers Cenchréè,
e lle s e prolongeait jusqu’au cap Spirée; et les montagnes de Gléones, ainsi que la rivière de Némée, la bornaient au
midi et à l ’o ccident
L ’Argolide se projetait depuis le défilé du T ré té jusqu’au mont Pam on e t au mont Artémisius, qui la séparaient,
le dernier de l’Arcadie et le.premier de la Laconie. V e rs le golfe Saronique, elle comprenait l ’E pidaurie, laT rézénie et
l’Hermionide. Tels étaient les états héréditaires d ’A gamemnon, auxquels plusieurs géographes ajoutent Ég in e, Calàurie,
Hydrea, Tiparenus , Éphyre, Pityouse et l ’éçueil d'IIaliousa.
Au revers des monts Pam on et Borée, commençait la Laconie. Enveloppée p ar la chaîne d u mont Gromius, qui
donne naissance à l’A lphée et à l’Eurotas, elle était bornée à l ’occident par le Taygète et baignée, dans les autres limites,
par les mers de Gythère et de Myrtos.
L a Messénie,'bornée par la Laconie, l ’Arcadie et l’É lid e , riche d’un territoire fertile, maîtresse d’un golfe spacieux,
de ports vastes et bien abrités, eût été la province la plus favorisée du Péloponèse, sans le voisinage des Lacédémoniens,
jaloux de toute prospérité étrangère.
L a sainte Elidefaÿait pour frontières la Messénie, l’Ach aïe , l’A rcadie et la mer Ionienne.
L ’A chaïe; à jamais célèbre par sa lig u e , qui fut le dernier boulevard de la liberté des Grec s, terminait à
l’occident et au septentrion la presqu’île de Pelops que la mer des Alcyons séparait de la Locride et de la Phocide;
enfin la Sicyonie, patrie des plus célèbres artistes, située à l’extrémité orientale de l’Achaïe, était à peine aperçue entre
le territoire de cette contrée et celui de la Corinthie.
Au Centre de ces provinces brûlantes s’élevait, comme la coupole d ’un vaste édifice, la pastorale Arcadie.
Couroimée de montagnes ombragées de forêts, parsemée de villes florissantes et de hameaux pittoresques, arrosée par
les urnes inépuisables du Stymphale, de l’Q lb ios, de l’A lphée, du Ladon, de l’E rymanthe, du Cratis orgueilleux de
devoir son origine âù Sty x , et de mille sources vivifiantes, la mythologie, pour ajouter aux charmes de cette région,
l’avait animée de la présence de ses divinités champêtres. Les habitants des autres contrées du Péloponèse trouvaient
dans les vallées de l’Arcadie un printemps embaumé, d es'eaux froides,' et une température- d’autant plus délicieuse,
qu’elle contrastait éminemment avec celle des plaines de l’É lide et des contrées voisines.
Te ls éta ient, dans leurs circonscriptions, les royaumes. e t lès républiques du Péloponèse, riche de cent onze
villes régies par des institutions tellement sages, que quelques-unes passaient pour être l’ouvrage des immortels. Une
sorte d’inspiration les avait adaptées au génie des habitants de chacune de ses régions. Sparte, placée dans un pays
agreste, avait établi pour principe de W législation la guerre, l ’o rgueil, et le fanatisme de la liberté. L ’É lid e , au
contraire, était le sanctuaire des arts, de l’agriculture et de la paix. Ses riches campagnes et les bords harmonieux
dè l’A lphée ne voyaieùt que des peuples amis, qui déposaient les armes, comme inutiles et sacrilèges, en entrant
sur son territoire aiméfde Jupiter. L a Messénie rappelait dans ses élégies le bpnheur fu g itif d ’un peuple paisible,
dbritîla valeur n’avait pu défendre ses fertiles campagnes contre lë féro ce Spartiate. L ’A ch a ïe , placée sur l’avant-
scène de la presqu’île , du côté où les Romains devaient paraître pour asservir la Grèce, citait ses victoires et la
sagesse de ses conseils. Corinthe* maîtresse du commerce des deux mers, vantait'Son lu x e , son opulence; et ses
courtisanes. L ’Argolidè revendiquait ses .ro is , dont la trompette épique et les poètes scéniques avaient célébré les
exploits, la gloire* les malheurs éclatants e t les forfaits héroïques. L ’Epidaurie, protégée par Esculape* fils d ’Apollon;
e t p ar Hygie, offrait des conseils, des secours e t des asiles aux hommes dans les maladies qui les affligent. L ’A rcadie,
mère des fleuVes nourriciers de la Chersonèse de Pélops , s’a ttribuait f honneur d ’avoir vu naître des dieux dans
son* sein, - e t ' d’être le berceaù des Pélâsges, qui avaient1 préparé l’o rdre social-, en rassemblant dans des v ille s murées,
les peuplades-jusqu’a lors'errantes et vagabondes.
L a Sicyonie brilÎàitf'd?un éclat incomparable entré toutës ces autonomies, par la célébrité de ses écoles de peinture
e t dê'scu lptu re, dont les' chefs-d’oeuvre* répandus dans toutes les villes, appelaient les hommes à l ’amour de là
p atrie , à l'enthousiasme de la v ertu, et au culte de la Divinité, sans lequel il n’y a ni société possible, ni bonheur
durable sur la terre: Une culture vivifiante, e t les prodiges des arts qui enrichissaient le Péloponèse, étaient l’ouvrage
d’une population de deux millions d’h abitants, autantqu'on peut en juger- d'après l’étendue des villes et des terrains
propres à les nourrirr
Ains i, tant de merveilles, qui seraient ailleurs les résultats du nombre et de la richesse des in div idus, furent ici
l’oeuvre d ’un génie céleste et d’une population m oindre que n’est Celle de l’Helvétie.
I l y aurait de quoi douter de la vérité de cet état de prospérité, et j ’entends accuser d’hyperbole la vénérable antiquité.
Abordons la question, en nous attachant à la moins fertile des provinces de la Hellade. L ’Attique, à l’époque
la plus florissante de ses annales, lorsque vingt et un mille citoyens d ’un âge adulte possédaient douze cent mille
livres sterling de revenu ( la moitié du budget de Paris ) , occupait cependant la première place dans le monde?....
C’èst qu’alors tous les citoyens osaient individuellement faire valoir la liberté de leurs pensées, de leurs paroles,
dé: leurs actions; que des lois impartiales défendaient leurs personnes et leurs propriétés, et qu’ils avaient une
action indépendante dans l'administration de la république. Les nuances si variées et si prononcées d e leu r caractère
semblaient augmenter leur nombre. Forts de la lib erté, échauffés par le beau nom de p a trie , soutenus par une noble
émulation, ils voulaient tous se mettre au niveau de la'dignité'nationale. Des individus d’un esprit ou d’un courage
supérieur ¿’élançaient au-delà des bornes d ’un oeil vulgaire; et, si nous Suivions le calcul des chances ordinaires pour
compter les individus d’ùn mérite transcendant, on serait tenté'dé cro ire , d ’après la foule de ses grands hommes, que la
république d’Athènes eut d’innombrables habitants, e t que lë Péloponèse fu t peuplé p ar trente millions de Français.
Dans l’enthousiasme national, Athènes était surnommée l’asile ( dp|niT»iptov ) de la Grèce. L e s peuples menacés par
quelques invasions* d it A r is t id e , se réfugient dans son sein. L e Piréèi ët ses rades ouvrent des abris propices à
tous les navigateurs. L a ville de Minerve est le centre d ’où l’o n peut visiter les îles de la mer Égée, qui forment
devant elle un c/weur de nymphes, qu’on peut considérer comme ses faubourgs e t des parties de son- vestibule ; ■
Apollon l’a surnommée le prytanée et le pala is de la - Grèce; Pindare l’appelle son rempart et son appui; -
Sparte, l ’implacable rivale d’A thènes, possédait à elle seule le quart de la population de la Laconie. Au temps
de Lycurgue, le nombre des hommes libres en âge de porter les armes se montait à trente-neuf mille. Cette' classe
étant généralement regardée comme le quart de la population, il s’ensuit qu’on peut fixer à cent cinquanté-six
milie‘ le 1 nombre des citoyens de la Laconie; celui des esclaves excédait cette quantité de plus d’un quart- L ’Arcadie
possédait une masse guerrière beaucoup plus considérable; T an t de prospérités'furent la cause première des malheurs
de la Hellade. Ses peuples libres étaient semblables à des rois que la fortune a corrompus; environnés dé flatteurs qui ne