Valangien. — Le Yahingien, près de Belley, se compose
it'unc série cic calcaires giis clair ou jaiiniUre, à grain fin,
durs, compactes, ù cassure vive, d'une soixantaine de mètres
de puissance.
Les bancs régulièrement straliûés mesurent de 20 ù
50 cent, d'épaisseur, ils fournissent une excellente pierre de
taille, exploitée dans plusieurs carrières, entre autres celles
de Praillon, adroite de la route de Lhuis. Cette suite de bancs
calcaires n'est interrompue que dans la partie moyenne supérieure
par quelques assises marneuses dans lesquelles nous
avons recueilli des Pholadomija e/oîî(/aia (Munster), à la montée
de Parves. Les fossiles paraissent Irès-rarcs dans les calcaires,
ou plutùtle géologue manque presque delieux d'observations
convenables. Dans les débris des carrières on n'aperçoit que
des tranches de coquilles indéterminables. Pourtant, au pied
de l'escarpement qui borde la route de Lhuis, nous avons ramassé
deux grandes nérinées: Nerinea lobala (d'Orbigny).
Pour déterminer et classer ces assises il faut donc avoir plutôt
recours à la stratigraphie qu'aux éludes paléontologiques
ou les relier aux affleurements voisins.
Néocomîen. — On n'éprouve pas la môme difficulté lors-
([u'il s'agit de classer les terrains supérieurs; les débris d'uue
faune riche fournissent un concours précieux et permettent
de retrouver sûrement les caractères du Néoconiien proprement
dit. Nous classons sous cette dénomination une suite
puissante des marnes grises ou jaunes et de calcaires jaunâtres,
marneux ou grossiers, intercalés les uns au milieu des
autres. Dans lebas, on voit d'abord une épaisseur d'une vingtaine
de mètres de marnes formant un sillon profond entre les
calcaires valangiens et ceux duNéocomien. Partout la culture
s'est emparée de ce lambeau de terre ; il y devientimpossible
de voir ces marnes, d'étudier leur caractère. Au-dessus de
ces marnes on découvre la saillie d'un bourrelet composé
d'un calcaire grossier, dur, jaunâtre, en gros bancs et passant
à un calcaire également jaunâtre, subcristalliu, se détachant
en lits minces et ne présentant que de rares débris de
fossiles difficiles à déterminer.
Les calcaires inférieurs sont riches en fossiles siliceux d'une
belle conservation. Voici les principaux :
c. Ostrea ¡linos (CoQvxsu).
cc. Osirea rectaiigularis (RCI'MER).
c. Oslrea COUTORJI (DIMANCE).
Peden Árchiad (o'OnBiONY).
Terebratula biplicala (BROCCHI)-
cc. Terebratula sella (SOWEOBY).
cc. Terebraliila prcelonga (SOWEHBV).
¡loiasler Lhardyi (DUBOIS)
cc. Scyphia mnosa (UCESIER).
Serpula
En traitant ces fossiles par l'acide hydrochlorique étendu
d'eau on obtient de bcaui échantillons.
Les aflleurcments les jilus remarquables sont : laToiivièi'C,
liameau de Thoys, commune d'Arbignieu, puis le chemin des
carrières de Praillon, le versant est du molard de Rivière
(Contrevoz) et le Plâtre sur la rive gauche du Furand.
Ces calcaires, qui n'ont en lout que 6 à 7 met. d'épaisseur,
disparaissent pour faire place à des marnes et des calcaires
marneux dans lesquels nous avons trouvé VOsIrea Coulcni à
l'état siliceux, des Oursins et des rognons mamelonnés d'un
quarl:^ calcédonieux blanc, caractérisli(iues de cette assise
dans tout le Bugey. Peut-être ces marnes renferment d'aulres
fossiles, mais les affleurements propres à l'étude sont rares,
nous ne ¡mouvons citer que les bois des Enversins, les conlins
du moulin à Thoys et le molard de Rivière.
Ces marnes sont recouvertes par 3 mètres environ de calcaires
subcristallin en plaquettes, puis par une couche d'un
calcaire jaunâtre, grossier, très-fossilifère.
Ammonites Arnoldi? PICTET et CAUPICHE).
Anatinu vahngiensis (PICTET et CAMPICHI;),
c. Pdjchomya ndocoiniensis (DE LORIOL).
c . Aslarte moreausa (D'OHBIGNÏ).
Aslarle transversa (LEYUERIE).
Aslarte Beaujnonli (LEYUERIE).
Trigoiiia carinata (AGASSIZ)
Geruillia anceps (DESIIAYES).
Gervillia allaudiensis (M>\TUEHCN).
c . Avicula Carleroni (D'ORBIONY).
Oslrea Coidoni (DEVANCE).
PecWi robinaldimis (D'ORUIOSY).
c . Tefebratiila bipUcata (Buoccui).
Le test de ces fossiles est en spath calcaire; i-arement il
est siliceux; la conservation est généralement bonne. La
station qui nous a fourni la plupart de ces échantillons est
située à l'est du molard de Rivière au lieu dit Sous les moraines;
on suit l'affleurement jusqu'au-dessus du lac de Chaillou.
Plus haut apparaît une nouvelle série de marnes et de calcaires
marneux jaunâtres, d'eviviron 10 mètres, parmi lesquels
est déposée une assise renfermant des grains de fer chloritcux.
Ces couches nous ont offert les fossiles suivants :
Nautilus pseudoelegans (D'ODBICNY).
Panopca grande espèce nouvelle.
c. Pseudodiadema rotulare (ACASSIZ).
c . Holeclypus mncropigus (ACASSIZ).
c . Toxasler complanalus (AOASSIZ).
Les aifieuremcnts apparaissent aux Pavandes, à Thoys
(Arhignicu),à Sauremonl, sous les buis, au molard de Rivière
(Contrevoz). En continuant â s'élever, on retrouve approximativement
6 mètres d'un calcaire jaunâtre, dur, subcristallin,
ressemblant un peu au calcaire à Entroques, se délitant
en plaques minces ; il renferme de nombreux fragments
de fossiles, dont les sections apparaissent en saillie sur les
tranches. Enfin, on voit affleurer un autre calcaire grossier,
blonchàtre, taché de ¡aune et de roux, renfermant des Oolitlies
ferrugineuses. Il se brise en fragments irréguliers et renferme
des rognons de Calcédoine bleuâtre. Ce calcaire, qui apparaît
aux Pavandes, à Thoys, au Plâtre et sur la vieille route
de Saint-Germain, .ainsi qu'àLézine, à l'est du lac de Cliaill
o u e t a u n o r d des Baraques, contient les fossiles ci-après
désignés :
Trigonia cincta? (AG.\SSIZ).
cc. Rhynckonella depressa (SOWERBY).
Pkoladomya elongala (MUNSTER).
c . Pseudodiadema rolulair. (AGASSIZ).
N o m b r e u x ècbiiiodermes.
Après avoir franchi ce terrain, on aborde le iNéoconiien
supérieur ou Pierre de Neuchâlcl. Ce calcaire jaune, dur,
grossier, avec quelques lits de marnes, est très-difficilc à
étudier en détail sur les bords du Furand; il est j)resque
toujours recouvei't par des bois. Les fossiles sont empâtés
et forment parfois une lumachelle; nous y avons vu de
grandes Oslrea, mal conservées et assez abondantes à
Lâchât, au nord-est de Parves.
Urgonien. — Un calcaire blanc, dur, compacte, fissuré
dans le bas, et quelques assises d'oolithe jaune clair indiquent,
aux Foui Houses (Tlioys), aux Baraques et à Lachal,
sur le liane est de la monlagne de Parves, l'apparition de
rUrgonien.
Dans ces 30 mètres de calcaire, nous avons reconnu trèspeu
de fossiles, quelques traces de Polypiers, des coupes de
coquillages.
La faune n'est pas plus riche dans les 6 mètres de calcaire
blanc crayeux, sans strates, qui suivent et ([ui représcnlent
r U r g o n i e n moyen, hi Pierre de Seyssel, le Calcaire à C huma
ammonia. Nos recherches ne nous ont procui'é ([u'unUiniiiles
Studeri (Pictet et Roux) et ([uelques débris informes.
Mais, au nord de Belley, à la Tuilerie de (¡l'ammont, M. Ilier
a trouvé, dans les mêmes assises, des Chaîna ammonia, des
Peclen, des UippuriU-s ncocomiensis en grande quanl i l c (1) ;
on en voit égaieincnt à la Vacherie, près de Saint-.Marlin de
Bavcl, en dessous d'une molasse marine co(|uil!ièi'e.
Celle roche tendre a été exploitée comme pierre de laille,
près de Thoys, dans une galerie appelée aujourd'hui la Grolle
des Fées. Elle affleure encore entre les hameaux des Baraques,
sur la rive droite du Furand et près de Massigneux-de-Rives ;
elle disparait sous la molasse et le terrain erratique.
Les affleuremenls de l'Urgonien supérieur sont trèsrestrcints
sur le |)arcours de notre cou])e. Nous ne l'avons vu
(]u"enti'c Bognien et les Baraques, où le chemin l'a un peu
cnlamé; c'est un calcaire jaunâtre, dur, parfois lincnient
oolithiqne, en bancs assez réguliers et se délitant en ])!aques
minces. ¡\ous allons citer les fossiles que nous avons pu y
recueillir :
Cyprina Dckayesiana (DE LORIOL).
Pleroceran Bcatcmonliana? (D'ORBIONY}.
cc, Toxaster Couloni (ACASSIZ et DI-SOR).
Les étages plus élevés de la formation crélacée manqueni
[irès de Belley. Us ont probablement disparu au moment du
soulèvement et du brisement des couches.
TERRAINS TERTIAIRES ET QU,\TERNA1RES
Molasse marine. — .Vprès la production des grands mouvements
du sol, qui oui donné à la contrée ses principaux
caractères orograpliiques et qui ont mis fin à la sedimentation
des terrains secondaires, la n\er a de nouveau envahi le pays
qui fut plus lard le Bugey et elle y déposa d'épaisses couches
de sable, qu'on nomme Molasse marine. Ces sables
se relient avec ceux qui furent déposés, ;i la même époque,
dans la vallée du Rhône et dans celle de la Suisse.
Les eaux de la mer miocène, en battant les falaises des roches
jurassiques et crétacées, en détachèrent de nombreux débris,
qu'elles arrondirent et qu'elles linirent par recouvrir avec des
sables amenés des rivages granitiques lointains por les courants.
Ces gros galets sont souvent perforés par des trous do
Pholades et marquent les anciennes limites des golfes sinueux
qui découpaient le pays; loin des bords, on ne voit que de la
Molasse^ avec des rognons ou des lils plus ou moins louimentcs
d'une marne grise, tachée par des oxydes de fer.
Entre le Rhône et le cours du Furand, il n'y a pas de fossiles
dans ces sables marins; il faut aller jusqu'à Saint-Martin de
Ravel pour trouver une Molasse coquillière avec des huitres,
de grands Pectcns, des Polypiers.
Les couches de la Molasse sont restées horizonlales dans
les environs de Belley, elles n'ont pai'ticipé qu'au mouvement
général d'exhaussemenl de toute la contrée, mais on saitquc
[dus au nord elles ont été elles-mêmes foi'temenl bouleversées.
M. Rcnoit les a vues à la Combe-d'Iilvoaz, près du crôt
de Chalam (Jura), à 1235 mètres d'allilude.
Terrains erratiques. — Ces niouvemenls orogi'aphi(|ues
(!) mmira oîM, p. S2.
ont sans doute été les deriiiei'S <|ui ont agi sur les roches du
Ihigey, et depuis la fin do la période tertiaire, la lo[)ographic
générale du pays n'a pas été ])roi'ondéinent modifiée.
Pourlonl, à cette é|)oque, au comnienceincnl de la série
des terrains quaternaires, s'estpasséun grand phénomène ([iii
a laissé sur le sol une empreinte caractéristique suns en bouleverser
les reliefs.
Ala suite d'uu refroidissement prolongé don ties causes sont
encore mal définies, les glaciers des Alpes suisses ont pi'is une
extension considérable et ont envahi la vallée du Rhône. Le
cinjue de Belley n'a pas échappé à leur inllucnce, jws ¡ilus
(|u'à celle d'uue branche du glacier de l'Isère qui déboucliait
par la vallée d'Aix et le col du Mont-du-CluU. Ces glaciers,
après avoir opéré leur jonclion, se sont étendus jusque vers
Lyon cl Bourg et ont laissé dans le Bas-Bugey de nombreuses
traces de leur passage. Les roches dures ont été polies, moutonnées
ou striées J a moraine profonde a tout recouvert d'un
placard de boue glaciaire Íi cailloux rayés, et des blocs erratiques,
atteignant parfois un volume de plusieurs centaines
de mètres cubes, se retrouvent perchés sur les lianes de la
montagne de Lachal, à l'altiludc de 1120 mèfi'es, qui est
la limite supérieure des anciens glaciers. C'est à cette couche
glaciaire argileuse, uniformément répandue, que le pays doit
un des principaux traits de sa physionomie; c'est, en elTct,
cette argile qui sert de cuvetle à ces nombreux iielils lacs
qui sont dispersés dans le Bas-Bugey, à toutes les hauteurs et
au-dessus de tous les terrains, même les ])lus fracturés. Les
lacs d'Armaille, de Chaillou et d'Ambléon, dont nous avons
souvent parlé, ont lamérne origine. Leurs eaux sont contenues
dans des bassins creusés dans le Kimméridgicn ou le
Néocomien et enduits d'une couche de boue glaciaire imperméable.
Nous bornant à ces aperçus généraux sur cette intéressante
formation, nous n'entrerons pas dans d'aulres détails. Nous
nous réservons de traiter dans un ouvrage spécial toutes les
questions qui se rattachent à l'étude de l'extension des anciens
glaciers des Alpes dans la partie moyenne du bassin du
Rhône.
Pendant la période glaciaire, la vie s'était retirée loin des
montagnes du Jura et elle ne s'y manifestait peut-être plus
que dans quelques ilôts de rochers isolés ou sur quelques
blocs erratiques recouverts de certains lichens; dans toutes
ces moraines, dans celle accumulation de débris, il n'y a pas
de traces de corps organisés, mais ces conditions climalologiques
si étranges ne durèrent pas toujours: la tempéralure
s'adoucit après un temps indéterminé, ces masses de glace,
([ui avaient répandu partout le silence et la mort, fondirent
lentement et la vie put reprendre son empire. Les plantes,
les animaux et l'homme hii-mème, poussés par les forces
mystérieuses que Dieu a attachées à leurs organismes pour
veiller à la propagation de leurs espèces, en\ ahirent progressivement
les contrées ouverles une seconde fois devant eux.
L'éijoquc de ces migrations diverses a])parlient déjà à la pél'iode
contem[)orainc.
En face de celle ère nouvelle, les géologues arrêtent leurs
investigations : ils doivent céder aux paléoelbnologues et
aux naturalistes le soin de déchilïrcr les derniers feuillets du
livre de la Tcri'c.
Du reste, après avoir décrit la succession des terrains
subordonnés aux gisenjcnts de poissons fossiles du Bugey,
nous avons achevé notre lâche, car, lorsque nous avons commencé
celte étude, notre unique pensée'a été de rendre
honnnage â la mémoire de notre vénéré maitrc et ami, Victor
Tbiollière, en entourant son oeuvre d'un cadre que la
mort seule Favait empêché de tracer d'une main plus sûre
et plus habile que les nôtres.