» homme à cheval : gare, gare. Ce pauvre homme
v fe veut ranger ; Ton cheval ne le veut pas. Enfin , le
» carrelle & les fix chevaux renverfent qui par--deflus
» tête le pauvre homme & le cheval, & paflent par-
w deflùs, & fi bien par-deflus, que le carrelle en fut :
♦> verle, & renverfé. En meme - temps l’homme ôc
» le cheval, au lieu de s’amufer à être roués, fe
» relèvent miraculeufement, ôc remontent l’un fur
'»> l’autre ôc s’enfuient v ôc courent encore,, pendant
w que les laqua s ÔC le cocher de Farchevêque, &
» l’archevêque meme % fe mettent à crier : arrête ,
» arrête ce coquin, quon lui• donne cent coups, de bd-
» ton ; ôc l’archevêque, en racontant ceci, difoit :
» Sijavois tenu ce maraud- U y je lui aurais rompu les
» bras & co pé les oreilles >>.
L archevêque de Reims étoit maître de la chapelle
du roi-, & en cette qualité U étoit l’aib tre du fort des
muficiens employés à cette chapelle. Un d’eux lui fit
une réponfe un peu gère , dont il, s’offenfa , ôc il résolut
de lui ôter fa p1 ace ; mais, comme ce mufieien
étoit agréable au roi v par fa voix ôc fon chant, il ,
falloit préparer de loin fa difgracecomme celle d’un
courtifàn : il avoir lenti la faute, Ôc en. avoit tait pré- |
venir Louis XIV. Le lendemain, à la meffe du roi,
l’archevêque dit tout haut: » Voilà un pauvre homme ;
a qui perd là voix ; il eft temps qu’il fônge à la reT
» traite. Non, dit Louis X IV , il chante bien y_ mais
m il p ai le mal ;. il do if aller vous en faire lès exculès ,
” & je vous prie de lui pardonner à ma confidéra-
» tion ».
L’archevêque de Reims étoit janfénifte, & jouoit <
un rôle. dans le parti ; maisTès moeurs s’ac.cordoient
pRli ayec fa doélrine,. Ôc on fit for lui çette.chanfon
Le gros Maurice dans. Paris
Défend la grâce gratuite
Par fes difeours , par lès écrits l
Et plus encor par fa conduite ;
S’il va jamais en parads,
Qui■ pourra, d opter du gratis ?
L’archevêque de Reims aimoit les lettres. Il’a voit-Une
bibliothèque de cinquante mille volumes, qui forme
encore aujourd’hui ( en 1789 ) le fonds de la. bibliothèque
de Sainte-Géneviève à Pai is. Il étoit né à Paris
en 1642?;. il y mourufcfobitejKient en 1710. Il défendit
qu’on, lui fît aucune oraifon funèbre :;il avoit rajfon;
BclTuet avoit eu t*rt d’èn faire une au chancelier
ibn pèr.e, plus toit. encore d’âvoir çonfàçré &. cano-
nifefon intolérance à. l’égarddes-proreftans, de l’avoir
reprefenté chantant le cantique de S méon , & rendant
grâces au ciel de ce que fes yeux-,. p; êts à fe
fermer, ayoîent vu ce triomphe de la foi catholique,
( la. révocation de l’édit de Nantes ) au ;uel il'ne fur-
vécut que huit, jours cette révocation efi du 22
©élobre 168 5,, ôc le chancelier, le Tellier mourut
fe 31..
4°. Enfâns dé M. dé Louvois. Le Marquis de Lou-
ÿô.is, ^^i-nféxnent .y.che gar, lui-même Ôc par fes
places, avoit époufé Anne de Souvré,. marquife, dë
Courtenvaux, lune des plus riches héritières du
royaume. Il en avoit quatre fils ÔC plufieurs filles ; ôc
c’eft encore lui qui eft dé ligné dans ce choeur d'EJl/ieri
Je n’admirai jamais la gloire de t’ mpieï
Au bonheur du méchant qu’un autre porte envie,
Tous fes jours parodient charmans ;,
L’or éclate en fes vêtemens : .
Son orgueil eft fans borne, ainli que fa richeflfe.
Jamais l’àir n’èft troublé de fes gémiftemens ^
Il s’endort,, il s’éveille au fôn des inftrumehs;.
Son coeur r.âge dans la molleffe.,
Peur comble, de profpériié,
Il efpère revivre en fa poftérité;.
Et d'enfans, à fa table, une riante troupe
Semble boire, avec lui U joie à pleine coupe.'
On avoit fait fur les quatre fils de M. de Louvois
une chanfon prophétique & fatyrique, où,, de peur,
de ne pas inlùlter allez de monde,. on finiflb.it. par
infojter les ducs ÔC pairs en corps
L’abbé vife au cardinalat,
Souvré fera- notre Tu renne,
Barbézieux régira l’état.
De Courtenvaux je fu s en peine i:
C ’eft. un fat, il a. mauvais air ;
Nous en. ferons^ un duc ôc pair.
L’événement a démenti toutes ces p rédigions, à là ré?
lèive de celle qui concerne M. de Barbézieux ,.lequel a
véritablement régi l’état il avoit beaucoup d’efprit &
de talent naturel. Il avoit fuccédé à fon père dans le
miniftère de la guerre , & il forma la troifième génération
de nv.niftres dans fa famille fous Louis X IV ;
mais il mourut en 1 - 7 0 1 trop jeune pour qu’on eût
pu le bien connoître, &. au. me ment où la guerre de la:
luccelîion d’Efoagne alloit ouvrir à lès talens la. plus
vafte carrière : il mourut pour avoir voulu allier les
p!a firs avec-le travail. On lui reprochoit du fafte
, de la d.fîiparion, & c'éfoit Louis XIV lui-même qui
lui failbit ces. reproches. Voici ce que le roi écrivoit à-,
l’archevêque de Reims fou oncle , pour qu’iH’avertît
de lè corriger.- *
» Jè -fais ce que je dois à là mémoire de M; de Lbu-r
» v,ois<; mais fi votre neveu ne change de conduite,.
» je ferai forcé de prendre un parti : j’en ferai fâché ;
» mais il en faudra prendre un. Il a des talens ; mais
» il n’en .fait pas un bon ufage. Il donne trop fouvent à
” • fouper aux.princes , au lieu de travailler r-il néglige
» fes affaires pour fes. plaifirs il fait, attendre trop
long-temps les officiers dans fon antichambre ; il
leur parle avec hauteur, & quelquefois avec du-
» reté jk
L ’abbé de Louvois, ( Camille le Teiller ) foit qu’il
visât ou non au cardinalat,. ne fut point cardinal, ni
même évêque , quoiqu’il eût été nommé ,en 1717 -, à
l'évêché de Clermont ; mais il le refufe, ce qui étqjt.
bien éloigné, de Y^fer au cardinalat*
Il étoit né à Paris le i r avril 1675. I ^
l’âge de neuf ans r il fut nommé au prieuré de Saint-
Belin , à l’abbaye de Bourgueil & à celle de Vauluifant. *
La même année on réunit pour lui, fous le titre général.
de bibliothéquaire du roi „ les charges de garde de
la bibliothèque & d’intendant du cabinet des médailles,
dont étoit pourvu l’abb,é C o lb e r t& celle de grand-
maître de la librairie,. que deqx, Jérôme Bignon
avoient fucceffivement remplie.
Son éducation avoit été très-cultivée,. & l’avoit été
fruétueufement ; la nature lui avoit donné les diîpofi-
tions les plus Jieur.eufes ,. & il eut les plus grands
maîtres en tout genre. Son précepteur fut M, Herfan,
profeflèur de rhétorique r célèbre dans fon temps, &
que M. Rollin a dignement loué., ( Voycç. l’article
Hersan. ) M. Boivin le cadet lui apprit le grec;
M. l’abbé Vittemant, depuis fous-précepteur du roi
Louis X V , fut- fon maître de phnofbphie. 11 fit fon
cours de mathématiques fous le fameux Lahire, de
chymie fous Homberg & Geoffroy, d’anatomie fous
Duverney. Aucun de leurs foins ne fut perdu ; les
talens du jeune Colbert s’annoncèrent avec éclat par
un exercice public qu’il fit à douze ans. fur les deux
grands poèmes d’Homère,-; dans une fa lie de la. bibliothèque
du roi, & où. le grand Boflùet, qui aimoit
Homère, ôc qui le connoifloit autant- que les pères de
réglife,,prit plaifir à s’en entretenir avec cet enfant, précoce.
Baillet. n’a pas manqué de donner à l’abbé de
Louvois une place honorable parmi, les enfans célèbres
par leurs études..Les thèfes de philofophie qu’il
foutint à d.x-fept ans eurent encore plus d’éclat, &
.forent chantées par une multitude de poètes Grecs ,
Latins & François : ce furent des fêtés folemnelles
dans l’univerfité. Mais bientôt fa réputation franchit
ces bornes étroites; on connut fon. talent pour les
affaires. Il voyagea en Italie, il étendit fes connoif-
fances ; & rechei chant dar s-toutes les villes où il paffoit
tous les livrés-qui manquoient à. la bibliothèque du
roi,, il ramafla plus de trois mille volumes conquête
littéraire importante..
Il fut reçu en 170.6 a l’âcàdëmie Françoife ,. &;en
17C8 à-l’académie des Infcriptions & Belles-Lettres.
On dit que les Jéfuites le tinrent éloigr.é de i’ép’ïf-
copat pendant toute la vie de Louis XiV , parce-
qu’il étoit neveu de l’archevêque de Reims,. Sc fuf-
peél de janfénifme. Les raifons qu’il eut.de refufer, en.
1717,.l’évêché de Clermont, atteftent la régularité de
fes moeurs , &. fon refpeél religieux pour fes devoirs::
voici ces raifons,. feion M, de licze. » Des douleurs
w qu’il fupporteit, fans fe plaindre,.--depuis', près de
» deux ans, l’.avoier.t déjà intérieurement convaincu
” qu’il étoit atteint delà pierre ,.& que-le mal, ,aug--
» mentant néceflàirement de jour en jour’,, ne lui
»• permettroit pas de faire exaélement la.vifite d’un
» fi grand diocè'fe, dont les paroifles d’ailleurs,. fi-
ff n*es pour la,plupart dans les montagnes ne pou^
»? voient être parcourues qu’à cheval
En effet, le mal augmentant, il fe fit fondèr :-on
feijpt la pierre. Il fe détermina fur. le champ à l’opération
; s’y prépara comme à une mort certaine, réfignà
fes bénéfices : il rot taillé le 2.9 oérobre. La pierre fe
trouva d’une nature molle ; elle s’écrafa fous la tenette v
& on ne put l’èxtraire que par fiagmens ; la fièvre fur-
vint, & la mort au bout de huit jours : cétoit en 1718..
L’abbé de Louvois. n’a voit alors que quarante-quatre
ans & demi..
. Le marquis dé Souvré , ( Louis-Nicolas le T.elüer ):
fut là. tige de la branche de Souvré,
Le1 marquis de Courtenvaux ,- ( Michel-François le
T Jim') l’aîné des quatre fils de M. de Louvois, né"
le 15. Mai 1663,, mort le 11 Mai 17*21, ne fut point
, duc & pair ; il fut capitaine5Hes Cent-Suiftèi de la. .
garde du roi. Il épc-ufa, le 28 Novembre 169.1, Marie-
Anne-Catherine d’Eftrées , qui. fut l’héiitière de la
mai (on d’Eftrées ,. & par laquelle ce nom d’Eftrées a^.
paffé à la famille le Tellier. Il a été porté par le dernier'
maréchal d’Eftrées ; celui qui, en 1757-, gagna la ba<-
taille d’Haftemhecke ,. ÔC fut rappelle.- ( Voye1 Tartiçle-
Estrées. )
Le maréchal d’Effrées* eut pouf petit-neveu- le mar-r
quis.de Montmirail , (Charles-François-Céfar le-
Tellier )-déjà üluftre, & déjà mo:(Tonné à-trente ans.
A des talens diftingüés pour la guerre ,- talens- qui-1
n’atsendoient plus pour briller dans tout leur luftre que *
le fecours de l’èxpérience ÔC Thonneur du comman--
dement,. il joignoit des "vertus aimables , un amour •
éclairé dès lettres ôc des fciences , des connoiffances ,,
; des lumières,, ôc fur-tout l’art de fe faire aimer. Il
étoit né à Paris,. le i l Septembre 1734;, de Erançois^-
Çéfar lè Tellier r marquis de Courtenvaux, petit-fils-
: du premier marquis de Courtenvaux, fils dumuuftre•
Louvois &• de Loüife-Antoine de Gonîaut: de Biron,,
foeur du dernier maréchal de Biron, A dix-fept ans il
; entra dans la première compagnie des Moufeuetaires
à vingt ans il fut reçu dans- la charge de capitaine-
colonel' des. CentSuiftes, fur la. démilllon de M. !%•
marquis de Courtenvaux fôn ‘père ,-Je 28 Novembre;
1754, M: le maréchal cfEftrées , fon granc!onc!e ,,
: ayant eu, comme nous l’avons dit, le commandement:
des troupes en 17 5 7 , le marquise de Montmirail le-
’ fuivit en qualité d’alde-de camp, 11. devint bientôt:
capable de féconder fes vues, par les opérations for*
les bords du Véffr : îlobtint lestéloges des François
l’efthne des Ànglois ,. ôc du duc .de Cumberland leur*
■ général. H fe diftingua beaucoup à la bataille d’Hafe-
tembecke,. Ô£ dans la fuite à. celle dé Crevelt, oîr.
il. ccmmando-it il Régiment de- Ro/àl-RouftIUon
dont Je roi i’àvdit'nommé meftre-de-camp .au mois-
de JuiHet 1758. Les regrets de ce régiment à la mort
; de M.; de Montmirail, ôc- une lettre qu’écrivit à.ce“
fùjet, le 9 Avril 1767, de l’aveu de tous les .officiers ,,
M. de Changsy ,. major.de ce régiment ,, f .ffiroient àa
la gloire du jeune, colonefoEa 176-1 & 1762 de:
Montmirail avoit fervi de nouveau fous .Mi h maréchal
d’Eftrées, toujours avec une plus, grande di'ftinc—
tion , toujours avec une réputation croillante. Il mérita
ôc obtint avant vingt-huit ans, le 25 Juillet 1762,.
le brevet .de. brigadier des armées-du roi * fl eut afoEl