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Marc-Aurèle , par une bonté & une générofité qui
*ui étoient propres, voulut affocicr à l’empire fon
^rère adoptif, & lui donna le nom de Virus,
üu’avoient également porté le père de Cooemo-
dus & celui de Marc-Aurèle 5 celui-ci prit ce nom
Aùrèle parce que cécoit le nom de familie de
Tite-Àntonin , par lequel il avoit été adopté. Ainfi
les deux frères adoptifs régnèrent enfemblc, l ’un
fous le nom de L. Virus , c’eft le fils de Coramo-
dus Verus , adopté par Adrien j l’autre fous celui
de Marc - Aurèle, c’eft Marcus Annius Verus ,
Plr A?ricn Veri^‘müs> & qui fous ce nom
de Marc-Aurèle eft encore & fera toujours un ob-
jet de vénération & d’amour pour l’univers. Dans
^ ARC-*^ÜREI*X > ( Voyez cet article ) qui
eft de M. Turpin , on trouve quelques erreurs qu’il
eft néee flaire de relever ici. « Marc- Aurèle , dit
Turpin, partagea le pouvoir fouverain avec fon
** frere Vtrus , gendre d’Antonio le pieux **.
i ° . Son frere Verus, ces mots font exaéh ,
mais- dans le langage romain feulemmc ; ils é oient
frères adoptifs, d’ailleurs, qe piqué tous deux -om-
més Verus, ils étoient de deux familles différentes.
i ° . Verus n!éroir pas gendre d’Anronin , c’é oit
Ma c A rèle qui i’étoit. A la véri é Adrien avoit
réglé que Verus épouferoit la fille d’Antonin, &
Marc-Aurèle la foeu de Verus ; mais A >onin.
parv enu à 1’ mpirc, avoit changé ces difpofi ions ,
& «tqfc pris pour ge dre Marc-Au èle , q aü «voit
feui nommé pour fo fucceffeur ; la générofité de
Marc-Aurèle en décida autrement, il p.rtag.a
rem pire avec Verus, & il en fit f«n gendre. *
M. Turpin continue :
« Le partage defaut ri équi fomente les haines,
»• ne fit que refferre: 1 s noeuds de leur amitié
» fr-femelle. II fembloit qu ils n’avoie t qu’une
*» ame , tan; il y avoit de co formité dans leurs
» actions.
3°. Ceci eft démenti par la v :e entière & de
Verus & de Marc Aurèle. Jamais deux âmes ne
furent plus diff rentes, jamais aérions ne furent
moins conf rroe-. Ma c Aurèle fut fans celle oc-
^rupé à «éparer l^s fautes & es ter s de Verus,
c’eft t ut ce qu’ils eurent de commun, l'évènement
prouva que la fagefle d’Antonin avoit mieux pourvu
au faluc public, que la bonté de Marc-Aurèle.
Verus fut la copie & même exagérée de fon père.
& la rcco »roiflance le f rça d’abod à quelques
ég rds, à quelque docilité Pour les avis de Marc-
Aurèle, il ne arda pa à fecouer le joug & à fe
plonger dans la mollellc. Ma c-Au èle , pour l’y
arracne. ou pour l ’empêcher du moi s de donner
fès défordres en (pcéticle à la capitale, parvint
à lui infpirer le defir d’aller faire la gue re aux
Pdfthes. A peine étoit-il parti, qu une maladie , t tût de fon intempé ance & de fon incontinence,
rs’.kd à Cinoufe 3 Maic-Aurèk y courut & lui ren- I
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dit tous les foins de l’amitié. Verus guérit, mais
il ne fe corrigea point. Pendant qu’on rectvoit
de l’Orient les nouvelles les plus facheufes & qui
dévoient le plus accélérer la marche de l’armée de
Verus t cet indolent général s’amufoit à la chaffe
dans les forêts de 1 Apulie > preffé enfin par le cri
public , il s’embarqua , mais i! féjourna fur fa route
à Corinthe, dans Athènes , dans les villes maritimes
de la Lycie , de la Pamphilie, de toute l’Afie mineure,
comme s’il eût fait un voyage de fimplc
curiofité j par-tout on lui donnoit des fêtes, partout
il fe livroit aux plaifirs. Il arriva enfi.i à An*
tioche & s’y fixa au lein des voluptés donc cette
ville abonde , il y paffa les quatre a; nées que dura
la guerre, qu’il lailia faite a fes htfotcnan- , & il
revint triompher à Rome avec Marc-Aurèle. Il
y rappona de 1 Orient ure pefte ~ui ravagea tout
l’empi'.e, des vices fo tifiés & r. ffin-s par (on lé-
jou- à Antioche, & des troupes de comédiens 3c de
muficiens, auxq els il prodiguoit, ainfi qu’à de
vi.s affranchis, fifaveu & (acmfiance, s’é.oign lit
toujours de pl s en plus & de la vertu & des con-
feds de Marc-Aurèle. Pendant qu’ 1 uinoit fa 'antS
par fer. d bau.hcs, il rui. oit »’état par fes profu-
fi n j Capitolin nous a confervé de* ‘étails fur un
feftin que donna V e ru s , & o ù , indépendamment
de la fomp uofité des mets & d-s vins , il fi préfet
* chaque convive d’un je ne écha fon qui ieur
avoit fervi a bore, d’un maître d’hôtel avec un
f rvitc de vaiff Uc compjet ; il leur donna de p us
à tous , les mêmes animaux vivans qui avoient été
1. rvis morts fur la tabl- , foif quadrupèdes , foie
oifeaux j tous les vafes à boire furenr pareillement
d nnés a ceux cui s’eu fervoient, & on en chan-
geoit chaque fuis qu’on buvoit, ils éro cot tous
p écieux & par la matière du vafe & par les orne-
mens , o r , argent, criftaux, picireries. Des vafes
d o r , remplis des parfums les plus exquis, furent
pareillement donnés a» x convives ; ils avoient t< us
fur la tetç des couronnes de fleurs qui n’étoient
p int de la faifon avec des penda s tifîus d’o r ,
toujours aux dépens de Verus le qui leur reftèrtnt.
Il leur dor na enfin , pour les reconduire , des lit ères
brillantes d’argent avec les mulets & le mulcricr.
Le fiatcurs applaudirent à cette monftreufe magnificence
j Marc-Aurele en gémit & l’état en founrir*
Vertu prit infenfibbment p'efqne tous !cs vices
de Néron, il couroit conjme lui les rues & les
tavernes pendant la nuit, prenait querel c avec
des gens du peuple, & remporoit f uvent au palais
des maïques hontenfes de ccs vils combats 5 il pre-
noit parti avec fu e x dans les courses de chariots
& les jeux du cirque, ce qui lui attnoit louvent
des huées, des rep oches & des injures de la pars
de la fa&ion contre laquell: il fe déclaroir. Il ai-
moit les c mbats de gladiateurs au point d’y paroi-
tre que qu.fois comme a&eur.
Marc-Aurèle qui ccffoit de lui donner des con-
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feils devenus trop inutiles, lui donnoit âu moins
de grands exemples ; il faifît l’occafion de les lui
donner d’une maniéré plus ditefte, Verus avoit dans
TEtrurie (la Toftane ) une maifon de plaifance ,
ou plutôt de débauche . où il vivoit dans la diffô-
lution avec des affranchis & des amis encore plus
.vils ; il crut ne pouvoir fe difpehfër d’inviter Marc-
Aurèle à l’y venir voir, Marc-Aurèle accepta la
proj'ofition qu’on avoit cru peut-être q'u’il refufe-
roit, il y vint paffer cinq jours pour montrer à cët
indigne empereur comment un empereur devoit
vivre, même à la campagne, même dans le tems
& dans , le féjour deftiné au repos ; on l’y vit toujours
occupé d’affaires, tenant confeil, rendant la
juftice , pendant que Verus fe livroit à fes exces
& à fes défordres accoutumés ; voilà toute la con-
formité qui fe trouvoit dans les aérions de ces deux
princes, voilà comment ils ne faifoient qu’une
ame. .
Aux folies de Néron 3 Verus joignoit celles de
Caligula fans la cruauté de l’un & de 1 autre à la
vérité , du moins le penchant quil- pouvoit avoir
à la cruauté , fut toujours réprimé par MarG-Aurel«. :
Il avoit , comme Caligula , une- affeftion.extrava- ,
gante pour un cheval qu’il nommoit l olfeau , 81
dont il donna aufti lo nom à uo énorme vafè a boire
rélêrvé pour les jours de débauche les plus folem-
nels. Il nouiriffoit fon cheval de raifins fecs 8c de
p.iftacbes, il fe le faifoit amener dans fon palais,
couvert d’une houffe de pourpre *, il récompenfoit
fon agilité à la courfe par des boifïeaux de pièces
d’or & par des marques d honneur, comme Caligula
en avoit ufé envers fon cheval. C ’étoient là
les modèles que prenoit Verus pendant qu’il avoit
fous les yeux l’exemple de Marc-Aurèle.
Après la manière dont Verus s’étoit comporte
dans la guerre contre les Parthes , Marc-Aurèle
ne voulut point le laiffer aller firul contre les Mar-
comans, encore moins le laiffer dans Rome ou il
eût cabale contre fon bienfaiteur , ils partirent
enfemblc pour cette guerre au grand mécontentement
de Verus, l ’an 166 de J. C. Vefus , à fon
ordinaire , n’y fit rien & s’ennuya de tout , regret .
tant (ans ceffe les plaifirs de Rome & tournant tous
fes voeux de ce côté. Il fut impoffible enfin de le
retenir, & d’Aquîlée , où les deux empereurs pafi-
foient l’hiver pour être à portée d’entrer au prin-
tems dans la Pannonie , il voulut abfolunxnt retourner
à Rome, ce qui obligea Marc-Aurè e de
partir avec lui (en 169 ) , ils voyageoient enfem-
ble & dans la même voiture, lorfque tout-à-coup
Verus fut frappé d’une apoplexie violente ; on le
faigna fur-le-,champ , & il fut tranfporté dans la
ville d’Altinum auprès de laquelle on fe trouvoit.
Il n’y vécut que trois jours, & mourut fans avoir
recouvré la parole. Il n’étoit âgé que dç trente
neuf ans. Il avoit régné environ neuf ans avec
Marc-Aurèle, Si ces politiques machiavelliftcs,
plus prompts encore à foupqônner le crime qu’à le
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commettre , prenoient un plaifir malin à obferver
que cette mort arriva bien à-propos pour Marc-
Aurèle & pour l ’empire, fi, bien moins pour ménager
une exeufe à Marc-Aurèle que pour rendre un
crime viaiftmblàble de fa part , ils difent que l ’amour
même du genre humain pouvoit engager à
facrifièr une tclle viél'mé au bien public, il fumt
de répondre avec-Capitolin que c’eft un facrîlège
d’ofer outrager d’un foùpqon la vertu de Marc-Au-
rèle , hoc nef as eß de Marco puiari j mais il y a fur
cette mort d’autres conjedures, qui ne font peut-
être pas mieux fondées. Nôüs avons dit que , félon
les arrangemens faits par Adr.en & changés par
Antonin, Fauftine, fillè .d’Antonin , dévoit épou-
fer Verus , & Fabia, foeur de Verus, devoit épou-
ferMarc-Aurèle 5 Antonin aima mieux prendre pour
gendre Marc-Aurèle , & Verus époula Lucîile 9
fille de Marc- Aurèle & de cette Fauftine qu’il avoit
dû époufer ; mais Verus avoit, dit-on , confervé
d’autres liailôns avec Fauftine, femme plus digne
de lui que de Marc-Aurèle , elle avo;t eu pour lut-
des complaifances criminelles, dont il n’avoit point
fait myftère , & c’étoit , difoit-on , pour le punir
de cette infâme indiferétion , qu’elle l’avoit em-
poifonné. D’autres lui donnent du moins un motif
plus honnête , ils difent, que Verus entretenoit
avec Fabia , (a propre foeur, un commerce incef-
fueiiXïS. & qu’ils avoient formé enfemble le complot
de faire périr ce même Marc-Aurèle qu’elle avoit
dû époufer & que fou ambition regrettoit fans
1 doute ; ils ajoutent que Fauftine y inftruite de ce
projet , en prévint l ’exécution par la mort de
Verus.
Mais il eft rare que l ’effet du poifon. foit de
donner une attaque d’apoplexie , & d’ailleurs
qu*eft-il befoin de recourir à tous ces moyens
odieux d’expliquer comment un prince , livré dès
l ’enfance aux excès & aux diftoiutions de tout
genre , meurt à trente-neuf ans d’apoplexie oa
d’indigeftion.
Marc-Aurèle fit porter le corp? de Verus a«
Maufolée d’Adrien, & lui fit décerner les honneurs
divins , mais dans un difeours qu’il prononça au
fénat à cette occafion , il parla de lui affez franchement
& s’applaudit en quelque forte d’être
délivré d’un collègue dont la négligence, pour nè
rien dire de plus, nuifoit aux affaires.
Nous trouvons fous le même règne (de Marc-
Aurèle ) un Martius Verus, général diftmgüé ^
que cet empereur charge de faire la guerre au rebelle
Avidius Caftius , qui s’étoit fait proclamer
empereur.
VESAL , X André ) ( hiß. lit. mod. ) médecin
célébré de Charles-Quint & de Philippe II. Son
père , fon ayeul, fon bifayeul, fon trifayeul, s*ë-
toient illuftrés par l’étude de la médecine & furent
tous effacés par lui. Vefal étoit né à Bruxelles ,
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