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28. Et il avoit donné cet ordre à ses officiers : Prenez garde quand
Amnon commencera à être troublé par le vin, et que je vous ferai
signe : frappez-le , et le tuez. Ne craignez point ; car c’est moi qui
vous le commande. Soyez fermes, et agissez en hommes de coeur.
29. Les officiers d’Absalon exécutèrent donc à l’égard d’Amnon le
commandement que leur maître leur avoit donné ; et aussitôt tous
les enfans du roi se levant de table montèrent chacun sur leur mule,
et s’enfuirent. 30. Lorsqu’ils étaient encore en chemin, il courut un bruit qui vint
jusqu’à D avid, qu’Absalon avoit tué tous les enfans du ro i, sans qu il
en fût resté un seul.
§. IV. Absalon s'enfuit.
3 1 . Le roi se leva aussitôt, déchira ses vêtemens, se jeta par terre ;
et tous ses officiers qui étaient près de lui déchirèrent leurs vêtemens.
32. Alors Jonadab, fils de Semmaa frère de David , prenant la parole
, dit : Que le roi mon seigneur ne s’imagine pas que tous les enfans
du roi aient été tués. Amnon seul est mort, parce qu’Absalon avoit
résolu de le.perdre, depuis le jour qu’il avoit fait violence à sa soeur
Thamar. 33. Que le roi mon seigneur ne se mette donc pas cela dans Fesprit,
et qu’il ne croie pas que tous ses enfans aient été tués ; Amnon seul
est mort.
34. Cependant Absalon s’enfuit ; et celui qui étoit en sentinelle,
élevant les y eu x , vit une grande troupe de monde qui venoit par un
chemin détourné à côté de la montagne. 35. Jonadab dit au roi : Voilà les enfans du roi qui viennent ; ce
qu’avoit dit votre serviteur est arrivé. 36. Il n’eut pas plutôt dit ces mots , qu’on vit paroitre les enfans
du roi. E t lorsqu’ils furent arrivés , ils élevèrent leurs voix et pleurèrent
; et le roi et tous ses serviteurs fondirent en larmes.
37. Absalon s’étant enfui, se retira chez Tholomaï, fils d Ammiud,
roi de Gessur ; et David pleuroit son fils Amnon tous les jours.
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38. Absalon demeura trois ans à Gessur, où il étoit venu se réfugier;
39. Et le roi David cessa de le poursuivre, parce qu’il s’était enfin
console de la mort d’Amnon.
C H A P I T R E XIV.
§. I. Joabfait parler une femme enfaveur d'Absalon.
1. J o ab , fils de Sarvia, ayant reconnu que le coeur du roi se tour-
noit vers Absalon,
f Fit venir de Thécua une femme sage, et lui dit : Faites semblant
d’être dans l ’affliction ; prenez un habit de deuil, et n’usez point
d’huile de senteur, afin que vous paraissiez comme une femme qui
pleure un mort depuis long-temps.
3. Vous vous présenterez au roi en cet état, et vous lui tiendrez
tels et tels discours. Et Joab lui mit en la bouche toutes les paroles
tju’elle devait dire.
4. Cette femme de Thécua s’étant donc présentée au roi, se jeta à
terre devant lui, et étant ainsi prosternée, lui dit : Seigneur, sauvez-
moi.
5. Le roi lui dit : Que.demandez-vous? Elle lui répondit : Hélas ! je
suis une femme veuve ; car mon mari est mort.
6. Votre servante avoit deux fils qui se sont querellés dans les
champs , lorsqu il n’y avoit personne qui les pût empêcher, et l’un
d’eux a frappé l ’autre, et l ’â tué.
7. Et maintenant tous les parens se soulèvent contre votre servante,
et me disent : Donnez-nous celui qui a tué son frère, afin que
le sang de son frère qu’il a répandu soit vengé par sa mort, et que
nous fassions périr l’héritier ; et ils veulent éteindre la seule étincelle
qui m est demeurée, afin qu’il ne reste plus rien à mon mari sur la
terre qui puisse faire revivre son nom.
8. Le roi dit à cette femme : Retournez-vous-en chez vous, je
donnerai ordre que vous soyiez satisfaite.
9. Elle lui répondit : Mon seigneur et mon ro i, s’il j a en ceci de