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dont Xerxes n’avoit qu’à fe louer , qui î^pît offert
à fe prince des [brames confidérables pour fon
expédition de G è c e , qui avoit reçu magnifiquement
Xerxes & fon armée à Célère , près des bords
du Méandre, où ce Pythius faifoit fa rcfidence ,
avoit cinq fils dans l ’armée de Xerxes ; il fopplia
ce prince , qui paroiffoit contint de lui & de (es
procédés, de vouloir bien lui laifier l’aîrifé de (es
fil' pour être l’appui & la çonfolation de fa vieil-
îeffe. Quelle imagine-t-on que fut la répônfe de
Xerxes à une d mrude fi naturelle ? un refus de cette
grâce? Non. Il fit égorger ce fils aîné à la vue de
fon père, fit couper le corps en deux parts, qui
furent placées, l’une à droite, l’autie à gauche,
& il fit pafier entre ces deux parts , ainfidifpofëes,
toute fon aimée , comme pour l'expier par,un tel
facrifice. Ce feroit affurément bien le cas d’appliquer à Xerxes le mot de Tacite, vi dominationis con-
vulfus, mais il eft plus naturel de révoquer cette b if-
toirc en doute,*d’autant plus que le même Hérodote
& le même Sénèque en racontent une toute
pareille de Darius, père de Xerxes, & que ni Darius
ni Xerxes n’ont paflTé pour des princes cruels.
Xerxes nétoh pas même dépourvu de fenfibilité
ic d’humanité. On fait qü’étant arrivé au bord de
l ’Hellefpont, il voulut avoir le plaifir de contempler
tout à-la fois l’appareil formidable de toutes
fes forces & de terre & de mer. On lui éleva un
trône fur une montagne. De-là voyant la mer chargée
de fes vaifïèaux & la terre couverte de fes troupes,
fon premier fentiroent fut un mouvement d’orgueil,
en mefurant, pour ainfi dire, des yeux (a grandeur
& (a pùilfance ; mfis bientôt uneidée plus humaine,
& qui lui faifoit plus d’honneur, vint fe préfenter à
lui & l’atteffarir au milieu de (a gloire ; il forgea
que de tant de milliers d’hommes qui frappoient
les regards & qui obéiffoient â (es volontés , dans
cent ans, dans cinquante ans peut-être, il n’en
exifteroit aucun. A ce (ouvenir du peu de durée de
l ’homme, & de la fragilité des ebofes humaines ,
i l verfa de» larmes, qui étoient bien plus d’un
eiprit philosophe & d’un coeur fenfible que d’une
ame abrutie par le defpotifme. Et voilà p:ut-être
le plus beau moment de fa v ie ; mais ce ne fut
qu’un moment : il continue de menacer 8c d’attaquer
la Grèce, & de courir à fa ruine. On péut lui
compter pour autant de défaites,toutes les occafions
oè fes innombrables troupes fe Commirent avec des
poignées de grecs ; l’affiiire des Thermopyles, où
trois cents fpar.iates arrêtèrent cette immenfe armée,
ic périrent for les corps de plufîeurs milliers de
perfes qu'ils avbient immolés; Artémifo, où fe livrèrent
plufieurs combats peu décififs-, mais rous
favorables aux grecs, & qui affoiyiffoient toujours<
les perfçs ;. Salamîne -, Platée, Mycale , grandes
îlluftres victoires des grecs, qui ont rendu immor-j
tels les noms de Thémifiocle, - d’ArilTîde , de
Pauf^nias. 8c célèbres ceux de Léotychide & de
Xanrippe. Humilié enfin , & dédoaragé par tant de
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défaites, Xerxh s’enfuit avec la plus honteufe pré**
cipitation, n’ayant tiré d’autre fruit de fon effroyable
armement, que d’avoir pillé & brûlé Athènes,
d’avoir de même brûlé & démoli tous les temples
des villes grecques d’Afie, ce qui ne contribua pas
peu à détacher toutes ces villes de fon obéiffaoce.
Il n’épargna que le temple de Diane, à Ephèfe.
Inftruit à fond de la religion des mages , adorateurs
du feu , ennemis déclarés des temples & des
fîmulachres, il étoit zélateur ardent du magifmc ;
6c‘ s’il 11e put fâtisfaire fon ambition, il fatisfit du
moins fon zèle pour fa religion'particulière. Oftane,
chef des mages & patriarche de cette (ed e, accom-
paghoit Xerxes dans cette expédition de la Grèce ,
& l’animoit à cette deflrudion des temples. Un
autre motif pou voie encore l ’y engager; celui de
fe dédommager , par le pillage de ces temples, des
frais immenfes que lui avoit coûtés cette m al lie u-
reufe expéditon contre la Grèce. Dégoûté par ce
mauvais fuccès , & corrigé de l’abus des conquêtes
& des entreprifes guerrières, il alla fe brifer contre
l’écueil contraire., plus dangereux encore, celui de
la molleffe ; il fe livra entièrement aux voluptés.
La mollette eft douce, & fa fuite eft cruelle ,
dit Orofmane ; perfonne ne l’éprouva plus que
Xerxh. Un Artabanc , bien différent de cet oncle
de Xerxes , dont nous avons parlé, ( Voyeç l ’article
A rtabane. ) entreprit de monter fur ce trône
que Xerxh oceupoit fi mal. Cet Artabane étoit lin
hircanien de naillànce, devenu capitaine des gardes
de Xerxes , ' 8t l’un de fes principaux favoris. Les
faux calculs font familiers à l’ambition ; puifque
Artabane voulôit régner, il D’avoit qù’à laiffer
dormir fon maître fur le trône & jouir de la faVeur;
mais à la réalité de la pùilfance, les ambitieux en
préfèrent Couvent le titre, femblables aux chiens
qui abandonnent la proie pour l’ombre. Artabane
vôulus fe défaire de Xerxes y & quoique ce prince
eut trois fils y & peut être davantage# pour lui fuc-
çéder, il crut que ce premier crime lui faciliteront
les autres crimes néceffalres. On ajoute qu’il avoit
un autre motif moins coupable pour s y déterminer.
Xerxh mécontent de Darius, fon fils aîné, ou
prévenu contre lu i , avoit donné à cet Artabane
Tordre affreux dé le défaire de ce fils. Artabane
ne fe perfuadant pas aifémenr qu’un père voulût
faire périr fon fils, & confîdérant que cet ordre
lui avoit été donné dans la chaleur d’un feftin &
dans un moment où le" roi pouvoit ne pas jouir de
toute fa raifon, ne fe prefla point de Texécuter.
Artabane avoit trop bien raifonné, il s’étoit trompé;
le roi fe plaignit avec colère & avec menaces de
Pin exécution de (on ordre; Artabane crut avoit à
Craindre pour lui-même, & fe hâta de prévenir un
delpote irrité ; i l engagea dans Ton’ complot un des
eunuques du palais, grand-chambellan du toi, nommé
Mithtidate £ celui-ci Piniroduifit dans la chambiç
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de Xerxes , & Artabane le tua pendant qu’il dot-
moit. Il alla enfuite trouver Artaxerxe, le troi-
fième des fils de Xerxes , & lui perfuada que Darius,
par l’impatience de régner, avoit porté fes
mains facrilèges 8c dénaturées fur le roi ion père.
Artaxerxe, dans fa colère , court avec Artabane
& les gardes de Xerxes dans l’appatement de Darius
, & il égorge fon frère en croyant venger
fon père. Hyftafpe, fécond fils de Xerxes, à qui
la mort de Darius déféroit la couronne, étoit alors
dans la Badriane, dont il étoit gouverneur. Artabane
fe hâta de mettre Artaxerxe (ur le trône pour
s’en faire d’abord un appui contre Hyftafpe, & les
détruire To-n par l’autre. Cette cataftrophe de l ’af-
faffinaû de Xerxes & du crime d’Artabane fait le
fujet d’une fort belle pièce de Métaftafe, intitulée:
Artaxerxe, & où le fils vertueux1 du coupable Artabane
, feul dépofitaire du fatal fecret de fon père,
& trouvé faifi de l’épée fanglante dont Xerxes a
été percé , paroît feul coupable de ce régicide aux
yeux de fon ami & de fa maîtreffe, & (e Iaiffe
condzmnsr pour ne pas aceufer fon père. Parmi
nous, M. le Mierre s’eft aufli exercé fur le même
fujet. ( Voye^ l’article A rtaxerxe. ' ) Telle fut
la deftmée de Xerxes, elle eft d’une grande moralité
dans Phiftoire , & les guerriers & les hommes
d’état ne peuvent méditer trop profondément ce mot
de Sénèque", dont Xerxes lui même reconnut trop
tard la vérité , ce mot fur la facilité avec laquelle
fut diflipée cette armée qu’on croyoit formidable,
parce qu’elle étoit nombreufe ,. fl'ratus per totam
pajjim Groeciam Xerxes intellcxit, quantum ab exer-
' ci tu turba diftarçt. Si Xerxes ne fut qu’ambitieux ,
-foi-blé & voluptueux, il faut le p'aindre ; fi l ’orgueil
lui a fait commettre les extravagances qu’on lui a
reprochées, il faut le plaindre plus encore; s’il â
ordonné la mort de fon fils, s?il a égorgé le fils de
Pythius, s’iba fait périr les entrepreneurs du pont
de l’Hellefoont pour un accident dont ils ne po.u-
voient pas être Telponfables, i l faut détefter 1?
mémoire. Il mourut l’an 473 avant J. C.
Un écrivain moderne, dans un difeours oratoire,
couronné a l ’académie françoife en 1766, s’exprime
ainfi fur X e r xh , au fujet <k*s larmes que la vue de
fon armée lui fit répandre, & du peu d’effet dont
cet attendriifement fut fuivi r
«c L’ impéti eux Xerxes roule au fein de la Grèce
le torrent de P A fie en armes: il s’arrête; il contemple
du h <ut d’une montagne ces guerriers amoncelés
comme des flots, une grande penfée vient
faifir fon aine : Encore un peu de luflres , & le tems
■ aura dévoré cette multitude. Il s’attendrit,-des larmes
coulent de fes yeux....'. Arrête la nature te parle,
tu l'ente..ris» éc tu fais la guerre! L ’humanité $e-
lavoue tes larmes, tu n’es pas digne de pleurer fur
elle. Pourfuis ta courfe. A/ec l’infomedefir de nuire,
tu n’en auras pas même le méprifable pouvoir.- Va
foperbe enfant, étale à des^ enfans l’orguêilleufe
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1 petîtéITe de tes grandeurs & l ’effrayante fragilité de-
ra puiffance ; va dans tes jeux infolens châtier
l ’Hellefpont, qui, dans fes jeux terribles, a en-
glouri ta flotte ; frappe l’élément aveugle & infen-
fible; fuis devant les hcmmis, & va tomber fous
les coups d'un efclave ! Ain ■ puifent périr tous
les ennemis de la paix 1
Vo^e^ fur cet article X erxès , les articles
Amestris , Aristide, A rtabane, Artabazane^
Démarate , Pausanias , T hémistocle.
xû. Xerxes I I , fon petit-fils, feul fils qu’Arta-
xerxe Longuemain eût eu de la reine fa femme, ne
régna que'quarante-cinq jours. Sogd.ien, fon frère,
( Voye% cet article.) un des dix-fept fils qu’Artai
xerxe avoit eus de fes nombreufes concubines»
l’afTaffina dans fa chambre, où Xerxes , qui setpic
laiffé prendre de vin, s'étoit retiré pour dérober
fa honte aux yeux des couïtifans. (L ’an 414 ayant
Jéfus Chrift. )
XIMÉNÊS. ( Hiß. dyEfp. ) C ’eft le nom de trois-
perfonnages célèbres en Efpagne, l ’un homme de
lettres, l ’autre homme d’état, le troifième jurif-
confulte.
L'homme de lettres, ( Roderic) navarrois, archevêque
de Tolède, eft auteur d’une hiftoire d’Ef-
pagne , imprimée dans le recueil des hiftoriens de
, ce royaume , avec des remarques du père André
Schott. Ce fut lui qui, au concile de Lyon, eiv
1147 j fit affûter définitivement à l'archevêché de
Tolède laprîmatie, qui lui étoit difputée par l’archevêque
de Compoftelle, en vertu de l’avantage
qu’a fon fiège de pofféder le corps de St. Jacques»
- apôtre des Efpagnes. Ximénès mourut peu de tems
après avoir remporté cette- viélo.re.
L ’homme d’état ( François ) eft le fameux car-
1 dînai Ximénés , prélat vertueux , miniftre habile»
mais fier & fans pitié , qui gouvernoit l ’Efpagne
fous Ferdinand & Ifabelle, & pendant les premières
années de1“Charles-Quint. On ne fait pourquoi,
dans fa jeuneffe, un archevêque de Tolède le fit
mettre eh prifon dans la tour dUzeda. Devenu
libr^, il fe fit cordelier , fut confcfTeur.de la reine
Ifabelle , qui le fit à fon tour archevêque de Tolède
en 14p5 , & le chargea de réformer les ordres
religieux, commiflion importante & délicate ent
Efpagne, & au quinzième fîèele. Il s’en acquitta;
fi bien, c’eft-à-dire, avec tant de févéricé, que fon-
ordre même, fou levé contre lui , voulut, dit-on
'le frire aflàftinérpâc. fon propre fi ère. Le généraL
des cordeliers vint exprès de Rome en Efpagne
pour. rerdre Xéméncr dans l’efprix dTfàbelle : il s’y
perdit Lui-même ipar l’emportement avec lequel if
îparlâV'fans égard pour la proteélion dont une reine
efpagnole de voit honorer fon; eonfeffeur. Saver~v.ousT
lui dit la.reine offenfée , a qui vous parles^ Le moiner
fans-fe décoteerter.^appelant aufocours de.- foin