
d autres occupations ne m’avaient détourné de
ces soins nécessaires| je ne doute point qu’il m’eût
ete possible de les apporter vivans en Europe. Ce
qu’on raconte de leur fierté farouche et de leur
désespoir quand ils sont pris, qui leur fait frapper
la tête jusqu’à se tuer contre les barreaux de
leur cage, n’est, pas réel : aucun oiseau ne s’accommode
plus vite de sa nouvelle situation. Il est
vrai qu’ils plient rarement leurs ailes ; mais on ne
les voit jamais se frapper contre la cage ni contre
les vitres. Ils restent comme suspendus en l’air
dans un espace seulement suffisant pour mouvoir
leurs ailes, et l’espèce de bourdonnement.qu’ils
font entendre provient entièrement de la surprenante
vélocité avec laquelle ils exécutent le mouvement
imperceptible par lequel ils se soutiennent
pendant ^plusieurs heures de suite. Dans chaque
cage j avais place une petite coupe de terre remplie
d eau et de sucre mêlés en consistance de sirop
léger, dans lequel trempaient diverses,fleurs,
principalement la corolle jaune en forme de cloche,
du grand aloës, dont le pédoncule proche de
la tige étant coupé, permettait au liquide de
pencher dans la fleur où le petit prisonnier plongeait
à tout moment sa langue fourchue et longue,
et la retirait chargée de sucs. Cette action,
de meme que toutes celles des oiseaux-mouches,
se faisait en général en volant ; mais quelquefois
ils descendaient sur la fleur, et, perchés sur les
bords des pétales, ils pompaient le liquide mu-
cilagineux.
« Il est probable que ces animaux vivent d’insectes
, du moins je me suis assuré qu’un grand
nombre se nourrit de cette manière en les observant
attentivement dans le jardin botanique de
Mexico, lorsqu’ils poursuivaient leurs petites
proies, et dans le jardin de la maison ou je demeurais
à Themascaltepec : là je vis un oiseau-
mouche prendre possesion d’un grenadier pendant
une journée entière, et attraper tous les
petits papillons qui venaient sur les fleurs.
« Les naturalistes ont été dans Terreur quand
ils ont affirmé que ces oiseaux vivent entièrement
de la substance saccharine contenue dans
les fleurs, car je les ai vus très souvent prendre
des mouches et d’autres insectes au vol; et en les
disséquant, j’en ai trouvé dans leur estomac.
« Il est certain qu’en leur fournissant unequan-
tité suffisante de cette nourriture, du sirop et du
miel, on pourrait les conserver dans de grandes
cages; celles avec lesquelles j ’ai fait mon expérience
étaient trop petites.
«c Quoique , de même que le rouge-gorge et d’autres
oiseaux d’Europe, ils soient, dans l’état de
nature, extrêmement tenaces pour empêcher que
les individus, même de leur espèce, ne s’intro