$-’4 T O U
' II arriva ce moment heureux.. . . . . . Il entrevit
J - d.s p cges Ce des piécipices que fa prévention lui
» avoir ;u'cu*a!ors en'ie«em§nt cachés. 11 commença
* a marcher avec précaution & avec crainte dans
« c ? routet égarées c b il le trouvoit engagé. Certains
» rayons de grece &c de lumière , lui firent ap-
»> percevoir..............unevéri;éfimple & indivifible,
» qui ne fe montre qu’à ceux qui la cherchent avec
» un coeur hutrb’e & une volonté dtfintêrcffée. II
w n’étoit pas encore éclairé, ,mais il cc mmençoit
» d’être docile. Ccmb:en de fois conful;a-t il des
» amis favans & fidèles ! Combien de fo:s dit-il à
» Jefns-Chrift, comme cet aveugle de l’évangile :
» Seigneur, faites que je voie ! Combien de fois efiaya-
u î-îl, d une main isnpuiflante, d’arracher le bandeau
V fatal qui fermoit lès yeux à la vérité-! Combien
« de fois remonta-t-il jufqu’à ccs fcurecs anciennes
J? &*pures ! ...........Habitude , prétextes -, engager
y> mens, honte de changer, plafir d’être regardé
» comme le chef & le protecteur d’Ifraël, vaines 3> & fpécieufes raifbns de la chair & du fang , vous
3» ne putes le retenir; Dieu rompit tous fes liens. »
On trouve aufli à chaque page dans ce recueil ,
de nouvelles' preuves de cette medeftie dont on a
tant parlé, de cette attention délicate & obligeante
pour la réputation d’aurrui, de cette noble indifférence
qu’il fèmbloit avoir pour la fienne ; fur tout cela ,
M. Fléchier n’a pu aller trop loin , & le pauégyrifle
n’a été qu’Hiftoiien.
» Sa modeiHe à ce mot , je ne fais 3» quel rem?rds m’arrête ; je cra r.s de pub’icr ici
» des louanges qu’il a fi fbuvent rejettées, & d'of-
» fenfer ap es fa mort une vertu ou’ il a tant aimée
>» pendant fa vie ; mais acccmpliffcns la juiiice &
» Jouons-le fans crainte, en un temps oh nous ne
pouvons ê :re fufpccls de flatterie , ni :!i:i fu/cept'bie
de vanité. Q d fit p imais de fi graiid s choies ?
Qui les d : av.c (-!□s de retenue ? Rcmpçrtoiril
quelque*avantage :‘ à l’entendre , ce n’etoit pas
cii’il-fût hab ile, mais l’ennemi s’étoit 1irompé. Rendo
t-il ccm -te dune bataille ? Il n’ciubliçk rien .
finon que ç’étoit lui qui l’avoit gagnée. Racomo'til
Gue'encs-u:ies de c=es actions qui Vetvoient rendu
fi célébré ? On eût dit qu’il n’en avrcit été que le
Ipectuteur , & l’on doutoit fi c’éroir lui qui fe
i)ü la Re:r.ommée. Revericit-il de ces
n .gîorieufës campagnes qui rendront fon nom im-
n morte!*? II fuyoit les acclamations populaires, il
v rouglfToit de fes viâoires, il venoit recevoir des
s éloges comme on vient faire des apologies, &
n n’ofeit prefque aborder le Rci , parce qu’il étoit
» oblige, par rèfpeét , de fouffrir patiemment les
» louanges dont Sa Majefté ne manquoit jamais de
» î’hcricrer. »
On peur dire qu’en général ce tableau de la mo-
deftie de M. de Turenne , eft le réfultat le plus
précis de deux mille dépêches contenues dans ce
recueil.
Ce même recueil nous met en état d’éclaircir un
T O U
autrè po’nt fur lequel il reftoit quelques nuages ; il
s’agt du premier 'ravage du Palatinat en 1674.
V o c i comment M. le Préfident Hénault s’éioit expliqué
Fur ce fait :
” Les vainqueurs portèrent par-tout le fer & la
• ” flamme, en repxéfaille des cruautés qui avoient
» été exercées fur quelques-uns de nos fol dais qui
” s’etcient écartés de l’armée. L’éleCteur Palatin, outré
» des malheurs de fon pays , qu’il ne dèyoit imputer
” qu’à fon infidélité , envoya un cartel à M.
” de Turenne ; ce général y répondit avec une mo-
» dération, qui fit honte à l’éleéteur, de cette bravade ;
» mais en même-temps il *ne put s’empêcher de
» mander au rot : que ces ravages refro'ià'ijfoient bien
» plus fes alliés qu'ils ne les réchauffaient. »
M Co’iui, fecrétaire intime & historiographe du
dernier êleCbur Palatin , a révoqué en doute l’hifloire
du cartel ; & M. de Voltaire , dans l’édition du
fiècîe de Louis X IV , donnée en 1769 ,-trouve lès
• ra fon s de M. Colini très-fpécieufes ; il convient cependant
qu’il a vu la maifen de Bouillon pêrfuadée
de cette anecdote ; que le gr?nd-prieur de Vendôme
6c l’amiral de Villars n’en doutoient pas ; que ' le
marquis de Beau vau , contemporain , l’affirme dans
fes mémoires ; mais , dit-il , on n’a jamais vu la
véritable lettre de l’éledeur. ni la réponfe de M. de
Turenne.
Eh bien ! on va les voir , elles font très/curkufes :
L'ÈleEîeur Palatin au vicomte de Turenne , 1?
juillet I <$74.
» L’err.brâfement de mes bourgs & vil’ag s ,
u qu une lettre d’un de vos domeftiques, auffi bien
jj que d’autres avis, donnent fujet de croire avoir
jj été fait par vos ordres, eft une chofe fl extraor-
» dînai re & fl indigne d’une perfonne de votre
» qualité , crue je fuis en peine d’en imaginer les
jj raifons. Tout le monde s’étonne d’autant plus de
jj cette manière d’agir , que vous n’en avez pas
jj nié de même avant votre converflon , en diverlès
» campagnes que vous avez faites en ce pays , contre
jj des e; ne mi s qui n’étoient pas vos païens. Pour
jj moi, bien que je n’en dulTe pas moins attendre ,
jj après les àéfordres qui s*y commettaient par les troupes
jj que vous commandiez tannée pajfée, lorfque vous
jj le traversâtes en qualité d’ami , je ne laide pas
» d’être furpris d’un procédé fl peu conforme aux
jj !qîx de Ja guerre parmi les chrétiens,, & aux
jj affurances que vous m’avez tant de Lis données
jj de votre amitié. Il me femble qu’à toute rigueur
jj on ne met je feu qu’aux lieux qui refufent d< s
jj contributions , & vous lavez que vous n’en avez
jj point demandé à ceux que vous avez fait réduire
jj en cendres. Plufieuis de vos prifonniers m’ont af-
>j furé que vous le faifiez pour vous venger de mes
jj payfans , qu’on difoic avoir mutilé les corps morts
jj de vos foîdais c,u’on y a trouvés. Mais , comme
jj on n’a pas oui dire que mes payfans euffent com-
v mis ci-devant de pareilles barbaries, il y a plus
T O U
v d’apparence qu’elles ont été faites par ceux qne
jj vous avez amenés des évêchés de Strasbourg &
u de Spire, qui, peut-être , ont été bien aifes de
■ss vous Fournir ce prétexte de vengeance ; mais,
3j quand même ce fc-roit de mes fujeis , je ne faurois
» croire que l’inhumanité de quelques particuliers >
» laquelle j’aurois fçyèrement punie fi j’en a vois
jj connu les auteurs, vous dût obliger à ruiner tant
jj de famill s innocentes, ôc à coniumer julqu aux
jj égüfes mêmes de votre religion. D^s aéles u con-
jj traires à l’accioifïcment que vous prétendez avoir
jj fait en la pratique du chrift.aniline par votre con-
» verfién, me fb«k croire que tout cela provient
» de quelque chagrin ou dépit que vous ayez contre .
jj moi. Mais il vous eût:,été facile dfn tirer raifon
jj par des voies plus ufitées entre des. gens d’honneur.
jj Je pehfe que pendant que vous n’attentez rien que
jj contre des miférables, le roi très-chreiien1 vous
» permettra bien le lo.fir de vous fatisfaire de vous
n à moi par un reflentiment plus généreux que celui
jj de la ruine de mes pauvres fujets , & que vous
s> ne reruferez pas de m’àfîîgner par ce porteur le
u .temps, le lieu ôé la manière dont nous nous fer-
j» virons pour nous fatisfaire. Ce n’eft pas d’une
jj humeur de roman , ni pour la vanité de pouvoir
jj recevoir un refus que je vous fais cette demande,
jj mais par un defir de vengeance que je dois à
» ma patrie,; puifque je ne peux à préfeot la faire
jj à la tête üûne armée pareille à celie que vous
jj avez _, & qu’aucune autre vengeance du Ciel fur
» yous , ne me paroit pas u prête que celle que
» yous. pourrez recevoir -de rna main ; je me pro-
« mets èn cette rencontre , que ce pays, qui a
» fèrvi autrefois d'alÿle à feu Moniteur votre père,
» mon grand oncle, en fà difgrace , & que vous
*j avez fi fouvent ruiné , fera le témoin de votre
jj repentir , comme il l’a été de votre dureté & de
jj vos excès.
Le vicomte de Turenne à T éleveur Palatin , même jour.
jj Monfieur, je peux aflurer V. A. E ., que le feu
>» qui a été mis dans quelques-uns de fes villages ,
» a été fans aucun ordre , Se que les foldâts , qui
jj ont trouvé de leurs camarades tués d’une allez
jj étrange façon , l’ont fait à des heures qu’on n’a
w pu l’empêcher. Je ne doute pas que V. A. E., ne
» me continue l’honneur de fes bonnes grâces ,
jj n’ayant rien fait qui pût m’en éloigner.
On voit à préfent que M. le P. Hénault éroit
très-bien ir.ftruit ; niais , ajoute M. de Voltaire, M-
Colini reproche à M. le P. Hénault, d’avoir dit que
M. de Turenne répondit à ce cartel , avec une
modération qui fit honte à l'éleSkur , de cette bravade.
v La honte, dit M. de Voltaire -, étoit dans l’in-
j> cendie, lorfqu’on n’étoit pas en guerre ouverte
jj avec le Palatinat, St ce n étoit point une bravade
jj dans un prince juftement irrité, d* vouloir fe battre
» contre l’auteur de ces cruels excès.
Nous n’avons rien à oppofer à cette réflexion.
T O U 32J
Nous voyons que l’éleéleur Palatin reproche à
l’armée Franco!le , d’avoir commis de parei s exces
dès l’année précédente en effet voici une lettre dut
marquis de Louvois au vicomte de Turenne , que
nous trouvons dans ce recueil , à la date du 10 novembre
1673.
jj M. l’eleéleur Palatin ayant fait préfenter un
» mémoire au ro i, pour fe plaindre de plufieurs
jj pillages ôc violences qui ont été faits dans fes états
jj par les troupes que vous commandez , Sa Majeite
jj m’a ordonné de vous l’adreffer , & je ne vous
w cèlerai point qu’elle a pat u un peu furprife de voir
» ce qui! contient.
On ne doit point être étonné de voir M. de
Louvois, à qui l’opinion .publique attribue l’embrâfe-
naent du Palatinat en 1674 , prendre ainfi en 1673 ,
la défenfe de i’éle&eur Palatin : d’une année à l'autre
les intérêts étoient changes*
Voici la réponfe de M. de Turenne, du 18 novembre
:
jj Quant au mémoire de M. î’éle&eur Palatin ,
jj j’ai fait toutes les perquifitions pofîibles des dé-
jj fordres dont il s’eft plaint ; ce qu’il dit en général
jj s’eft pu faire dans un village ; on n’y loge dans
j? aucun lieu fermé, jj
L’amour fit faire à ce Page Turenne les deux,
grandes fautes de fa vie ; la première, lorfqü’en 1650 ,
la ducheffe de; Longueville l’engagea .dans le parti
des princeS alors prifonniers, & le rendit rebelle;la
fécondé en 1670, lorfque l’intérêt de Madame de
Çoëtc^ien le rendit mdiferet, jufqu’à révéler le fècret
dé l’état.
On fait que M. de Turenne fut tué près Salsbac d’un
coup de canon, le 27 juillet 1675 , jour vraiment
néfafte dans l’hifloire de France d’après cet événement.
jj 90. Quelle étoit fa joie , dit M. Fléchier , Iort
jj qu’après avoir forcé des villes,.il voyoit fon iîluftre
» neveu, plus éclatant par fes vertus que par la
» pourpre , ouvrir & réconcilier des églifes fous les
jj ordres d’un roi auffi pieux que puifiant 1 L’un
» faifoit profpérer les armes , l’autre étendoit la
» religion ; l’un abattoit des remparts, l’autre redref-
jj foit des autels; l’un ravageoit les terras des Phi-
jj liftins , l’autre portoit l’arche autour des pavillons
jj d’Ifraël ; puis unifiant enfemble leurs voeux,
jj comme leurs coeurs étoient unis , le neveu avoit part
» aux fervices que l’oncle rendoit à l’état, &. l’oncle
jj avoit part à ceux que le neveu rendoit à leglife.»
Lorfque M. Fléchier parloit ainfi du cardinal de
Bouillon, neveu de M. de Turenne , ce prélat,
grand aumônier de France , & chargé de bénéfices,
viyoit dans la faveur & dans l’éclat que la gloire
de M. de Turenne avoit dû répandre fur fa maifon.
Voyez à l’article le T eiîLIER-Louvois , arche-?,
vêque de Reims, comment l’abbé d’Albret ou de
Bouillon, avoit été fait cardinal dès fa jeunefiè ;
il devint dans la fuite doyen du faeré collège , a; ai s