
que c*eft un habillement ou plutôt un manteau des.
Thraces , QçomSi j cependant le mot mçû défîgne
, dans le Lexique de Cyrillus, une ceinture, une
tunique j & la chlamyde. Le Gloflaire d'Hérodote le
’définiffaufli une bandelette , une ceinture 5 mais il l’écrit
tipfi. Si l’abfence du <r n’ eft pas une erreur de copifte,
on pourroit croire que la laine, indiquée par ce mot,
auroit été la matière de ces divers habillemens.
N°- IV . Emploi dés habillemens fur les figures
antiques.
Le livre des coflumes ayant pour bafe les figures antiques,
il eft néceflaire de fixer l’ opinion des leCteurs
fur la fidélité avec laquelle les fculpteurs anciens ont
copié les véritables habillemens dans certaines occa-
fions, tandis qu’ ils s’en font écartés à deflein dans plu-
fiieurs autres. C e point d’érudition a été traité par mon
fâvant confrère M . Vifconti, avec toute l'exactitude pqfble,
dans une lettre ( inférée dans la Décade philoJ'o-
phiquèg 15 floréal an 12) dont je vais donner l’extrait.
' « On eft en général porté à croire que les ftatues
grecques & romaines nous fourniffent des modèles parfaits
des coftumes ufités à l’époque où elles ont, été
exécutées. 11 eft certain cependant que ces coftumes ne
font pas en général ceux des tems où les portraits ont
été fculpté.s, & que les fculpteurs grecs ont employé
pour les.portraits héroïques (ceux des dieux, des héros
mythologiques & des hommes célèbres qu’ on a voulu
leur aflïmiler, quelquefois même du vivant de ceux-ci),
des habillemens qui tenoient à des ufages plus anciens.
» Pour le prouver, il, eft inutile de recourir aux
fujets de l’hiftoire héroïque. On fent bien que le cof-
tume des figures dont ils font compofés , n’ a jamais pu
être celui d’une nation, même peu policée..damais un
chafleur, à moins que ce ne fût un fauvage, n’ eft. allé à
Jà chaffe fans autre vêtement que celui du Mêléagre du
mufée Napolépnjamais guerrier n’ a combattu dans^ le
coftume du héros qu’ on appelle le Gladiateur-Borghéfe.
Achille n’affiftoit pas au confeil du Roi des Rois n u ,
Comme on le voit dans le bas-relief du Capitole. De
même Laocoon n’ offroit pas nu des facrifices a Neptune.
Enfin, les foins que prend Ulyflè après fon naufrage
pour fe préfenter décemment devant la fille d’Alcinoiis,
ne no.us permettent pas de penfer que Jafon fût nu à la
Cour d’ Aétès ou à celle au roi de Corinthe lorfqu’ il
S* entretenait avec Médée ou avec Créufe , quoique
tou s les bas-reliefs le représentent dans cet état.
*• On ne veut parler ici que des portraits héroïques
d ’hommes fupérieurs , qui ont vécu à l’époque de la
civilifation la plus parfaite de la Grèce ou de Rome >
portraits faits même de leur vivant. Lorfque Cicéron
Reproche à Verrès les ftatues nues qu’on avoit érigées à
Syracufe en l’honneur de fon fils, ce n’eft pas l’indécence
ni l ’infidélité du coftume qu’ il blâme j mais il
jblâme le père d’avoir cru fon fils digne d’un portrait
héroïque. En effet, la ftatue de Pompée, que l’ on voit
encore à Rome, eft du même tems cpie celles du jeune
V e r rè s , 3c cependant elle eft nue. Celle d’Agrippa ,
trouvée près ou Panthéon, & tranfportée à Venife, l’eft
auflft. Nous avons les ftatues nues ou ornées feulement
de quelques légères draperies grecques, d’ Augufte, de
T ib e r e , de Drufus , de Germanicus, de Claude , de
Domitien, de Nerva , d’Hadrien, de Marc-Aurèle , de
Lucius-Verus, de Septime-Sévère & de Macrin. Nous
en avons même de femblables qui repréfentent des per.
fonnages romains, inconnus : tel eft le prétendu Germa-
nicus du mufée Napoléon ; telles font deux belles fia.
tues qu’on voyoit jadis dans les jardins de Sixte-Quint
& qui ont été tranfoortées en Ruflie. Preuve certaine
que l’on a fculpté des portraits héroïques, même de
perfonnages qui n’étoient ni Empereurs ni Céfars, car ;
nous connoifions tous les portraits de la famille impériale
à la belle époque des arts.
» Il faut remarquer à ce fujet un fait affez fingulier :
c’eft qu’aucune ftatue d Empereur (celles dont la tête
n’eft pas une reftauration, & dont, par conféquent, Ja
vérité eft inconteftable ) ne le fait voir habille avec la
toge , à moins qu’ il ne foit repréfenté exerçant les fonctions
pontificales, & qu’ il n’ ait pour cette raifon la toge
ramenée fur la tête : cependant cet habillement étoit
l’habit civil des Empereurs romains, & ils le portent
fouvent fur les médailles.
« De même les ftatues des hommes illuftres par leurs
talens paroiflent dans un coftume idéal. Celles de Pin-
dare, d’Euripide, de Démofthène., d'Ariftote, de Mof-
chion, d’Ariftide-le-Sophifte, qui font inconteftables,
n’ont qu’un grand manteau g re c , jeté d’une manière
pittoreique fur le corps nu. O r , ce coftume n’a jamais
été celui des Grecs. Quelques cyniques feuls l’aVoient
adopté.
» Les fculpteurs eurent fans doute moins de liberté
lorfqu’ils repréfentèrent dans les bas-reliefs d’un arc de
triomphe ou de quelqu’autre monument public, des
événemens de leur âge > mais ils trouvèrent, dans ce cas
même, quelques moyens d’ y introduire des figures nues:
i ° . ils placèrent, parmi les perfonnages véritables , des
figures allégoriques, q u i, heureufement pour la clarté
des fujets , étoient en même tems des perfonnages mythologiques.
Rubens en a ufé de même dans la vie de
Marie de Médicis 5 mais fes figurés allégoriques, tirées
de la mythologie ou des iconologies bizarres , n’ont pas
pu être auffi facilement reconnues par fes contemporains.
C ’eft ainfi que Rome repréfentée en amazone, le
génie du Sénat & celui du peuple romain, la Viétoire,
le génie du Champ de Mars, les Divinités locales des
fleuves & des villes, fe trouvent avec les figures hifto-
riques dans les bas-reliefs qui ornoient autrefois les
arcs de triomphe de Trajan & de Marc-Aurèle, dans
ceux du grand piédeftal de la colonne d’Antonîn-Pie,
& dans les fculptures des colonnes trajane & prétendue
antonine.
» i ° . Les anciens artiftes travailloient avec beaucoup
de liberté les draperies des figures véritablement hifto-
riques j ils favoient rendre pittorefques les coftumes de
leur tems par la fuppreffion de plufieurs de leurs parties.
Nous trouvons dans les bas-reliefs de la colonne trajane
uelques détails du coftume militaire de l’Empereur &
es foldats, que nous connoîtrions à peine à l ’aide des
écrivains, mais qu’aucun autre monument ne nous a
préfentés. Les fculpteurs ont cru fans doute que la petite
dimenfion des figures, diminuées encore par la diftance,
les difpenfoit de rechercher les nudités, 8c que les grâces
de leur po fe , de leur diftribution en feroient tout le
charme. La grande fidélité avec laquelle ils y ont repre-
Tenté les coftumes , nous mettent à portée de juger les
fuppreffions importantes que les autres artiftes fe per'
mettoient. On voit dans ces précieux bas-reliefs l’ouverture
fupérieure de la tunique, aflujettie par un rang de
boutons. On y voit des efpèces de focalia ou de cra-
vattes, que le favant Fabretti a mieux aimé appeler
çhlamydit)
thlamydia M qu'aucun autre monument n’ avoit fait conn
u e L’Empereur y paroît dans fon habit militaire avec
des campeftria , forte de pantalon qui couvroit entièrement
les cuilfes, & qui defeendoit plus bas qu’ à mi-
lambe. Ni les grands bas-reliefs de Trajan, exécutés
peut-être par les mêmes artiftes que ceux de la colonne,
&■ repréfentant quelqu’un des memes fujets , ni ceux de
Marc-Aurèle, qui font aufiî beaux, ne nous offrent la
moindre trace de tous ces détails. „ . ,
f » Dans le coftume civil, les perfannes en dignité &
les prêtres portoient dans les cérémonies une efpèce
d’Itole, appelée Lrta , ornement qui fut le lorum des
Mècles fuivans- Aucun marbre ne nous a confervé, avant
f ige, de Septime-Sévèré ( époque de la décadence des
|rts), cette partie de l ’ancien coftume romain. Les Conc
is , depuis Conftantin , font repréfentés grofliérement
fur 1 ivoire des diptyques i ils y paroiflent avec le lorum
& avec toute la pompe du coftume confulaire, comme
quelques perfonnes defireroient que les artiftes exécutent.
aujourd’hui les portraits héroïques.
H L i.orfque les fculpteurs anciens fe font vus forcés de
repréfenter dans cette efpèce de portraits, mis en action
& compofant des fujets 'd’hiftoire, la tunique & la
toge romaines, combien ne fe font-ils pas permis de
fuppreffions & de modifications ! Aucune figure de ma-
gïftrat romain ne préfente la prétexte, aucune figure de
fénateur le laticlave, aucune figure de patricien le croif-
/tint de la chauflure, quoique ce fuflent les marques dif-
dnétives de leurs dignités ou de leurs rangs. De même le
hoii ton exigeoit à Rome que la toge ( vêtement très-
amplé, & , depuis Augufte, employé feulement dans les
Cérémonies & pour la repréfentation) fe groupât fur
l’éftomac en un grand noeud circulaire, appelé umbo,
liom qui exprimoit aufli la partie faillante du milieu du
bouclier. Aucun monument ne préfente cet umbo. Il eft
p|efqu’in utile d’ ajouter que toutes les figures d’hommes
& de femmes portent leurs tuniques à nu fur la chair ,
fans aucune efpèce de chemife, quoique les écrivains
gijecs & latins parlent à'indu/ium, d e Jubuculu s à‘ /typo~
bajis & àïhypodytes.
1 Nous ne connoifions qu’ un petit nombre de bas-
reliefs, dont les fujets foient tirés de, l’hiftoire grecque
ou de celle des fuccefleurs d’Alexandre. La frife du Par-
éhénon d’Ath ènes , qui repréfente la proceflion des Pana-
ménées3 eft de ce nombre. On voit par cet ouvrage cé-
Iqbre, que Phidias avoit donné l’èxemple de la fuppref-
fipn de quelques vêtemens, & que même il avoit agi à
cet égard avec moins de réferve que fes fuccefleurs. Plu-
neurs des cavaliers athéniens, qui forment la marche ou
le ^cortège de la Théorie repréfentée fur cette frife, font
nus : leurs chlamydes voltigeantes ne cachent fouvent
aucune partie de leurs membres. Les préfets de la céré-
ponie, prêtres ou magiftrats , qui remettent les vafes &
Ss Renfiles facrés entre les mains des vierges athé-
|Mnnes > & qu’on voit fculptés dans la portion de cette
rile appartenante au mufee Napoléon, n’ont point de.
cliemiie ni de tunique. Un large manteau eft jeté d’une
manière pittorefque autour de leur corps , qu’elle laiffe
r^ ume ^es obfervations, & il en conclut
j.; Ber?eral que les fculpteurs anciens ont employé les
rèn«e.neS raif° ns fous trois afpeéts difféj
' Par Prmcipe de décence, comme fimple orne-
1° n)1’ p comme fignes ou attributs caraéteriftiques.
i | ‘ Ies OIlt employées par décence pour les ftatues
^»1- mmes & des Déefles. Les fculpteurs antiques ne
!* repréfentent jamais des femmes fans vêtement, à moins
que les artiftes n’aient pu alléguer pour prétexte le bain
ou la natation. C’eft d’après de femblables motifs qu’ils
ont repréfenté nues Vénus & les Nymphes. Les exceptions
à cette règle font très-rares. On peut même dire
qu’en cela les Anciens ont été plus réfervés que les
Modernes. On doit attribuer également à un motif de
décence la draperie qui enveloppe jufqu’ à mi-corps les
ftatuës de quelques Impératrices repréfentées en Vénus,
& le petit manteau qui fe groupe autour des cuifles de
plufieurs ftatues nues d’Empereurs romains : tels font
î’Augufte du mufée Pio-Clémentin , le Septime-Sévère
en bronze de Barberini, le Claude & le Germanicus de
la villa Borghèfe. Nous avons cependant des ftatues
d’Empereurs entièrement nues : telles le Domitien & le
Marc-Aurèle du mufée Napoléon, le Caiigula & le Macrin
du Vatican.
z°. L’ ornement & la richeiïe de l’enfemble paroiflent
quelquefois. avoir été le principal & peut-être le feul
motif qu’aient eu les artiftes pour ajouter des draperies
aux ftatues. C ’eft ainfi qu’ils ont donné une chlamyde à-
l’Apollon, à Méléagre, à Ganymède, & un petit man-„
teau groupé autour du bras gauche à plufieurs ftatues,
particuliérement aux Mercures.
30. Mais ces petits manteaux & ces indices de vêtemens
fervoient aufli fouvent à défîgner le caractère du
fujet. Ainfi ils défignent, dans les ftatues de M ercure, la
promptitude de fes meflages : la chlamyde de Méléagre
rappelleT’-habillement des chafleurs : l’extrémité feule
d’un manteau fur l'épaule gauche de Pompée & de Marc-
Aurèle apprend que le perfonnage, quoique n u , eft
cenfé habillé, & qu’il n’eft pas repréfenté comme un
lutteur fe préparant au combat, ni comme un homme
ordinaire lorrant du baflïn des Thermes. C ’eft pour cette
raifon que les ftatues des Pa/eftrites & des Pugillateurs
n’ont aucune efoèce. de draperie. —r Pour marquer le
caractère d’une ftatue, on a Souvent placé auprès d’elle
quelque partie de l ’armure. C’eft ainfi qu’ un fimple bouclier
ou même un baudrier annonce un guerrier, un
héros, un Empereur. Le Domitien du mufée Napoléon
n’a que la courroie fans épée. Sur les médailles de Lo-
cre s, Ajax paroît avec l’ epée & le bouclier dans l’attitude
d’un combattant, tantôt la tête nue, tantôt avec le
cafque. Le Claude de la villa Borghèfe a dans fa main le.
para^onium (épée romaine), emblème du commandement
des armees & de la dignité impériale. D’ailleurs,
il eft nu, & fes cuifles feules font cachées fous un petit
manteau grec. Les peaux des faons ( nébrides') que portent
Bacchus & les perfonnages de fon cortège , la peau
de lion dont Hercule eft revêtu, l’habillement phrygien
ou barbare, employé indiftinclement par les fculpteurs
grecs pour indiquer prefque toutes les nations de l’O rient,
font aufli des habillemens caraélériftiques. Scythes
, Thraces, Phrygiens , Arméniens , Perfes , Indiens
,. & c ., tous font vêtus de la même manière 5 ce qui
prouve d’ailleurs que les fculpteurs anciens n’ ont ob-
fervé ordinairement aucune vérité dans la repréfentation
du coftume des différentes nations : cependant les cheveux
courts, les mouftaches & le collier font recon-
noître un guerrier gaulois dans la belle ftatue que l’ oa
appelle improprement le Gladiateur mourant.
« 11 faut obferver que la prédilection des fculpteurs
anciens pour le coftume des fiècles héroïques étoit la
facilité qu’il leur laiffoit pour faire paroître le nu en
fupprimant quelques parties de l’habillement > ce qui fe
pratiquoit même quelquefois dans la réalité & fous leurs