I N T R O D L C T I O ^ ' . JNTRODUCTIOiN'.
le proditclf'iir. II scrait suporllu de dire qiiVlle répond aussi aux besoins
pressés <le la consommalion.
An eonlraire, les bons animaux de Iravail ne peuvent être des animaux
précoces, ni pliysiologiquenicnl, ni économiquement. Je viens d'iiidiquer
les raisons pliysiologiques; le point de vue économique conduit aux
mêmes consé([ucnces. Ce n'est pas dans les premières années de la vie
([ne la force de l'animal esl snllisante pour accomplir les travaux ((u'on
exige (Pline bêle de labour et do charrois. S'il esl permis de demander
quelques services aux jeunes boeufs, c'est ([ue, le travail coulant cliei',
l'éleveur vcnl chercher à diminuer les dépenses de nourriture et d'entrelien,
sans jaiiiais croire ])our(anl (¡uelles sont payées par le travail iniparfail
des jennes. D'ailleurs, un exercice modéré est favorable au développemenl
de la force el de l'éner^rie; il conq)iète Tensemble des prali([ues
propi-es à communiquer à l'animal les qualités pour lesquelles on Télève;
il coiinneiice son éducation, développe son adresse. Mais ce n'est ipie
lors(|u'il a alleinl la force de l'àgv adulte que l'aninuil de travail possède
la pléniliide de ses moyens, el qu'il donne toul son rendement utile. Il
est, sans doute, dans l'intéi'èl de l'éleveur de rapprocher le terme de ce
dévfloppemeni ; mais le but inème cpi'il veut atteindre s'oppose à ce qu'il
le préci])ile. 11 s'oppose aussi à ce qu'on se défasse trop vite d'un animal
qui remplit bien sa lâche, qui donne beaucoup de travail et un travail de
ipialilé supérieuiT, parce qu'il a acquis son maximum de force el d'hahilelé.
l)ailleur.=;, en prenant des boeufs fails et en les ijardant lonylemps,
l'éleveur échaj)pe aux nukomples, aux difficultés el aux dépenses qu'en-
Irainenl le (ravail, le dressag;c cl rentrelieii des jeunes animaux. 11 est
donc dans la destinée du boeuf de travail d'arriver tard à la boucherie.
Mîiis il ne s'ensuil pas (jue i'épo([ue de son abatage doive être trop reculée,
car on n.squerail de ne pouvoir lirer aucun parti des facultés dig-eslives
d'uti animal vieilli el fatigm^, qui ne saurait jamais être, quoi (ju'on fasse,
un utilisateur aussi avantageux que la bête parfaite de boucherie.
Celte manière de voir semble être en contradiction complète avec l'opinion
qui considère et appelle comme un progrès l'iibatage moins tardif
des races bovines. Le désaccord subsiste, ou cflel, si le progrès dont il
s'agit prétend s'accomplir par l'union inconciliable de la plus graiule aptitude
au travail avec la plus grande aptitude à rengraisseraent, et si les éleveurs
cherchent à obtenir, des mêmes animaux, la même somme de rendement
utile qu'ils retireraient de Temploi de deux aninuiux également
parfaits, chacun dans sa spécialité. Dans ce cas, la prétendue ])récocité
relative sera achetée par une consommalion très-coùlouse et un travail
imparfait et dispendieux. Mais le désaccord cesse, si le progrès résulte
d'une amélioration dans ralimentation des animaux coïncidant avec l'emploi
d'inslruments de Iravail el de transport plus parfaits, avec l'amélioralion
des roules, en un mot, avec des modificalions imporlanles du milieu.
La perfection idéale des conditions d'exploifalion ne consiste pas dans la
réunion des plus grandes difficultés à vaincre : chemins escarpés, parcours
à travers les bois sans sentier tracé, roules défoncées, boueuses,
impraticables, engins pesants, incommodes et grossiers. Vanter une i-ace.
qui sait se tirer d'un pareil pas, c'est faire l'éloge des bêles, mais ce n'esl pas
faire celui du cultivateur, de sa capacité industrielle. Avec des conditions
moins rudes, le boeuf ne reste pas moins un animal de travail; seulomenl
la somme d'efforts et d'énergie qu'on lui demande diminue, et il s'éloigne
moins des animaux de boucherie, parce que des améliorations notables
])euvcnt être alors obtenues sous le rapport de la conformation et de la
précocité. C'est dans ce sens qu'il faut désirer que l'épocjue de Tahatage
des boeufs de travail soit le moins retardée possible. 11 ne faut jamais
oublier en effet que, même quand il est parfait pour le travail, le boeuf
doit finir à ra])altoir.
La conclusion praliijue à tirer de l'impossibilité de concilier physiologiquement
cl économi({uement les caractères des meilleurs animaux de
boucherie el ceux des meilleurs animaux de travail, c'est qu'il est préférable,
dans tous les cas, de tenir côte à côte, dans la même exploitation,
(les bêtes pour le Iravail et des bêles pour l'engrais. Ces bêtes de travail
seront-elles des chevaux on des boeufs? Ce n'est pas ici le lieu tl'examiner
cette (¡uestion. il suffira de dire, d'une manière générale, (pie le Iravail
des boeufs restera le plus avantageux dans beaucoup de cas, là, notamment,
où la conCguralion du sol l'iippelle, là aussi où l'exigence du che-
\'al connue consommateur et son infériorité comme producteur d'engrais
ne sont pas compensées par les avantages de sa vitesse- ou de sa va le nicommerciale.
Les exploitations trop peu élendues pour que l'enlretien simullané de
bêtes de travail et d'animaux d'engrais y soit possible n'échappent pas à
l'application de ces principes, car la nature des choses ne change pas pouielles;
mais elles peuvent arriver au même résultat par d'autres procédés.
Telle pourrait être, dans certains cas, l'association d'un petit nombre de
voisins; telle serait encore la location des animaux, ou l'exéculion des
travaux à l'entreprise, par une combinaison analogue à celle qui conduit
aujourd'hui les machines il biUlro de commune en commiino. Une fois le
principe reconnu, i'espril industriel ne sera jias embarrassé pour Irouver
une solution. Le prolil gTaudirail pour tous. La produclion d'animaux de
ualure différeule se localiserait dans les pays les mieux placés pour leur
élevage, ou resterail distincte dans les domaines les mieux conduits; leur
exploitation s'individualiserait dans chaque centre en raison des besoins.
Une des conséquences les plus directes et les plus heureuses de cette
org-anisatiou serait la diminution des bêtes de travail. L'idée de mesurer
les progrès agricoles par le nombre de tètes de bétail entretenues sur une
surface donnée est, à mes yeux, nue des plus fausses et des plus fâcheuses
; elle fait passer la quantité avant la valeur; elle maintient les
producteurs dans cette pensée, oii ils sont trop malheureuscraejit enclins
à persister, tpie le succès et le profit sont plus dans l'étendue de leur domaine
(pie dans la concentration de leur puissance; plus dans la production
(pumd même (pie dans l'aïuélioration des moyens de produclion. De
même (pie le rendenieni en céréales s'élève iiien davantage ipianil les
agents de fertilisation sont ap])liqués sur une surface restreinte (|ue lor.s-
(pi'ils s'éparpillent sur une étendue trop grande, ainsi les pro(luits des
aiiimaux sont bien plus avantageux, pour la (piautité et pour la (pialité,
avec nu bétail bien noni-ri (pi'avec un hétin'l uiunbreux; le funiiei', tout
particulièrement, est pins riche, plus abondant el coùle moins cher;
l'ainélioratiou générale pent suivre l'aniélioration du bétail; c'est là une
(•onsé(|ueuce logi(pie et capitale. .'Viissi, dans la majorité des cas, le conseil
que la zootechnie doit donner à ceux i|ui veulent faire le premier pas
vers la perfection, c'est de diminuer le nonihi'e des animaux.
Aujourd'hui presque toutes les races bovines sont soumises à un mode
d'élevage (|ui a pour point de départ l'utilisation des animaux comme
hi'tes de travail, avec la prétention plus on moins avoiu'e d'en faire plus
tard d'excellentes bêtes de boucherie. Le travail étant le plus coûteux de
tous les produits que donne le bétail, l'éleveur songe à tirer parti le plus
tot possible (le ses animaux; il attèle un grand nombre de hèles de tout
âge, qui se fatiguent et s'annihilent mutuellement pour donner nn (ravail
imparfait; il est obligé de répartir ses ressources fourragères entre des
animaux nombreux, de mesurer la ration à ses bêtes. Il façonne ainsi des
animaux sobres, qui ne peuvent être que des consommateurs très-pro-
(ligues quand arrive la mise à l'engrais, et dont la vie se passe, ii cliei'cher
ainsi leur assiette dans un milieu conveiudile sans jamais le trouver. Cette
disproportion entre le nombre des animaux de travail, les fourrages à
consommer et le Iravail à accomplir, force f'éleveur à envoyer beaucoup
de veaux trop tot ii la boucherie; elle lui fait payer cher un petit travail,
un maigre fumier, et entretient la pauvreté combinée delà culture
et du bétail.
La (bminulion des animaux de travail, en proportion de leur supériorité
d'aptitude, laisserait disponible une somme de fourrages suffisante